JACOB
Le jeune homme avait essayé de forcer sur ses liens une bonne centaine de fois, il n'y avait rien à faire. Après ses essais infructueux, il avait crié sa rage espérant que quelqu'un l'entende de là où il était, d'ailleurs, où était-il ?
Soudain, la lourde porte en fer s'ouvrit et un brancard passa le seuil en premier, suivi de près par un médecin et une infirmière. Le cœur de Jacob s'arrêta quand il vit le corps inerte de Bryan, son visage était tellement pâle et il était relié à un moniteur cardiaque. Un appareil respiratoire l'aidait aussi à être maintenu en vie et une perfusion était relié à son bras ballant, complètement amorphe.
Ce qui inquiétait le plus Jacob c'est qu'il lui avait enlevé sa dialyse, cela signifiait que l'opération était imminente et qu'il allait mourir, ici, au milieu d'une pièce froide et effrayante. La peur lui vrillait l'estomac et plus aucun son ne voulait sortir de ses lèvres, la paralysie prit ensuite possession de ses bras et ses jambes.
Mais en voyant la porte ouverte, il se dit que c'était peut-être la seule chance pour lui de se faire entendre. Alors, il s'obligea à réagir vite et à se débarrasser de cet état léthargique. Ses cordes vocales se débloquèrent et il hurla : « À L'AIDE ! AU SECOURS ! ». Le médecin et l'infirmière se figèrent et cette dernière, armée d'une seringue, qu'elle avait immédiatement sorti de la poche de la blouse, s'approcha dangereusement de lui. Après cette injection, il savait qu'il ne pourrait plus jamais crier, alors dans une dernière volonté de vivre, il s'évertua à appeler à l'aide du plus fort qu'il le pouvait. Les murs en auraient tremblé tellement son hurlement faisait transparaître son désespoir et sa détresse. Rien. Personne ne vint à leur secours... Tout était perdu...
Alors qu'il croyait qu'il était définitivement à l'article de la mort, une ombre se détacha derrière le médecin. Jacob hurla à nouveau pour qu'on vienne l'aider. Le regard paniqué de ses assaillants lui redonna du courage et une once d'espoir s'immisça dans son esprit embrumé.
- Qu'est-ce qui se passe ici ?
Un jeune homme d'à peine trente ans passa la tête par la porte entrouverte. Son regard se porta tout à tour sur le corps inanimé de Bryan et sur Jacob, ligoté et impuissant. L'homme portait lui aussi une blouse et Jacob, même d'où il était, vit le stéthoscope pendre à son coup : un médecin ! Ils étaient sauvés ! Il allait prévenir la sécurité, la police, et ils sortiraient de cet enfer. Mais, les espoirs du jeune homme furent bien vite anéantis quand il vit l'autre médecin, celui qui avait amené Bryan, sortir discrètement un pistolet de l'arrière de son pantalon. Il allait le tuer, l'unique espoir qu'ils avaient de s'en sortir allait se faire descendre. Non... il ne pouvait laisser une telle chose arriver. « Allez Jacob ! Bouge-toi ! »
- ATTENTION ! IL EST ARMÉ ! BAISSEZ-VOUS !
À son grand soulagement, leur sauveur comprit immédiatement que quelque chose de pas net était en train de se dérouler devant ses yeux. Il se tourna avec une vitesse fulgurante vers son collègue pour le plaquer au sol avant qu'il puisse tirer. Une détonation se fit entendre et un énorme trou apparut dans le plafond. L'infirmière se jeta sur le « trouble-fête » afin de le mettre hors d'état de nuire. Mais il était assez grand et plutôt fort et il la poussa sur le côté avec une telle violence qu'elle trébucha en arrière et rencontra le brancard de Bryan, avant de tomber au sol, arrachant au passage quelques fils reliés au moniteur cardiaque. Jacob était terrorisé et la panique s'empara de lui quand il vit que le masque à oxygène n'était aussi plus relié à la machine qui l'aidait à respirer. Oh mon dieu ! Bryan !
La lutte était sans merci mais soudain, l'infirmière s'étant relevée de sa chute, planta l'aiguille qui était destinée à Jacob, dans le dos du médecin venu les sauver. Ce dernier, avant de s'évanouir, eut le temps d'appuyer sur un bouton de son téléphone de garde. Jacob sut alors qu'il y avait encore une chance après avoir observé la tête de ses bourreaux devenir aussi pâle que la mort. Ils étaient apeurés.
- Il faut se barrer d'ici ! Je refuse de perdre mon droit d'exercer et d'aller en prison !
- N'oublie pas qu'elle nous retrouvera Maggie ! Elle nous a demandé expressément de transplanter son rein et le foie de cet homme, sinon elle nous le ferait payer !
- Danny, je ne peux pas... Je suis désolée.
Sur ces derniers mots, l'infirmière s'enfuit, laissant le médecin sans scrupule livré à lui-même. La machine de Bryan hurlait d'un son strident et continu, et c'était le seul bruit qui transperçait le silence qui régnait maintenant dans la pièce. Jacob abaissa sa dernière carte en espérant que ce médecin n'avait pas fait son métier uniquement pour l'argent et qu'en réalité, c'était la peur qui l'avait fait agir ainsi.
- Je vous en supplie... Détachez-moi et aidez-moi à sauver mon ami. Je sais que vous n'êtes pas si mauvais et que vous ne vouliez pas tout cela. S'il vous plait...
- Vous ne comprenez rien... C'est toute la vie de ma famille que je risque dans cette histoire...
- C'est fini... La sécurité va arriver et vous le savez, alors faites une bonne action ! Putain ne le laissez pas crever !
Jacob commençait à perdre son sang-froid et la peur de voir son ami mourir le mettait dans un état de stress immense. Le médecin regardait autour de lui comme s'il cherchait une solution de repli. Lui aussi était en état de panique et ses yeux trahissaient le doute qui était en train de s'immiscer dans son esprit.
- S'il vous plait... Allez mettre votre famille à l'abris mais sauvez-nous... Vous avez eu affaire à une folle mais croyez-moi, vous n'entendrez plus jamais parler de nous si vous faites cette bonne action. J'oublierai votre visage ! Je ne dirai rien !
Jacob savait que c'était pitoyable de sa part de réagir de la sorte mais c'était la seule solution qui s'offrait à lui. Il n'était ni en état de se battre ni en état de lui offrir quoi que ce soit d'autre.
Alors que son espoir de voir le médecin changer d'avis s'amenuisait à mesure que les secondes s'égrenaient, ce dernier s'avança brusquement vers Jacob et entreprit de le détacher. Ses yeux étaient révulsés de terreur et ses gestes fébriles firent comprendre au jeune homme qu'il allait s'enfuir. Il lui laissait juste la possibilité d'appeler du renfort pour que quelqu'un d'autre prenne le relai pour sauver Bryan. Une fois libéré de ses liens, le médecin s'avança vers la porte en fer restée ouverte mais s'arrêta sur le seuil, la tête baissée en direction du sol.
- Je suis désolé pour votre ami. Croyez-moi, quand vous aurez une famille vous comprendrez à quel point on peut devenir un monstre pour protéger ceux qui comptent le plus pour nous.
Sur ces derniers mots, le médecin passa la porte et se mit à courir dans le couloir. Jacob mit un moment à se relever. Tous ses membres le faisaient souffrir. Cela était sans nul doute dû au fait d'être resté immobile sur une table d'opération pendant des heures. Néanmoins, il devait aider Bryan, rebrancher le moniteur, remettre le masque à oxygène. Quand il entreprit de mettre les pieds par terre, Jacob eut un vertige mais il se reprit rapidement. C'était sans doute l'adrénaline qui contrôlait ses gestes à présent. Il rejoignit le plus vite possible son ami et pria pour qu'il n'ait pas rendu l'âme pendant l'altercation. S'accrochant à cet espoir, il remit le masque à oxygène sur le visage extrêmement pâle du frère de Princeton et rebrancha le moniteur cardiaque pour vérifier son état de santé. Alors qu'il vit une ligne continue s'afficher, les larmes lui montèrent aux yeux.
- Allez mon vieux ! Ne nous abandonne pas maintenant ! Tu n'as pas le droit putain !
Jacob s'évertua à effectuer un massage cardiaque à Bryan. Ses gestes frénétiques l'empêchaient de sombrer dans le désespoir. Il n'entendit même pas les secours arrivés, la sécurité l'obligea à reculer pour laisser faire les professionnels mais Jacob n'entendait rien. Il sentait qu'il hurlait, qu'il pleurait mais aucun son n'atteignait ses tympans, comme si un immense nuage de coton l'enveloppait, le détachant complètement de la réalité et empêchant son cerveau de sombrer dans la folie.
Bryan était mort... C'était fini... Princeton n'y survivrait pas... C'est quand il pensa à son meilleur ami qu'il le vit, regardant les médecins s'évertuer à ramener en vie son frère. Il restait stoïque, complètement choqué, son visage ne reflétait aucune émotion. À cet instant, Jacob sut que Princeton ne serait plus jamais le même et qu'il allait faire un carnage.
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May It Be
Bí ẩn / Giật gân"Prix de l'Histoire la plus Innovante" au concours des Wappies (Wappies Award - Édition 3) Gagnante "The Story of 2019" (WattyContestFR) Elena est une jeune new-yorkaise de vingt-cinq ans. Diplômée en sciences criminelles comparées en France, elle a...