Chapitre 67

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   Les yeux fermés, du rouge imprègne mes paupières, derniers remparts avant la réalité déterminée à m'aveugler. Agression.

Impossible de savoir où se situe la souffrance, assiégeant mon corps entier. Vagues dévastatrices prêtes à me replonger dans le vide et l'inconscience. Douleur.

Allongée, attachée, ballottée de tous côtés. Un bruit assourdissant, celui d'une sirène. Angoisse.

Contrainte de lever le voile épais sur mes yeux. Eblouie par la lumière crue d'un néon. Un visage inconnu penché par dessus le mien. Détresse.

Je referme les yeux.

La voix de Kyle me permet d'avancer vers la lumière. Espoir.

Il se retourne, s'assurant que je le suis, et me laisse retomber dans l'abîme. Enfer.

Quelqu'un m'emporte pour me jeter dans la fosse aux lions. Valentin.

Je cours, me débats alors que Kyle m'observe en silence. Abandon.

Ai-je réellement ouvert les yeux ?

Je m'enfuis. Dans une pièce, Morgane m'attend paisiblement, un sourire aux lèvres. Agression.

Je la contourne, tout à coup asphyxiée par la sensation d'un coup de poignard sous l'omoplate. Douleur.

Allongée sur le sol, entourée de visages inconnus et familiers. Incapable de bouger, clouée à même le sol rigide et froid. Angoisse.

Des lumières vives, des sons stridents, on m'emporte, laissant tout derrière moi. Détresse.

Je n'ai plus qu'à clore les yeux.

On force le passage de mes paupières, derniers remparts avant la réalité déterminée à m'aveugler. Agression.

Ma tête, mon dos, ma jambe ne sont plus que souffrance. Je cherche un repère dans la lumière. Douleur.

Oscillant entre lucidité et inconscience, je lâche le fil du temps. Angoisse.

Un visage se penche au dessus de moi. Kyle. Amour dans l'incertitude. Espérance.

Je peux fermer les yeux.

   Lorsque j'ouvre les yeux avec difficulté, c'est pour les poser sur un plafond blanc et d'aspect granuleux. Puis un mur blanc. Des draps blancs. Des bruits stridents, dissonants, m'agressent les tympans. Je tente de bouger. Une douleur poignante m'en dissuade rapidement.

— Chérie, chérie, tu es réveillée. Oh, ma chérie !

Le visage fatigué de ma mère entre dans mon champ de vision, ses mains se posant délicatement sur ma figure. Je peux sentir leur chaleur et leurs tremblements sur mes joues. Et cette sensation si douce me pousse à fermer les yeux pour l'apprécier encore davantage.

Le froid laissé sur ma peau alors que ce contact rassurant est rompu me fait frissonner et m'oblige à relever de nouveau les paupières me paraissant pourtant attelées à du plomb. Je suis dans une chambre d'hôpital, visiblement. Je ne comprends pas pourquoi. Je dois fouiller dans ma mémoire pour retrouver le chemin qui m'a menée ici. Mais la douleur ainsi que ma mère parlant sans relâche enrayent mes souvenirs.

— J'ai eu si peur, mon bébé. Comment te sens-tu ?

Elle se retourne pour ordonner :

— Laurent, va appeler l'infirmier ! Elle est réveillée !

Dans tes RêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant