L'air se rafraîchissant – la soirée approchait à grands pas – il fut décidé de cesser notre petit jeu pour revenir au château rapidement, avant que Loti n'attrape froid. Pour ne pas nous faire repérer, nous passâmes par une entrée dérobée très peu empruntée, qui se situait dans les jardins, au sud. De là, nous emmenâmes Loti dans sa chambre en passant par des couloirs généralement déserts à cette heure-ci. Une fois à l'intérieur de ses appartements, je la fis se déshabiller alors qu'Aaron attendait dans le salon l'arrivée de la gouvernante, qu'il avait fait mander. J'aidai la petite à prendre son bain en discutant gaiement avec elle, jusqu'à l'arrivée de madame Aubin, qui prit la relève après m'avoir salué d'un sec hochement de tête. Je dis au revoir à la petite et rejoignit Aaron en frissonnant.
— Vous êtes trempée, dit-il.
— Vous êtes d'une perspicacité incroyable, votre Altesse, ironisai-je.
Un fin sourire étira ses traits.
— Permettez que je vous raccompagne à votre chambre.
Je haussai les épaules.
— Si ça vous fait plaisir.
Je sortis et il m'emboîta le pas. Nous croisâmes peu de monde, et les rares serviteurs qui rencontrèrent notre chemin eurent la décence de ne faire aucun commentaire. Heureusement, le temps de revenir au château, nos vêtements avaient un peu séchés donc ça ne se voyait pas tant que ça qu'ils étaient mouillés.
Nous nous arrêtâmes donc devant la porte de ma chambre et je fis face au prince en croisant les bras pour me réchauffer. Cette aile du palais n'était pas vraiment bien chauffée.
— Merci. De m'avoir escorté jusqu'ici.
— Il n'y a pas de quoi.
Nous nous fixâmes dans le blanc des yeux quelques secondes, puis il approcha davantage son visage du mien, dans l'intention visible de m'embrasser. Je détournai cependant la tête alors que ses lèvres se trouvaient à un millimètre des miennes. Elles ne rencontrèrent que ma joue.
— Je suis avec Logan, murmurai-je en ignorant les tiraillements de mon cœur.
Il ne dit rien, se contentant de me regarder, un orage dans les yeux. Les poings serrés, il semblait en combat contre lui-même. Et surtout contre sa jalousie.
Il se figea soudain un bref instant, comme à l'écoute de quelque chose. Puis il se détendit, attrapa mon visage entre ses doigts froids et m'embrassa passionnément, outrepassant mon refus. Choquée, je ne réagis pas et me crispai. Son bras se glissa derrière ma taille, me serrant contre son corps.
Un hoquet me tira de ma léthargie, et je compris. Je repoussai violemment le prince. Une servante dont j'ignorai le nom se trouvait à quelques pas de nous. Bien sûr, elle avait tout vu. Me voyant la regarder, elle se retourna et s'enfuit. Elle allait s'empresser de tout raconter à tout le monde. Je jurai et me dégageai des bras du prince pour me lancer à sa poursuite. Le temps que j'arrive au bout du couloir, elle avait disparu. Le souffle court, je revins auprès d'Aaron. Qui souriait, très fier de lui.
— Vous l'avez fait exprès.
Ce n'était même pas une question. Pas besoin parce que je savais qu'il l'avait fait exprès. Par jalousie. Pour se venger de ma résistance. Il savait, ou plutôt il avait appris à ses dépens que j'étais quelqu'un de très fier. Cet acte allait m'humilier dés que la nouvelle se répandrait. Ce qui ne devrait pas prendre plus d'un quart d'heure vu comme l'autre commère courait vite.
Son sourire s'élargit davantage, il resta silencieux. Je ne réfléchis pas : ma main s'abattit contre sa joue, plus fort que je ne l'avais jamais giflé. Sa tête partit sur le côté. Il resta comme ça, choqué par la violence du coup. Je n'attendis pas qu'il reprenne ses esprits.
— Enfoiré.
Je le dépassai et m'enfermai dans ma chambre. Le cœur au bord des lèvres, je me retins de vomir et m'assis sur le sol, le dos contre la porte et les genoux ramenés contre ma poitrine. Je plongeai ma tête dans mes genoux et me mis à pleurer.
Je ne sais pas combien de temps je demeurai dans cette position, mais ce fut suffisant pour que j'attrape des fourmis dans les jambes et que mon dos et mes fesses commencent à me faire mal, alors qu'en tant qu'espionne, j'avais l'habitude de rester des heures dans des positions plus inconfortables les unes que les autres. Je ne descendis pas manger. J'avais trop honte, et je ne voulais pas être dévisagée comme la nouvelle attraction des serviteurs, le nouveau divertissement de la semaine.
Quelqu'un frappa à la porte. Je ne fis aucun geste.
— C'est moi. Ouvre.
Je reconnus la voix de Lola. Elle semblait inquiète. Je me levai pesamment en grimaçant, les muscles engourdis, et je déverrouillai la porte. Dés que Lola fut entrée, je la refermai et me rassis dans la même position. Mon amie soupira et s'assis à côté de moi, puis me serra contre elle. Je me crispai mais ne tardai pas à me détendre. Je me surpris même à verser quelques larmes sur son épaule.
— Chut, m'apaisa-t-elle. Tout va bien.
Je restai dans cette position quelques minutes puis me dégageai doucement et lui fis face. Elle me sourit et essuya mes larmes avec ses doigts.
— Tout le monde est au courant, je suppose ?
Elle n'essaya pas de mentir, ou d'atténuer le choc.
— Oui.
Je hochai la tête.
— C'est un connard. Il l'a fait exprès. Parce que je l'avais repoussé. Mais bien sûr, personne ne croira ma version. C'est plus intéressant de répandre des rumeurs et de se moquer de ses victimes. Peu importe qu'elles souffrent.
— Oui, acquiesça-t-elle. Le prince est un crétin. Il aurait jamais dû te faire ça. Qu'est-ce que tu vas faire ?
Je haussai les épaules.
— Trouver un trou, le plus profond possible, et m'y enterrer dans l'espoir que personne ne me retrouvera jamais.
Elle rit et je souris tristement.
— Oui, tu pourrais faire ça. Ou alors, tu pourrais te lever, te passer de l'eau sur la figure, et aller manger. Tu pourrais ne pas te cacher et emmerder tous ceux qui parlent sur toi, toiser en retour tous ceux qui osent te toiser dans le couloir, et faire semblant que tout ça ne t'atteint pas.
Indécise, je me mordillai la lèvre.
— Non. J'en ai pas le courage.
Elle me prit la main.
— Kat, ici, c'est comme une arène. Les sentiments sont une faiblesse, tu vas te faire bouffer si tu les laisses sortir. Tu as tout le courage qu'il te faut, ça je le sais. Souviens-toi que tu ne choisis pas les épreuves que tu traverses, mais qu'en revanche tu peux choisir toi-même la façon dont tu te battras, et c'est toi qui choisis tes propres armes.
J'inspirai profondément. Elle avait raison, nom de nom. J'étais pas n'importe qui. J'étais une espionne. Faire semblant et dissimuler ce que je ressentais, c'était quasiment inscrit dans mon ADN.
— T'as raison, soufflai-je, apaisée.
Je me levai. Dépassée que je me décide aussi vite, Lola battit des cils.
— Ben tu fais quoi ?
— Je vais me passer de l'eau sur la figure, idiote.
Elle rit et se leva à son tour. Je passai donc par la salle de bain où je pris le temps de me rincer le visage jusqu'à ce que toute trace de larmes soit effacée.
— Je suis prête.
<3 <3 <3
hey hey
flemme d'écrire un long paragraphe pour m'extasier de ma partie
qu'est-ce que vous croyez, c'est crevant de se jeter des fleurs constamment pfiou
bonne lecture mes loulous <3
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Le Prince et la Panthère
RomantikLui, Aaron, se prépare à devenir roi d'un pays déchiré par des conflits de plus en plus violents. Le peuple se révolte, les rebelles se font de plus en plus nombreux et organisés. Aaron, coureur de jupons invétéré et arrogant, mais très bon combatta...