~ La mère d'Edward, la reine de Norvège, Ingrid ~
-18 avril 1642-
Un garde me mène jusqu'à ma chambre.
- Voilà votre chambre, vous ne dormirez dedans que temporairement.
- Comment cela " temporairement " ? je m'exclame.
- Après votre mariage avec le prince Edward, vous dormirez dans la suite royale.
- Dans un même lit ?!
- Evidemment, souffle-t-il.
Ai-je réellement mon mot à dire, hum, je ne crois pas...
- Bon, où est Edward ?
- Il n'est pas là. Il revient de guerre. Il sera là soit ce soir, soit demain.
- Il part souvent en guerre ?
- Sûr, c'est sa passion.
- La guerre ?! Sa passion ?! Je sais qu'il aime ça, mais sa passion ?!
- Oui, madame. J'en suis désolé, dit-il tristement.
- Il part longtemps ?
- Eh bien, c'est la guerre, évidemment, cela dure quelques mois en moyenne. Pour les plus longues, c'est des années. Rassurez-vous, il n'aime pas les longues guerres, il aime gagner rapidement.
- Il est au courant que je suis là, au moins ?
- Oui.
Une dame entre, ce n'est pas une servante vu ses vêtements. Elle est très élégante et belle. Elle a des yeux bleus et des cheveux bruns, la peau très pâle. Les traits creusés par la fatigue, elle a l'air triste... Et froide ?
- Laisse-nous, ordonne-t-elle.
- Bien, ma Reine, dit le garde en s'en allant.
C'est la Reine ?! Ça paraît évident, maintenant qu'il l'a dit. Elle a une beauté éblouissante ! Même ma mère, pourtant réputée pour être très belle, n'égale pas sa beauté... Elle a l'air de se faire respecter.
- Attends, dis-je doucement.
Il regarde la Reine, en lui lançant un regard interrogatif. Elle hoche la tête.
- Comment t'appelles-tu ?
- Jon...
- Bien. Tu peux partir.
Il s'en va, nous laissant seules. Personne ne parle, j'attends qu'elle commence puisqu'elle est mon aînée. Elle tourne autour de moi et m'observe sous tous les angles. Je suis tellement gênée que je baisse la tête, je me rends compte que mes ballerines sont un peu abîmées... De toute façons, j'en achèterai d'autres.
- Vous êtes Eléonore Delvalée ? demande-t-elle.
- En personne, j'affirme.
- Vous connaissez la raison de votre visite ?
- Ma visite ? Vraiment ?
- J'en conclus que vous savez parfaitement pourquoi vous êtes ici... Je vous suis tellement reconnaissante ! s'exclame-t-elle.
- Pardon ?
- Votre père m'a vanté votre douceur et votre gentillesse, vous saurez calmer mon fils.
- Comment cela "calmer votre fils" ?
- Depuis qu'il est petit, il est amoureux de la guerre. Depuis ses 15 ans, il n'est que de passage au château. Et il m'évite... Et je crains... je crains qu'un jour... qu'un jour, il... il se fasse tuer... Il nous crée aussi pleins d'ennemis. Avec une épouse, il sera contraint de rester. Et votre père m'a dit qu'il vous faisait confiance pour gagner son amour et le garder au château. Il m'a aussi vanté votre beauté, et ça, je vois qu'il n'a pas tort. Edward sera charmé, il a toujours aimé les belles femmes enfin du moins avant ses 15 ans, je ne le connais plus. Tous les 6 mois, le matin, on vient me réveiller, me disant que le prince est passé dans la nuit. Je m'en veux à chaque fois de ne pas le voir, mais je n'y peux rien... Sauf une fois, dans la journée, il est venu me voir et m'a demandé le trône. Je lui ai répondu qu'il aurait le trône, une fois qu'il se mariera. Evidemment, il ne le voulait pas alors il est reparti... Un autre jour, il est revenu et m'a demandé de lui trouver une princesse à épouser... En bonne mère, je lui ai trouvé ce qu'il fallait.
"Ce qu'il fallait" ? Vraiment ?
- Je veux bien vous aider, mais il ne m'aimera pas. S'il aime la guerre, croyez-vous qu'il aimera mon calme et ma douceur ?
- Votre père vous fait confiance, s'il vous fait confiance je le fais aussi...
Pourquoi fait-elle à ce point confiance à mon père, auraient-ils une liaison secrète ? Seraient-ils amants ?
- Vous avez l'air de vraiment tenir à votre fils... Alors que lui vous ignore plutôt.
Elle hésite... Et dit finalement :
- Je tiens tellement à lui, il pourrait mourir du jour au lendemain, comme... comme son père.
- Votre mari est mort à la guerre ?
- Oui... Je ne veux pas que mon fils reproduise la même erreur. Je voulais tellement lui trouver une épouse pour qu'elle lui parle et essaye de le comprendre...
- Vous n'avez pas essayé ?
- Bien sûr que si, mais il ne veut rien entendre ! Il ne me supporte pas...
- C'est pour ça que vous avez inversé la dot ?
- En partie... Il n'y avait pas d'autres princesses à marier, alors j'ai fait avec... Promettez-moi de le convaincre à rester.
- Je... je le promets.
- Merci Eléonore, si vous réussissez, je... je vous offrirez ce que vous voudrez !
- Même de retourner chez moi ?
- Je... oui, si vous le désirez.
- Pourquoi me laisseriez-vous rentrer chez moi alors que vous avez payé une très grosse somme à mes parents pour m'avoir ?
- J'ai une fille nommée Olea. Mon mari l'a mariée au tsar de Russie, contre mon gré et celui d'Olea. Depuis 10 ans, nous n'avons pas de nouvelles. Elle est partie à 18 ans, comme toi... Si le Roi permettait, qu'elle nous rende visite, je serais tellement heureuse... Peut-être que maintenant, elle a des enfants... Mes petits-enfants... Eléonore, vous ne connaissez pas la sensation de perdre un enfant. Elle était ma seule fille... Je n'ai plus d'enfant maintenant, je suis seule au château trop grand pour moi.
Je me retiens de lui dire qu'elle avait encore Edward, mais je me rappelle qu'il n'est jamais là.
- Mon mari est mort deux ans plus tard.
- Je suis désolée... Vous m'avez moi, maintenant. Je vais vous aider, vous verrez tout ira mieux. De toute façon, il me faudra de la compagnie à moi aussi, si mon mari n'est jamais là...
Elle sourit amèrement.
- Vous êtes vraiment comme votre père...
- Mais qu'avez-vous avec mon père, à la fin ! Vous ne faites que des sous-entendus sur lui depuis quelques minutes !
- Votre père comme vous dites, est mon cousin, articule-t-elle en français.
- Comment ?
- Je suis sa cousine, on était proches quand on était enfant.
- Vous ne pouviez pas le dire plus tôt ?
- Je n'y ai pas pensé, sourit-elle, venez plutôt prendre de la tisane sur la terrasse avec moi.
- Avec plaisir.
Elle m'emmène passer la fin de l'après-midi avec elle sur la terrasse. Il faisait froid alors je suis allée chercher une couverture. Elle, elle n'avait pas froid car elle est habituée. On est bientôt au printemps, mais ce pays est vraiment au nord et il y fait tellement froid que je sens que je vais bientôt tomber malade.
Jon vient nous voir.
- Ma Reine, votre fils est là.
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Secrets Royaux
Historical FictionFrance, 1642. Le royaume fait faillite à cause d'une guerre perdue... À cette époque, les mariages arrangés sont de coutume alors c'est la solution que l'on juge la plus raisonnable pour sauver la France. C'est malheureusement la cadette de la fami...