"Mais tu ne m'as pas protégé... Tu m'as défié !"

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-9 avril 1645-
Nuit.

Jon sort du carrosse et me prend délicatement la main pour me faire sortir à mon tour. Nous entrons péniblement dans le château, fatigués. Je monte directement dans ma chambre...
J'enlève les épaisseurs de ma robe et défais ma coiffure. Quelqu'un toque à ma porte. Je jette un coup d'œil craintif à celle-ci. Je prie pour que ce ne soit pas Edward qui entre lorsque je prononce un faible "entrez".
Le comte de Berntsen entre alors. Surprise, je le salue en me couvrant d'un châle.

- Votre majesté, salue-t-il aimablement.

- Comte de Berntsen, comment êtes-vous rentré au château ?

- Comme vous, en carrosse... Vous avez été admirable, déclare-t-il gentiment.

- Si seulement mon époux pouvait dire la même chose, dis-je tristement. J'ignore comment cela s'est terminé mais j'ai peur qu'il n'ait fait une erreur...

- Non, rassure-t-il. J'ai regardé comment cela se déroulait avant de partir. Certains hommes ont raccompagné des familles chez eux quant à ceux qui vous ont attaquée, ce sont des anarchistes que l'armée du roi s'est empressée d'éliminer.

- Merci pour le renseignement, dis-je. Il me semble vous avoir aperçu à plusieurs reprises parler à des familles modestes lors de l'événement, que leur disiez-vous ?

- Je me suis assuré que rien ne leur manquait pour le moment et nous avons parlé de choses insignifiantes, répond-il vaguement. Vous savez, je pense que ce que nous avons fait peut vraiment marcher. Je vous avoue qu'au début, je n'y croyais que très peu, je n'avais simplement plus d'espoir en rien puis quand j'ai surpris votre conversation avec le duc de Birkeland, j'ai vu dans votre projet, un avenir raisonnable pour mes enfants qui demeurent sans mère. Je ne pouvais pas les laisser dans ce pays incertain et meurtrier, j'ai pensé à partir mais j'ai compris que j'éprouvais beaucoup trop d'attachement pour la Norvège et que je ne pouvais pas la laisser sombrer. Je me suis alors rallié à vous. Je ferais tout pour que cela fonctionne, pour la Norvège.

- Je vous admire cher comte..., je murmure, pensive. Je ne serai pas capable d'autant pour la Norvège, même pas pour la France, tout compte fait. A vrai dire, j'ai fait cela égoïstement. J'avais peur pour mes enfants, mon époux et... moi. Je ne mérite pas tout ce prestige.

- Que vous le méritiez ou non n'est pas la question, il faut que la paix s'abatte sur le pays, déclare-t-il fermement.

- Vous... avez certainement raison, dis-je, étonnée qu'il soit froid avec moi alors qu'il vient de me livrer l'histoire de sa vie.

- J'ai raison.

- D'ailleurs, avez-vous aperçu la marquise de Haugland, malgré le fait qu'il faisait nuit ?

- Oui, il me semble qu'elle est rentrée chez elle, son père doit s'inquiéter pour elle...

- Bien, je vous remercie, dis-je tout aussi froidement que lui pour lui faire comprendre que ce n'est pas lui qui a un pouvoir sur moi mais bien le contraire.

Il comprend alors que ma phrase sous-entend qu'il est prié de s'en aller. Il s'incline poliment et sort sans plus de discussion.

Je me pose enfin sur mon lit et regarde mon ventre avec attention. Je le caresse tendrement et je me rappelle soudain que cela fait longtemps que je ne suis pas allée voir mes filles. Elles me manquent terriblement en cet instant. Je me mets à somnoler doucement sur le lit quand la porte s'ouvre violemment produisant un bruit à en sursauter. Je sors de ma torpeur brutalement. Je ferme les yeux en sentant déjà ces nausées revenir... Je fuis son regard, apeurée.

- DEPUIS QUAND ?! hurle-t-il. Depuis quand tu me caches tout ça ?!

Je sursaute et me lève du lit pour l'affronter.

Secrets RoyauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant