Prisonniers (partie 2)

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IRINA ARAZOV

La jeune femme quitta le hangar, ravie d'avoir repris le contrôle de la situation. Les choses avaient failli déraper avec l'intervention de cette maudite asiatique. Heureusement, Adam, son larbin, s'en était occupé pour elle. Maintenant, il fallait qu'elle aille se ressourcer avant de commencer l'étape suivante de son plan. Nicolas David était suffisamment stupide pour croire qu'il tenait les rênes, mais il n'avait absolument aucune idée des tenants et des aboutissants de l'histoire. Elle avait toujours aimé cette expression : « la vengeance est un plat qui se mange froid »... pour l'heure, elle allait le manger « glacial » mais la victoire n'en serait que plus jouissive.

Une Aston Martin rouge vif l'attendait sous une bâche derrière le hangar. Elle adorait cette marque de voiture, et l'odeur du cuir neuf qui atteignit ses narines quand elle s'installa au volant. Irina mit le contact et se dirigea vers le New-York Presbytarian Hospital. Elle avait plusieurs choses à régler et il ne fallait pas qu'elle perde de temps.

Le service était pratiquement désert quand elle y pénétra. Cela jouait en sa faveur et elle n'eut pas besoin de se présenter pour pouvoir accéder à la chambre de Bryan Sutherland. Quand elle entra, ce dernier lui adressa un large sourire. Elle ne se lasserai jamais de ce si beau visage. Bryan était la douceur et la gentillesse incarnée. Il avait sauvé son frère des griffes d'une mère indigne et abhorrait en permanence un sourire face à l'adversité. Il avait beau être à l'article de la mort, elle était sûre qu'il serait capable de survivre jusqu'à ce qu'elle puisse trouver une solution. C'était cela qu'elle était venue lui annoncer.

- Rose ! Je suis content de te voir ! Approche que je vois ton beau visage.

Toujours aussi charmeur, Bryan invita la jeune femme à s'asseoir sur son lit médicalisé. Irina détestait qu'il ne connaisse pas son véritable prénom, mais son plan l'avait empêché de lui dévoiler. Elle devait rester cette « Rose », timide, cachotière... Cependant, elle avait l'impression qu'en présence de ce beau jeune homme brun, elle retrouvait son véritable caractère. Elle riait à ses plaisanteries ridicules et était tombée amoureuse de ses yeux couleur argent. Quand elle le rejoint, elle lui déposa un baiser timide sur ses lèvres si douces.

- Tu crois t'en tirer aussi facilement ?

Décidément, il était incorrigible. Il souleva faiblement son bras non prisonnier des perfusions, et déposa sa paume au creux du cou de la jeune fille. Il prolongea leur baiser et Irina sentit que son cœur s'emballait. Cela faisait des mois qu'ils étaient ensemble. Elle lui rendait visite tous les jours. Leur rencontre s'était faite à l'improviste. Elle avait des contacts à l'hôpital qu'elle devait voir régulièrement. C'est ici aussi qu'elle traitait ses brûlures, le traitement était simple : des bandages anti-infections, des antibiotiques et quelques crèmes à appliquer sur les plaies anciennes. Il se trouvait que le service des grands brûlés se trouvait juste en face de celui de Bryan.

Elle se rappellerait toujours son rire qui avait rempli de joie tout le service. Il avait toujours une plaisanterie à sortir, il rendait le sourire à des gens qui en avaient bien moins besoin que lui. Il était en quelque sorte l'ange-gardien de cet hôpital et Irina était tombée sous le charme. Cloué dans son lit, il dégageait une force qui frisait le respect, elle en avait été dubitative. Au départ, elle l'observait à la dérobée quand elle se rendait à ses rendez-vous, puis un jour, il l'avait interpellé alors qu'elle passait dans le couloir. Depuis, ils étaient inséparables. Si l'on avait dit un jour à Irina qu'elle connaîtrait ce sentiment qui fait battre le cœur si vite, que l'on croit qu'il va sortir de notre poitrine, elle ne l'aurait pas cru. Bryan était l'ancre qui l'empêchait de sombrer dans la folie. Certes, elle ne pouvait pas contrecarrer ses plans car sa vengeance était importante, mais si elle avait écouté son ressentiment, elle aurait fait bien pire.

À travers ses prunelles, elle pouvait sentir de l'amour et du respect, deux sentiments que seul un autre homme lui avait accordés : son père. Il lui avait été enlevé alors qu'elle était au milieu de l'adolescence.

- Qu'est-ce que tu me racontes aujourd'hui ma rose ? J'ai passé une journée très ennuyeuse, alors impressionne moi !

Le rire de Bryan était communicatif et Irina esquissa, elle aussi, un sourire timide. Elle prit sa main dans la sienne et commença, comme elle en avait l'habitude, à jouer avec ses doigts. Ils étaient délicats, longs et fins, et elle espérait encore qu'un jour ils se posent sur elle, pour lui prouver tout l'amour qu'il ressentait.

- J'ai une super nouvelle à t'annoncer Bryan !

- Tu as chopé deux billets pour le prochain concert de Coldplay !

- Arrête Bryan je suis sérieuse.

Le jeune homme observa alors Irina avec une lueur nouvelle dans les yeux. De l'espoir ?

- J'ai découvert un donneur compatible et quelqu'un qui pourra t'opérer dès ce soir !

- Quoi ? Mais...

- Ne pose pas de question Bryan ! Tu vas pouvoir vivre, c'est le plus important, tu vas sortir de ce lit, marcher, courir, tu vas...

Irina n'eut pas le temps de finir sa phrase que le jeune homme s'empara de ses lèvres. Des larmes coulaient sur ses joues, donnant un goût salé à leur baiser fiévreux et plein de promesses. Elle n'avait jamais vu Bryan pleurer, elle en était émue et souhaitait de tout cœur assister à sa guérison. Irina rêvait de pouvoir s'enfuir avec lui, s'allonger à ses côtés à la fin d'une rude journée et sombrer dans un sommeil sans cauchemar. Pour cela elle devait terminer ce qu'elle avait commencé. Bientôt tout serait terminé et elle rendrait à cette âme précieuse la merveilleuse vie qu'il méritait.

- Je dois y aller Bryan mais je te promets que je reviendrai vite.

- Je... Je crois que je t'aime Rose...

Irina en eut le souffle coupé. C'était lui qui l'avait dit en premier et sa voix était tellement émue qu'elle savait qu'il disait la vérité. Les yeux de la jeune femme devinrent humides et elle se jura intérieurement de mener sa mission à bien.

- Je t'aime aussi Bryan. De toute mon âme.

Elle l'embrassa une dernière fois et disparut dans le couloir aseptisé de l'hôpital. L'heure n'était plus au plaisir, mais au devoir...

May It BeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant