Chapitre 61

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Sartes avait un plan. Il ne cessait de se le remémorer alors qu'il traversait le camp de la 23ème, se faufilant parmi les activités de début de soirée de l'endroit comme un étranger. Il avait un plan pour s'évader. Maintenant, il lui fallait espérer que ça allait marcher.

Se le répéter aurait dû le réconforter mais, en fait, ça ne faisait que lui rappeler l'immensité des enjeux. Pour les appelés qui essayaient de s'évader, le châtiment était la mort, sans exception. Le meilleur scénario serait de recevoir un rapide coup d'épée en essayant de fuir le camp. Au pire … ils pourraient forcer les autres appelés à le faire, à battre Sartes jusqu'à ce que mort s'ensuive pour prouver leur loyauté. Il savait sans le moindre doute que les appelés obéiraient. Ils auraient trop peur pour faire autre chose.

D'une façon ou d'une autre, le plan de Sartes était simple : il allait se rendre au bord du camp, puis se frayer un chemin entre les pieux et les fils de détente, les fosses et les cordons qui l'entouraient. Ce qu'il y avait de difficile, c'était de vraiment le faire.

Le fait qu'il ait réussi à se rendre utile aux officiers du camp jouait en sa faveur. Cela avait habitué les gens à l'idée qu'il pouvait se déplacer dans le camp, alors que les déplacements de la plupart des appelés étaient soigneusement contrôlés. Ses déplacements lui avaient permis d'apprendre les horaires des relèves de la garde et les endroits où se trouvaient les pires pièges qui encerclaient le camp.

“Je peux le faire”, se disait Sartes en continuant à évoluer entre les tentes.
“Faire quoi, appelé ?” demanda un officier d'un ton péremptoire en se mettant sur sa route. Sartes le reconnut : c'était un des maîtres qui assurait leur entraînement. Sartes pensa se souvenir qu'il s'appelait Varion.

“Livrer ce message, monsieur”, dit Sartes en sortant un des six messages qu'il avait cachés. “Le capitaine a dit que c'était urgent.”

Le maître d'entraînement le lut en entier, regarda le sceau qui se trouvait en bas puis le rendit à Sartes.

“D'accord, dépêche-toi, appelé.”

Sartes se dépêcha de repartir et, à ce moment-là, il fut content d'avoir choisi un des vrais messages, vu la façon dont l'officier avait vérifié le sceau. Il avait pris soin de rendre visite à autant d'officiers que possible pour récupérer des messages avant de se mettre en route parce que, plus il aurait de messages à distribuer, plus il aurait accès au reste du camp.

Il en avait aussi créé des faux, avait gribouillé des messages sur tous les bouts de parchemin qu'il avait pu voler dans les stocks du timonier. Il ne pouvait pas quitter le camp par la force mais son stock de messages et les ordres qu'ils contenaient lui permettraient d'utiliser les mécanismes de l'armée elle-même comme une sorte de protection.

Il faudrait quand même qu'il se dépêche. Aucun message ni mission ne permettait à un appelé de sortir du camp sans être accompagné d'au moins une douzaine de vrais soldats. Cela signifiait qu'il faudrait que Sartes s'enfuie dans un des petits créneaux entre deux relèves de la garde, quand il y avait un peu de confusion. S'il ratait ce créneau, sa tentative d'évasion échouerait entièrement.

S'il ratait ce créneau, il ne rejoindrait jamais la rébellion. Il pourrait ne jamais revoir sa famille. Il ne reverrait jamais sa sœur et cette pensée suffisait à lui nouer l'estomac.

Donc, il se dépêcha à traverser le camp en brandissant sa liasse d'ordres comme un bouclier. Il avait presque atteint le bord quand un autre officier l'arrêta.

“C'est toi le garçon qui porte les messages pour le général, n'est-ce pas ?”

“Oui, monsieur.”

La Cité De Délos(Tome 1) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant