106. 20 coups

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Lorsque je franchis les portes de la lice, je jetai un coup d'œil interrogateur à Padopoulos. Je crus qu'il m'avait conduit dans la mauvaise salle : Un énorme podium trônait au milieu et des bancs de bois étaient disposés tout autour. Il s'agissait réellement de la lice, sauf que cette journée-là tout le monde était convoqué pour regarder une personne se faire massacrer : Gina.

Je pris place à mi-chemin entre la scène et la dernière rangée de banc afin de ne pas troubler mon amie par ma présence. Gianita ne prit pas les mêmes précautions : elle s'assit au bout du premier banc. Je l'appelai pour lui indiquer où j'étais, mais elle déclina mon offre. Je supposai qu'on lui avait donné l'ordre de s'asseoir aussi près de l'estrade, peut-être pour lui donner un avant-goût de ce qui l'attendait. De toute façon, Derek venait d'entrer et j'allai le chercher pour le guider vers ma place. Je demandai aussi des nouvelles de Cardin à Padopoulos. Celui-ci m'apprit qu'il aidait la condamnée à se préparer. De nouveau, je m'interrogeai : Que mijotaient-ils?

La salle se remplit rapidement et le silence se fit presque instantanément. Le père de Gina monta sur le podium et lut devant un micro :

- Mlle Gina Ricardo est accusée d'avoir menacé la paix mondiale et de christianisme. Sa peine consiste à recevoir 20 coups de fouet puis de se faire jeter dans un bassin de requin ligotée.

Un murmure parcourut l'assemblée. Je ne risquais pas de m'avancer pour regarder si on nous en donnait le choix, mais je devinais qu'on ne nous le donnerait pas. Étonnamment, Néron Ricardo semblait en pleine possession de ses moyens. Je supposai qu'il avait déjà fait son deuil. Derek me souffla :

- Depuis quand la lice a un bassin de requin?

Comme s'il nous avait entendus, M. Ricardo répondit :

- Le châtiment par le fouet s'effectuera ici, ensuite il faudra sortir pour l'exécution.

Des nuages s'étaient amoncelés dans le ciel, signe que la pluie ne tarderait pas à tomber. Cela rendrait l'ambiance encore plus déprimante. Je poussai un soupir.

- Est-elle déjà arrivée? demanda Derek.

- Pas encore.

Elle ne tarda toutefois pas. À peine son père descendit de l'estrade que Gina entra escortée de deux hommes armés de fouet. Ils l'attachèrent à un pilier et se mirent à la fouetter à tour de rôle. J'enfouis ma tête dans le torse de Derek pour ne rien voir. Mes larmes tachèrent le tissu orange de la combinaison de mon mari, mais il ne paraissait pas s'en soucier. Lui-même se mordait la langue pour ne pas crier de surprise quand Gina recevait les coups. Vingt coups plus tard, les bourreaux se retirèrent en traînant mon amie derrière eux, laissant des gouttes de sang sur leur passage. Un gendarme nous indiqua ensuite la sortie pour se rendre à l'extérieur. J'empoignai Derek par le bras et guidai ses béquilles jusqu'à la cour. 

L'EnlèvementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant