La Cité De Délos(Tome 1)

Chapitre 69

Blotti parmi les statues et les mausolées du cimetière, Sartes écoutait discuter les chefs de la rébellion. Ils s'étaient rassemblés autour d'une des tombes de l'endroit et avaient étalé la carte dessus. Anka se tenait au cœur d'un groupe comprenant les membres les plus âgés de la rébellion. Sartes n'était présent que parce qu'Anka avait insisté pour qu'il le soit.

“Nous ne savons pas avec certitude s'ils vont passer ici”, insista un gros homme qui ressemblait à un ouvrier travaillant sur les quais. “Nous risquons de faire courir des risques à tous les nôtres sans raison.”

“Pas sans raison, Edrin”, insista un jeune homme qui ressemblait à un combattant. “Pour empêcher l'Empire de capturer, torturer et massacrer les nôtres.”

“Tu soutiens toujours Anka”, dit Hannah. Elle avait été à la réunion quand ils avaient pris cette décision.

Sartes commençait à mieux comprendre qui étaient les rebelles. Le jeune homme s'appelait Oreth. Il semblait jouer le rôle d'une sorte d'assistant auprès d'Anka, qui s'efforçait d'assurer la cohésion de la rébellion. Le grand homme, Edrin, était fiable mais doutait visiblement des capacités d'Anka. Sartes n'aimait pas Hannah parce qu'elle semblait être bien plus préoccupée par la place qu'elle occupait au sein de la rébellion que par autre chose.

“Nous sommes au bon endroit”, dit Anka en montrant l'endroit sur la carte.

“Dans ce cas, où est l'ennemi ?” demanda un autre homme. On l'appelait Yeralt et Sartes avait entendu dire qu'il était le fils d'un marchand, probablement plus riche que le reste des membres de la rébellion. “Ce n'est pas que je veuille contester ta décision, Anka, mais les nôtres s'inquiètent à juste attendre comme ça. Ils pensent que le plan a foiré.”

“Dans ce cas, je vais leur parler”, dit Anka. Elle regarda autour d'elle et, à la grande surprise de Sartes, il vit son regard s'arrêter sur lui. “Viens avec moi, Sartes. Montrons-leur pour quoi ils se battent.”
Sartes suivit Anka, qui sortit sur la route qui traversait le cimetière. Autour d'eux, les rebelles sortirent de leurs cachettes dans les fosses et derrière les statues pour écouter.

“Écoutez-moi”, dit Anka. “Je sais que vous avez peur. Je sais qu'il y en a parmi vous qui pensent que nous ne devrions vraiment pas faire ça, que nous devrions nous enfuir et évacuer les nôtres. En vérité, nous pourrions le faire.” Elle éleva la voix. “Nous pourrions le faire et l'armée traverserait cet endroit. Elle descendrait sur les villes et les villages pour nous y rechercher mais ça irait. Nous n'y serions pas.”

“Les gens ordinaires y seraient, eux”, poursuivit Anka. “Nous avons tous vu ce que l'armée peut faire. Elle entrera dans ces villes et y tuera des gens. Elle les sortira de leur maison et elle les torturera. Elle enrôlera de jeunes hommes comme Sartes que voici. Elle réduira en esclavage ceux qui ne peuvent pas combattre pour elle. Nous pourrions nous enfuir mais nous ne le ferons pas. Nous ne le ferons pas parce que le peuple de Delos a besoin de nous.”

En entendant ce discours, les rebelles qui se tenaient aux alentours acclamèrent Anka et Sartes ne put s'empêcher des les imiter. Au-dessus des acclamations, il entendit un grondement. Oreth accourut.

“Ils arrivent !”

Sartes vit Anka hocher la tête. “Tout le monde à sa place ! Souvenez-vous du plan !”

Sartes repartit dans sa cachette du côté de la statue et vit les autres reprendre leur position et quasiment se fondre à nouveau dans le paysage du cimetière. Sartes observa l'approche des soldats de l'Empire de derrière le bras d'une statue en marbre. Il eut l'estomac noué en pensant à ce qui allait se passer mais ne bougea pas, ne s'enfuit pas.