Mars - 14.

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— Je vous laisse cinq minutes tous les deux, et on en est déjà aux petits surnoms ? Je savais bien que ce n'était pas une si mauvaise idée, de partir.

Victor soupira en regardant Yann reprendre sa place. Un léger sourire ornait le visage du blond. Le lycéen fronça les sourcils. Ce sourire... Il ne l'aimait pas. Il ne rayonnait pas comme d'habitude. Il était presque triste.

— On n'allait pas s'entre-tuer, le rassura Mathéo, tandis que Yann prenait place. Je sais que tu tiens trop à lui. Si je le tuais, tu m'en voudrais.

— Ne dis pas n'importe quoi, lui rétorqua Victor qui rougissait à vue d'oeil, comme si t'étais gagnant d'avance !

— Je ne suis pas sûr que tu fasses le poids de toute façon, crevette.

— Eh ! T'es un connard, quand tu le veux, en fait !

— Les gars... soupira Yann. Ne vous battez pas pour moi. C'est très mignon, mais je vous assure, c'est pas nécessaire.

— Ouais, parce que c'est moi, ton préféré, hein, Yann ? dit Victor.

— Mais oui, Vic.

Yann s'approcha et déposa un baiser sur la tempe du brun, qui se mit à rougir violemment jusqu'à la racine des cheveux. Il venait vraiment de l'embrasser ! Ce n'était pas un baiser ouragan, un de ceux qui vous retournent l'estomac. C'était juste une promesse. La promesse d'un amour protecteur. Une marque qui devrait rester pour l'éternité. Gravée directement dans la mémoire. Et il l'avait fait devant Mathéo ! Victor aurait presque sauté de joie, s'il avait pu.

— Eh, ça va ?

— Hein ? dit Victor, en sortant de sa torpeur.

— Tout va bien ? demanda Yann.

— Euh... ouais, ouais.

— T'es tout pâle, Victor !

— Ah... Peut-être l'alcool.

Il évita un court instant le regard des deux autres jeunes hommes. Tellement de questions se bousculaient dans sa tête qu'il ne savait pas par laquelle commencer. Arrivait-il seulement à les formuler correctement ? Des bribes de mots lui venaient comme le bruit du feu d'artifice qui se déroulait dans son esprit. Cette pensée l'étonna tellement qu'il en perdit tout le goût : et si Mathéo aimait vraiment Yann ? Que devait-il penser à ce moment précis ?

Son coeur devait se déchirer en mille morceaux. Pourtant, l'égoïsme reprit possession de son esprit plus rapidement qu'il ne l'aurait voulu, et il ignora sa raison. Un sourire béat se dessinait sur ses lèvres. Un sourire qu'il ne tentait presque plus de dissimuler.

Le brun resta silencieux un court instant, laissant ses deux camarades parler. Il n'intervient que rarement, se contentant d'acquiescer ou de réfuter, le regard dans le vague. Qui sait où se trouvait son esprit ? Perdu dans un lit imaginaire aux côtés de son bien aimé, ou peut-être bien sur le bord de la plage... Il était aussi envisageable de le trouver même au lycée, sous les flocons, la main prisonnière dans celle de ses doigts sœurs...

— Hey, les gars, je vais fumer un coup. Vous venez ?

C'était la voix de Mathéo. Victor, indécis, regarda ses deux compagnons. Il jeta un coup d'oeil à la scène. Pauline était descendue, remplacée par deux jeunes garçons. L'un était brun, l'autre blond. N'importe qui dirait qu'ils ne chantaient pas de manière harmonieuse. L'un était trop timide, l'autre beaucoup trop grave. Mais Victor écarquilla les yeux. Sa main s'aventura du côté de Yann, jusqu'à lui toucher la cuisse. Il la retira néanmoins deux secondes plus tard. C'était comme s'il avait reçu une décharge électrique. Il s'interdit alors de faire une blague sur le coup de foudre.

Lie tes raturesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant