Je déboulai à un carrefour peuplé de soldats et de villageois qui se battaient. Je stoppai net mais n'eus pas le temps de trouver une cachette, me heurtant à plusieurs personnes qui couraient en tous sens. Je tombai et voulus me relever, mais un soldat me bouscula et ma tête heurta un mur. Je m'évanouis.
Je ne restai pas inconsciente longtemps. Même si j'eus du mal à émerger, je me remis à courir, plus vite qu'auparavant, me forçant à mettre des œillères pour rester concentrée sur mon objectif, à savoir retrouver mes parents malgré ma désorientation. Le sang, le feu, les cris, les rires méprisants, tout se mélangeait mais je ne devais pas sombrer à la folie environnante, pas avant d'avoir pu rejoindre ma maison, pas avant d'être certaine du sort de mes parents.
Ma course, comme mes pensées, fut violemment stoppée au coin d'une rue, quand je percutai un corps cliquetant. Un soldat ! Je faillis tomber mais il me rattrapa par le bras. Je plongeai mes yeux dans les siens : je n'y trouvai qu'un abîme de rage et de sadisme. Un sourire étira son visage couvert du sang de ses victimes, et je sus qu'il allait me tuer. L'adrénaline rua dans mes veines et je me débattis, ne faisant qu'attiser sa fureur. Il sortit un poignard. Je criai et tentai de repousser la lame qu'il essayait d'abattre à hauteur de ma gorge. Je ne réussis qu'à la dévier. La lame toucha mon visage, la douleur éclata dans mon corps. Je tournai de l'œil, ne trouvant plus la force de me battre. J'allais mourir. Le poignard se releva. Je le suivis de mon regard embrumé.
Soudain, il tomba, renversé par quelqu'un. Mes jambes ne me portant plus, je me laissai glisser au sol, le dos contre le mur. Les deux hommes se battaient. Celui qui m'avait sauvé réussit à retourner le poignard du soldat contre lui. Il l'enfonça d'un coup sec dans sa poitrine. Du sang jaillit et l'homme mourut dans un dernier râle. Mon sauveur se releva et se précipita vers moi.
— Katarina ! Oh mon dieu, ma fille, qu'est-ce qu'il t'a fait ?
Je le regardai. Ma vision troublée finit par s'adapter et le reconnaitre. C'était Luis, le meilleur ami de mon père. Il regardait mon visage, profondément attristé.
— Luis... murmurai-je.
Il me sourit tristement.
— On ne doit pas rester là. Tes parents m'ont envoyé te chercher, il faut qu'on aille les retrouver.
— Mes parents sont en vie ?
— Oui, pour l'instant.
Il me prit dans ses bras et se mit à courir. Luis avait toujours été très fort et endurant, il était bûcheron, tout comme son père avant lui. C'était un homme au visage brut et froid, impression renforcée par ses yeux noirs et ses cheveux mi-longs de la même couleur. Tous les enfants du village avaient peur de lui, même mes amis. Mais moi, je le connaissais depuis ma plus tendre enfance, et à mes yeux il n'avait rien d'effrayant. Il était comme un oncle.
— Tu as vu Connor ? lui demandai-je.
Il ne baissa pas les yeux, concentré sur son parcours.
— Non.
Je fermai les yeux un court instant. Connor était mort, c'était sûr. Un froid immense me remplit. Je priais pour que mes parents aillent bien.
La ferme était intacte quand nous arrivâmes. Ma mère sortit en courant.
— Maman !
Elle pleurait, et pleura davantage quand elle me vit. La douleur avait un tant soit peu refluée, sans doute grâce à l'adrénaline, mais je savais que mon visage devait être blessé.
— Merci Luis, merci. Rentre-là à l'intérieur.
Elle lui tint la porte. Luis me déposa sur la table et m'ordonna de rester allongé. Il y avait du bruit à l'arrière de la maison. Ma mère capta mon regard apeuré.
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Le Prince et la Panthère
RomanceLui, Aaron, se prépare à devenir roi d'un pays déchiré par des conflits de plus en plus violents. Le peuple se révolte, les rebelles se font de plus en plus nombreux et organisés. Aaron, coureur de jupons invétéré et arrogant, mais très bon combatta...