L'Enlèvement

28. Ligne droite

On me réveilla d'un long coup de sifflet.

- Debout, fainéante, debout! Tu vas être en retard à ta nouvelle école.

Il me fallut une bonne minute et un atterrissage brutal sur le plancher de béton froid pour me rappeler où j'étais. Soupir.

On me servit des toasts et une tasse de chocolat chaud, sur lesquelles je dis les grâces rapidement intérieurement. Je ne savais pas s'ils savaient que j'étais chrétienne et je ne tenais pas à ce qu'ils le sachent. Pas avant de savoir où était Derek. Penser à lui était d'autant plus pénible que je n'avais aucune idée de ce qu'il était devenu... Je fis une autre prière dans ma tête pour sa protection.

La première impression que j'eue de cette baraque grise en béton était que, forcément, ils faisaient escale dans un autre poste de gendarmerie. Bien sûr je ne dis pas cela à voix haute. Je descendis de la voiture encerclée de deux gendarmes, empêchant tout geste de ma part pour m'échapper et deux autres suivaient derrière, armés de pistolets électriques et de mes effets personnels. De quoi m'inciter à marcher en ligne droite.

Ils m'abandonnèrent au secrétariat avec mon sac comme seul compagnon. Je le vidai sans gêne sur le parquet ciré pour en évaluer le contenu : ils n'avaient presque rien enlevé. Seulement, ils l'avaient certainement fouillé puisque je me retrouvais maintenant avec un coffre à crayons flambant neuf et les conserves avaient disparu, à mon grand désespoir. La Bible de poche était toujours sur moi. La secrétaire m'observa tout ranger dans mon sac avec une précision méticuleusement compulsive.

- Votre nom, mademoiselle?

Je restai muette. Devrais-je répondre mon nom, un faux nom, ou ne rien répondre. Le silence l'emporta.

- C'est ça, toutes les mêmes, elles vous laissent le sale boulot...

« Pauvre de vous, madame, maugréai-je intérieurement, voulez-vous que je vous apporte un verre d'eau fraîche? Oui, et en passant, mon nom est Axandria Monsigny, voulez-vous que je l'épelle? Hum, vous êtes payé pour chercher mon nom, arrêtez de vous plaindre. » Fort heureusement, rien ne franchit mes lèvres. Moi aussi j'avais du travail à faire, côté amour inconditionnel.

- Donc pour toi, ce sera le 3e local à ta droite au dernier étage. Pour trouver ton lit, ce sera celui sur lequel il n'y a pas de draps, la ménagère les mettra au courant de la journée. Voilà ton horaire, les locaux sont inscrits dessus. Je vois qu'on t'a déjà parlé de l'uniforme, tu devrais donc savoir les règles visant celui-ci.

Pour les grandes lignes du discours, je n'ai pas le droit de l'enlever jusqu'à 9 heures du soir et nous avons un uniforme pour dormir.

- Est-il possible d'appeler pendant que nous sommes ici?

- Chaque élève a droit à trois appels pour l'année et ils doivent durer moins de 15 minutes.

Enfinla lumière au bout du tunnel.