Chapitre 31

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Assise au fond de la salle du trône, Stephania mit son éventail contre sa bouche pour cacher un bâillement. Cet assommant conseil de vieux et de vieilles têtes de linotte était si inintéressant qu'elle pensait qu'elle allait peut-être s'évanouir d'ennui. Cela faisait des heures qu'ils disaient (toujours du même ton monocorde et ennuyeux à mourir) que le conseil perdait de l'argent, que la cour était mal gérée et que la rébellion, si elle devait se poursuivre, coûterait très cher à l'Empire. Et comme si ces dignitaires étaient incapables de le comprendre, le conseil avait déjà dit trois fois que la rébellion avait déjà coûté au roi la moitié de son or.

Pourtant, après des heures de péroraisons futiles et après que des dizaines d'idées absurdes aient été évoquées, ils n'avaient trouvé aucune solution. Aucun d'entre eux. Stephania avait subi bien trop de réunions de ce type, et écouter marmonner ces imbéciles ne faisait que lui prouver de plus en plus clairement qu'ils étaient tous des singes écervelés qui prétendaient savoir de quoi ils parlaient et ce qu'ils faisaient.

“Y a-t-il d'autres sujets à aborder ?” dit le roi depuis son trône à l'avant de la pièce.

Dieu merci, personne ne dit mot, pensa Stephania qui mourait d'envie de quitter cette salle qui sentait le renfermé et avait mal aux fesses à force de devoir rester assise sur cette chaise non rembourrée. Depuis l'annonciation du mariage de Thanos avec Ceres, elle avait été reléguée à la rangée du fond près de la porte de sortie, obligée de s'asseoir à côté du dignitaire le moins important de l'Empire tout entier, à l'endroit le plus éloigné du roi.

Je remonterai dans l'estime du roi, se promit-elle. Bientôt.

Juste au moment où elle croyait que la réunion était finie, Cosmas, assis devant, se leva et demanda à se tenir devant le roi.

Stephania leva les yeux au ciel. Ce jour ne finirait-il jamais ? Elle savait que c'était le vieux croulant sénile et dur de la feuille qui s'occupait de Thanos — un peu trop, selon Stephania — mais que pouvait-il diable avoir à dire qui justifie de prolonger d'une seule seconde une réunion du conseil comme celle-ci ? Tout ce que faisait ce vieil homme jour après jour, c'était lire des parchemins dans la bibliothèque, observer les étoiles et parler de choses sans véritable importance, du moins pour l'Empire.

Stephania remarqua que les autres dignitaires, dont les yeux étaient vitreux d'ennui, avaient l'air aussi peu intéressés qu'elle par le vieux schnoque.

Tout en observant le motif floral de sa robe en soie verte, elle écouta d'une oreille en s'éventant pendant que le vieil érudit tendait un parchemin vers le roi.

“On m'a demandé de livrer cette lettre à Thanos”, dit Cosmas. “Elle est de Ceres.”

Stephania ouvrit immédiatement les oreilles. Peut-être le vieux érudit n'était-il pas aussi stupide qu'elle l'avait pensé. Il m'a certainement induite en erreur, pensa Stephania qui présumait que le vieil homme était plus fidèle à Thanos qu'au roi lui-même ou à l'Empire. Cela dit, elle s'était peut-être trompée.

Ne tenant plus en place, elle réprima un sourire. Maintenant, cette roturière, Ceres, allait être mise à mort et Stephania épouserait Thanos et tout redeviendrait normal. Quelle chance ! Peut-être les dieux allaient-ils lui sourire, après tout.

Stephania regarda le roi lire la lettre en silence. Ses sourcils descendirent de plus en plus bas sur son visage gras. Quand il eut fini, il leva les yeux.

“As-tu lu ça ?” demanda le roi à Cosmas.

Cosmas s'avança.

“Oui, et c'est à ce moment que j'ai su qu'il fallait que je vous le soumette”, dit-il. “Cette fille est une menteuse et une voleuse sournoise, et aussi une révolutionnaire introduite parmi nous.”

La Cité De Délos(Tome 1) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant