Dans tes Rêves

Prologue

Je cours. Je sais que je n'en ai pas le droit. Mais je ne ressens pas cette douleur-là. Je cours sans m'arrêter. Sans me retourner. Je ne peux pas. Je risque de rester pétrifiée sur place. De me liquéfier. De fondre dans ces flaques d'eau sales et huileuses qui sont en train de baver sur mes bottines. D'y plonger ma tête de force et ne plus respirer par ces poumons brûlant de détresse. Seule, perdue, démolie. Voilà qui je suis. Depuis moins d'une heure pourtant.

Ce n'est pas la première fois qu'on me brise. Je ne devrais pas compter. Ca risque de me faire tomber rien que d'y penser, à toutes ces fissures qu'on m'a infligées. Mes genoux pourraient lâcher, mes jambes se dérober, sans aucune chance de me remettre sur pied. Je devrais compter mes pas, plutôt. Tiens, ouais. Pour ne plus penser. Et m'enfuir plus vite. Beaucoup plus vite. On ne doit surtout pas me rattraper. Pas cette fois.

Ce n'est pas la première fois qu'on me brise. Impossible de penser à autre chose. J'ai trop mal. Si je m'écroule, je me laisserai piétiner, vider de mes tripes. Peut-être que ça me soulagerait de cette douleur perçante, aigüe, indicible, qui est accrochée à chaque cellule de mon corps.

J'entends des cris derrière moi. Ils me paraissent en sourdine. J'ai l'impression que mes oreilles sont enfermées dans un caisson de décompression. Je ne veux plus entendre cette voix. Plus jamais. Elle est indissociable de ce qui m'a brisée cette fois, et la fois d'avant aussi, bien sûr.

Ce n'est pas la première fois qu'on me brise. Pas comme avant. Non, différemment. Plus insidieusement. Pire je crois. Mais cette fois, personne ne pourra recoller les morceaux. Impossible. Je n'y arriverai pas. Je n'ai plus rien. Plus rien. Plus. rien. Je veux juste m'échapper de ce cauchemar. Et puis ensuite... ensuite, peut-être que je me briserai une bonne fois pour toute.

Voilou pour ce prologue, qui se passe à un moment très différent du début de l'histoire... J'espère qu'il fera bien son job et vous donnera envie de lire la suite, qui, vous verrez, est dans un autre style ;) Dites-moi, dites-moi...