Sauver David (partie 2)

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En vrai gentleman, il posa mon sac sur le siège arrière et m'ouvrit la porte côté passager. Il n'était pas très à l'aise dans ses gestes mais l'intention était adorable. Je lui souris et m'assis en prenant soin de ne pas effiler mon collant ou me ridiculiser en me cognant la tête, car la voiture était vraiment basse. C'était presque acrobatique pour arriver à rentrer avec un minimum de grâce dans cet engin. Une fois installée, il contourna la voiture et vint s'installer au volant. Étrangement, quand je le vis démarrer, je trouvais qu'il conduisait avec une certaine confiance. Il était différent, plus assuré dans ses gestes, et presque apaisé. Il prit plusieurs raccourcis que je ne connaissais pas afin d'éviter la circulation. Il n'avait pas répondu à ma proposition de déjeuner mais je décidai de ne pas insister. Je ne voulais surtout pas le brusquer ou le mettre mal à l'aise.

Il arriva enfin dans mon quartier et je lui demandai de se garer le long du trottoir en face du service juridique. Je me retournai vers lui et lui adressai un grand sourire.

« Merci Jacob. C'était adorable. Vraiment je ne sais pas quoi dire. J'espère que l'on se verra lundi ? ». Le jeune garçon allait répondre quand soudain mon téléphone se mit à vibrer dans ma poche de manteau. Je m'excusai et regardai l'écran pour savoir qui essayait de me joindre. David... Oh mon Dieu... Il ne devait pas sortir du poste avant au moins quatre heures. Je n'avais pas pu obtenir un rendez-vous avec un juge et on ne m'avait pas prévenu d'un quelconque accord. Pourquoi était-il sorti si vite ?

Jacob dû sentir mon affolement car il me demanda si tout allait bien. Non... Tout n'allait pas bien, c'était même une catastrophe mais je jouai la carte de l'hypocrisie et le rassurai tout en le remerciant une dernière fois. Je pris en vitesse mon sac à main à l'arrière et répondis le plus vite possible à l'appel.

Quand je décrochai je n'entendis qu'une respiration haletante. David... Il devait être affolé, perdu.

« Miss David... Ils m'ont relâché... Je ne comprends pas, je n'avais même pas fini de leur raconter mon histoire et je n'avais même pas encore déballé tous les noms. Ils m'ont dit qu'il n'y avait plus de charges contre moi mais je ne suis pas con, il y a un truc bizarre. Je suis sûr que les Sharks ont été prévenus... Miss David, j'ai peur... Vous ne savez pas ce qu'ils sont capables de faire ! Ils vont me dépecer vivant ou pire encore ils vont me couper les membres les uns après les autres en me gardant éveillé...

- Calme-toi David... Respire... Il y a sûrement une explication. Je vais appeler le poste de police pour connaître la raison pour laquelle ils t'ont relâché si tôt.

- Non ne raccrochez pas s'il vous plaît ».

Je l'entendis renifler au bout du combiné. Il pleurait, il avait la peur au ventre et je le comprenais. Je réfléchis le plus rapidement possible pour trouver une solution. Je n'avais plus de voiture donc il me fallait trouver un autre moyen de me déplacer à l'autre bout de la ville maintenant que Jacob était parti. Miss Hampton ! J'apercevais sa petite corvette bleue garée de l'autre côté de la rue. En gardant David au téléphone qui me suppliait de ne pas l'abandonner, je rentrai en trombe au sein des bureaux du service juridique sous les yeux ébahis de ma patronne.

« Miss Hampton, est-ce que je pourrais emprunter votre voiture s'il vous plaît... C'est David... Il... Il a des ennuis et je dois empêcher une chose terrible d'arriver... ». La vielle dame n'en demanda pas plus. Elle fouilla rapidement dans son sac et me lança les clés que je réceptionnai sans difficulté.

« Sois prudente Ellie... Je ne veux pas devoir t'identifier à la morgue ». Je hochai la tête et sortis du bâtiment. Je m'installai derrière le volant toujours le téléphone à l'oreille. Je sentais David paniqué de plus en plus à mesure que les minutes s'égrenaient.

« David. Écoute-moi. Tu vas me dire ta position exacte, je vais venir te chercher. Surtout garde ton calme et ne te fais pas remarquer. J'arrive mon grand ». Une fois l'adresse indiquée par David, je l'entrai dans le GPS de mon téléphone puis démarrai en trombe et priai le ciel pour que les Sharks ne le retrouve pas avant moi...

Je me souvenais des raccourcis que Jacob avait empruntés pour venir jusqu'ici et je m'engageai dans les rues parallèles aux allées principales. Je faillis griller quelques feux rouges et manquai de peu de renverser des piétons, mais la vie de David était en danger et je savais que je ne me le pardonnerais jamais s'il devait lui arriver malheur.

*******

L'adresse que David m'avait donnée se situait dans le Bronx. Il s'était réfugié dans une allée peu fréquentée derrière un restaurant. Je me garai le long d'un trottoir où divers attroupements de gens peu fréquentables étaient en train de discuter. J'espérais passer inaperçue en attendant que David me rejoigne. Je le rappelai mais laissai le moteur de la corvette en marche au cas où il faille partir le plus vite possible. Le jeune garçon répondit à la première sonnerie et je le sentai complètement affolé. J'entendai des tirs dans le combiné mais aussi non loin de l'endroit où j'étais garé. Les visages des hommes qui se trouvaient sur le trottoir fixèrent avec désinvolture la provenance du son des détonations. Mon sang ne fit qu'un tour. J'éteignis le moteur, pris mon sac noir à l'arrière de la voiture, et entrepris d'en sortir la seule arme que je possédais, un Beretta M92fs que je m'étais procuré il y a un an.

Je fermai précipitamment la voiture de Miss Hampton, et me dirigeai en courant vers les détonations. Je savais que pour n'importe qui ma réaction était complètement disproportionnée, non professionnelle, suicidaire. Mais je ne supporterai pas d'avoir une autre mort sur la conscience.

Je n'avais pas la tenue adéquate pour courir, c'est pourquoi je me débarrassai de mes bottines à talons que je jetai derrière moi. Quand j'arrivai à la hauteur des coups de feu, je me cachai derrière un mur. J'entendis plusieurs voix dont une que je connaissais bien. Une voix qui suppliait qu'on lui laisse la vie sauve. Si je me fiais à mon instinct, ils étaient trois. Je n'avais entendu que deux sons de détonations différentes, ce qui voulait dire que seulement deux d'entre eux étaient armés. Il me suffisait d'en mettre un à terre pour que l'autre capitule et que je puisse avoir assez de temps pour courir avec David jusqu'à la voiture. Un tir dans la rotule bien placé suffirait à faire hurler de douleur l'un des assaillants, pendant que l'autre n'aurait pas le temps de réaction nécessaire pour m'empêcher de lui tirer dans le bras, afin de le désarmer. David devrait réagir vite.


May It BeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant