113. Du tact au tact

46 4 0
                                        

- Tu as soudoyé tous les gardes de la prison ou quoi?

Nous étions assis sur les marches de l'entrée du centre de détention avec vue sur le champ à moitié carbonisé et sur la forêt s'étendant à perte de vue. Je ne comprenais pas comment il nous avait été si facile de simplement sortir ainsi.

- Vois-tu, un gars aveugle en béquilles ne peut pas aller bien loin de toute façon, répondit Derek, pince-sans-rire. Mais j'y pense, ajouta-t-il après un temps de réflexion, est-ce moi ou ton humour a refait surface? Ah, ça doit vouloir dire que tu te sens mieux!

- Beaucoup mieux, merci de demander, soulevai-je en me lovant contre lui.

Je me sentais réellement mieux depuis que mon mari était apparu dans ma cellule. La douche que j'avais prise avant de sortir avait forcément dû aussi amélioré mon état. Il fallait croire que j'étais en maladie d'amour ou autre mal s'y apparentant en raison de l'exécution certaine et prochaine de l'homme de ma vie. De quoi augmenter ma température corporelle de plusieurs degrés.

- Dis, euh... Tu connais ta date de... enfin le jour où..., balbutiai-je.

Derek prit son temps pour répondre.

- On m'a convoqué hier pour m'en parler... commença-t-il vaguement.

- Que t'ont-ils dit? insistai-je.

- Qu'on me lancerait dans la lice après-demain.

- Dans deux jours? m'écriai-je ahurie. J'aurais cru qu'ils t'auraient tué plus tard...

- Ah oui?

Oups. Je m'étais trahie.

- Oui enfin... Tu sais ce qu'ils vont te faire? enchaînai-je de mon ton le plus innocent.

- Cardin m'a dit que tu le savais, déclara-t-il sans ciller.

- Il le sait aussi, répondis-je du tact au tact. Il te l'a dit, ça?

- Non, avoua Derek.

Je n'arrivais pas à le croire. Il en avait du culot, Jacob, de dire à mon homme que je savais comment il allait mourir sans admettre qu'il était là aussi quand on me l'avait annoncé! S'il lui avait menti en déclarant que c'était moi qui avais choisi cette sentence, il risquait de recevoir un seau sur la tête!

- Écoute, ils m'avaient demandé de choisir ma sentence et ensuite de choisir la tienne.

- Oui, on me l'a dit aussi.

Je n'essayai même pas de cacher mon exaspération.

- Hé, de quoi je me mêle? m'indignai-je en parlant de Jacob. Dis à ton copain d'arrêter de te déblatérer tous mes entretiens avant qu'on ait eu la chance d'en parler! C'est Ricardo, au final, qui a choisi la lapidation parce que ni moi ni Jacob ne pouvions trancher. Non mais...

- Lapider?

L'EnlèvementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant