Chapitre 12

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Debout au sommet d'une colline qui surplombait Cumorla, la capitale de Haylon, île distante de la Mer Mazéronienne, le commandant Akila vit avec joie s'effondrer la statue du Roi Claudius. Il inspira et une douce sensation de justice le remplit. Dans les cieux bleu azur au-dessus de la cité, de la fumée s'élevait du château du roi.

Justice, pensa Akila. Aujourd'hui, on faisait enfin régner la justice. Les membres de la famille royale avaient tous été enfermés jusqu'au dernier à l'intérieur de cet abominable bâtiment à sept flèches qui, maintenant, n'était plus qu'un tas de cendres.

L'armure fouettée par le vent, il contempla les milliers d'hommes qui se tenaient sur le flanc de la colline et dont les bannières rouges pro-révolution battaient dans le vent. Avant le crépuscule, il les mènerait à une bataille qui les libérerait finalement de plusieurs siècles d'oppression. Sa poitrine se gonfla de fierté.

Les gens de Haylon avaient assez souffert sous le joug des rois tyrans. Ils avaient payé des impôts déraisonnables, envoyé leurs meilleurs guerriers à Delos et courbé l’échine devant les dix mille soldats de l'Empire qui infestaient les rues jour et nuit. Toute sa vie, Akila avait vu des femmes et des filles se faire violer, des enfants se faire fouetter et arrêter. Les jeunes avaient été forcés de travailler de longues journées dans les champs du roi. Ils étaient revenus le corps zébré et le regard désespéré. Il savait que tout cela était maintenant du passé, car il fallait qu'ils reconquièrent leur liberté, qu'ils reconquièrent leur vie.

Un messager approcha.

“La partie ouest de Cumorla a été sécurisée, sire”, dit-il.

“Et les soldats de l'Empire ?” demanda Akila.

“Ils fuient vers l'est.”

“Combien de victimes civiles ?”

“Trois cents, à l'heure actuelle.”

Akila serra les poings. C'était moins qu'il n'avait prévu mais chaque vie perdue était un poids sur sa conscience, la mort d'un autre fils ou d'une autre fille, d'une mère, d'un frère, d'une sœur ou d'un père qui s'était fait massacrer en défendant la liberté de cette terre.

Il renvoya le messager et fit signe à son lieutenant, auquel il demanda d'alerter la dernière vague de milices. Ils piégeraient les envahisseurs à l'entrée ouest et les traiteraient avec la courtoisie avec laquelle ils avaient traité son peuple. Après ça, il ne resterait pas grand chose d'eux et cela rendait Akila fort joyeux.

D'un coup d'éperon, Akila fit avancer son cheval pour mener le lieutenant et ses hommes à la bataille. Il descendit la colline et entra dans la cité par les portes nord. Il longea des passages à galerie, des auberges fermées et des cahutes d'ouvriers cadenassées. Il passa des familles blotties dans des coins, des enfants allongés face contre terre dans les rues pavées et des chevaux sans cavalier qui s'enfuyaient. Les milices suivirent Akila hors des murs de la cité et se cachèrent derrière des tranchées pour attendre les milliers de soldats de l'Empire qui n'allaient pas tarder à fuir par les portes pour essayer de s'échapper en direction du port.

Aucun ne doit s'échapper, avait dit Akila à ses hommes ce matin en ordonnant à des centaines d'hommes de monter la garde aux docks, car il suffirait d'un fuyard pour que Delos soit informé de la situation, après quoi le roi enverrait des dizaines de milliers de soldats de l'Empire à Haylon.

Plusieurs minutes passèrent, et plusieurs autres minutes. Cela faisait presque une heure qu'ils attendaient et que le crépuscule descendait.

Puis, soudain, le premier soldat de l'Empire sortit à cheval et Akila vit qu'il tenait l'emblème de l'Empire.

La Cité De Délos(Tome 1) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant