Mai - 10.

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Comme tous les amoureux transis, les fantasmes de Victor l'avaient conduit à imaginer mille scénarios dans lesquels il passait le plus clair de son temps aux côtés de Yann. Une grande partie de ses soirées s'étaient résumées, pendant un temps, à rêver de ces moments qu'il aurait aimé partager avec Yann, le tout bien souvent bercé par un pot de glace devant la télévision. Un vrai cliché, c'était à hurler de rire... Si ce n'était pas si déplorable.

Deux ans plus tôt, il n'aurait jamais cru que tout ça se réaliserait, et encore moins qu'il aiderait Yann à accomplir ses objectifs de vie. Il se serait contenté d'un sourire béat sans s'autoriser à penser que ça puisse lui arriver.

La liste qu'il lui avait donnée ne l'avait pas vraiment surpris. C'était une liste plutôt classique, sans désirs vraiment extravagants. Yann savait que le temps lui était compté. Il savait que sa liste ne serait probablement pas complète. Alors il s'était montré plutôt simple. Si on oubliait le festival de Cannes, songea Victor en posant le magazine qu'il tenait.

— Il y a vachement de monde, geignit-il.

— T'inquiète, répondit Yann, ça ne devrait pas tarder. Quand je pense que t'as voulu qu'on commence par là...

— Il faut bien commencer par quelque chose. L'apparence me semble être un bon point de départ. Pas toi ?

— Pour être franc... Je pensais qu'on aurait pu commencer par un truc plus... comment dire... tranquille ? Mais c'est très bien aussi ! Je suis content.

Victor jeta un oeil à sa montre. Presque vingt minutes qu'ils patientaient en discutant de tout et de rien en attendant leur tour. Commencer par passer chez le coiffeur lui avait paru être une bonne idée.

Le salon était un endroit plutôt chaleureux. L'équipe, majoritairement composée de filles, s'activait avec bienveillance et entrain. Les douces lueurs du plafond réchauffaient la grande salle et des morceaux de pop américaine berçaient doucement les oreilles des clients. Des fauteuils confortables étaient disposés çà et là pour ceux qui patientaient. Une étagère sur laquelle trônaient livres et autres revues attendait sagement qu'on vienne bien la regarder. Ce que les deux garçons avaient évidemment fait avec plaisir.

— De toute façon, je crois que ça ne me fera que du bien. Je repousse depuis plus d'une semaine...

Il se passa une main dans ses cheveux beaucoup trop longs à son goût. Il mettait beaucoup trop de temps à faire les choses. Ses mèches qui commençaient à tomber sur son front lui rappelaient bien sa tendance à tout repousser au lendemain...

— J'espère que ça rendra bien, avoua Yann.

— Bah, au pire, on sera deux à avoir l'air con. Et de toute façon, ce sera éphémère.

Yann acquiesça. Ils ne pouvaient plus reculer, à présent. C'était à leur tour. On les emmena bien vite au bac à shampoing, où ils profitèrent d'un massage comme ils en avaient rarement goûté. Ils se laissèrent emporter par les vagues de douceur, tout en discutant avec les deux coiffeuses qui s'occupaient d'eux. Victor nota dans un coin de son esprit que Yann semblait particulièrement apprécier ces massages. La jalousie le piqua. Il espérait être assez doué pour que son blondinet soit plus réceptif encore à ses mains...

La coupe dura un petit moment. En regardant les touffes de cheveux qui tombaient au sol, Victor faillit s'étouffer. Il n'en était pas encore au point où on pouvait dire qu'ils étaient longs, mais ça lui donnait un air plus sauvage qui commençait à le déranger.

— C'était trop bien ! clama Victor en sortant du salon.

— Ouais, ça change...

— Tu es encore plus beau comme ça.

Lie tes raturesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant