La mission de Princeton (partie 3)

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PRINCETON

Le médecin lui parlait mais le jeune homme n'entendait rien. Son frère était mort. La seule personne qui s'était sacrifiée pour lui venait de quitter ce monde, sans même que Princeton ait pu lui dire adieu. Il aurait eu tellement de choses à lui dire, tellement de choses à lui confier. Mais il se dit que finalement son frère était parti amoureux, encore dans l'illusion que rien ne pourrait être pire que leur mère. De plus, Bryan avait horreur des adieux et des grands discours alors finalement, Princeton se consola en se disant que son frère était parti en paix, sans souffrance. « Putain mais quelle connerie Princeton ! Tu sais bien que la dernière chose qu'il a ressentie c'est la peur de ce qui allait se passer ! ».

Le jeune homme n'avait pas versé une seule larme, comme si ses émotions avaient été complètement anesthésiées, qu'il avait trop enduré de choses ces derniers jours pour éprouver encore des sentiments quelconques. En réalité, si... Une seule émotion le traversait : la haine, le désir de vengeance, même la colère était en dessous de ce qu'il ressentait à cet instant. La colère est signe de changement, là, Princeton savait que rien ne pouvait être changé, il fallait mettre fin à tout cela et qu'importe la manière.

Jacob l'attendait dans le couloir de l'hôpital. Les médecins avaient vérifié que tout allait bien et il avait signé une décharge pour sortir de ce lieu, qui était pour lui plus une source d'angoisse que de réconfort. Quand il croisa les yeux de son meilleur ami, il ne put s'empêcher de penser à la douleur qu'avait pu ressentir Jacob de voir Bryan mourir et d'être complètement impuissant. Princeton s'en voulait d'être arrivé trop tard, et il n'arriverait jamais à se pardonner d'avoir été berné de la sorte. Les deux jeunes hommes ne dirent rien et, dans un accord tacite, quittèrent les lieux, le poids du chagrin pesant respectivement sur leurs épaules.

Une fois à l'extérieur, ce fut, à son grand étonnement, Jacob qui parla le premier.

- Où est Elena ?

- Si je le savais... Je n'ai aucune idée de son état, si elle va bien ou si elle est morte elle aussi, alors quant à savoir le lieu où elle a été emmenée...

- Je suis désolé Princeton.

- Tu ne pouvais rien faire.

- Pourrais-tu un peu me faire un topo sur ce qui se passe, parce que je t'avoue que je suis complètement perdu ! Putain c'est la merde...

- C'est peu de le dire...

Princeton s'évertua à tout expliquer à Jacob pendant que les deux amis marchaient dans les rues de New-York, sans véritable but. Il lui confia avoir assassiné rageusement Adam et le fait qu'il ne se reconnaissait plus... Jacob ne dit rien et fut simplement présent pour les confidences de celui qui avait toujours cru en lui.

- Je ne sais pas comment retrouver Elena et ça me ronge de ne pas savoir ce qu'elle subit en ce moment...

- Tu m'as bien dit qu'Adam travaillait avec cette « Irina Arazov » et que tu l'avais tué ?

- Oui mais je ne vois pas en quoi ça va nous aider.

- La police est intervenue à l'hôtel ?

- J'ai entendu les sirènes alors je pense qu'ils ont dû constater le décès de l'un des criminels les plus recherchés de New-York à l'heure qu'il est, pourquoi ?

- Je pense que l'on peut joindre Irina. Quand les corps sont retrouvés par les services de police, les officiers prennent toujours les objets personnels des victimes et les mettent sous scellé jusqu'à la résolution de l'affaire.

- Je ne vois pas où tu veux en venir.

- J'ai l'espoir qu'il avait un téléphone sur lui et que ma mère va pouvoir nous aider sur ce coup-là Price.

C'est de la détermination que lut Princeton dans les yeux de Jacob. Ce n'était pas une si mauvaise idée mais il ne pouvait pas se rendre au poste de police, il était le meurtrier et même si Adam était une pourriture, le jeune homme pouvait être arrêté et enfermé pour son crime. Jacob reprit la parole, coupant Princeton dans ses réflexions ;

- Est-ce que tu as un téléphone que l'on pourrait utiliser ?

- Heu. Oui, tiens c'est un téléphone prépayé que j'ai acheté pour contacter ma sœur.

Jacob ne posa pas de questions supplémentaires et composa un numéro sur le mobile premier prix.

- Allo. Maman. C'est Jacob. Je voudrais te demander un service et je sais que tu ne pourras pas refuser. Alors et d'une tu me laisses parler et ensuite tu prends ta décision.

Princeton était fier de voir son ami avec autant d'assurance. Il ne bégayait plus, il se tenait plus droit et son allure pouvait faire imaginer qu'il avait pris au moins dix ans en quelques jours. Le jeune homme remerciait le ciel de ne pas lui avoir enlever les deux frères qu'il possédait dans ce monde : un frère biologique et un frère de cœur.

Jacob parla un certain temps avec sa mère et dut user de nombreux chantages pour la faire craquer, mais après ce que lui avait raconter Princeton sur cette dernière, elle n'était pas en position de force. Son ami finit par raccrocher et le regarda un sourire timide sur le visage.

- Il faut que je passe au commissariat du district de l'hôtel. Elle m'attend là-bas et m'a promis que j'aurais ce que je désirai.

- Et bien mon petit Jacob a bien grandi !

- Va te faire foutre Price ! De nous deux c'est toujours toi qui as été le plus immature !

- Je plaide coupable votre honneur

Les deux amis rirent de bon cœur et ils savaient tous les deux que ce genre de moments seraient rare dans les heures à venir, alors autant en profiter.

Princeton attendait sur le trottoir en face du commissariat. Il était angoissé, apeuré mais surtout haineux. Il ne tenait pas en place et avait l'impression que cela faisait une éternité que Jacob était rentré rejoindre sa mère. Quand il le vit réapparaître, en arborant un sourire triomphant, il sût que c'était dans la poche.

Une fois assez loin de toute autorité policière, Jacob sortit son butin : un magnifique smartphone intact et déverrouillé, que demandez de mieux ?

Princeton lui prit des mains et fouilla dans le répertoire. Aucun signe d'une Irina ou même d'une Rose...

- Attends regarde !

Jacob pointa un numéro enregistré sous le pseudonyme : « Boss ».

- Je suis pratiquement sûr qu'il s'agit d'elle. N'oublie pas qu'il était à ses ordres.

Princeton regarda son ami et acquiesça d'un signe de tête. Il entreprit d'appuyer sur l'écran pour appeler quand Jacob l'arrêta.

- Il vaut mieux que ce soit moi qui la contacte. Imagine qu'elle reconnaisse ta voix et que tu pètes les plombs. Il faut que ce soit moi et d'après ce que j'ai compris, ça ne l'arrangera pas que je sois toujours vivant. Elle voulait se venger de mon père, alors pourquoi ne pas lui donner l'occasion de terminer sa mission en nous jetant dans la gueule du loup, mais en étant un minimum préparés ?

- Ouais tu as sûrement raison.

Jacob prit le téléphone, appuya sur la touche « appeler » et le porta à son oreille. 

May It BeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant