Le Prince et la Panthère

Chapitre 14 : L'étalon rebelle (6)

Une fois satisfaite, je reculai de deux pas et hochai la tête.

— Pirate est vraiment un cheval magnifique.

— Oui, confirma-t-il en s'essuyant les mains sur un torchon. Et il vous aime bien, ce qui n'est pas étonnant. Vous êtes une rebelle dans l'âme.

— Parce que vous croyez à la légende qui entoure ce cheval ? m'enquis-je d'un ton moqueur.

— Vous la connaissez ?

Je sortis de la stalle, talonnée de près par le prince, et refermai la porte.

— Oui. Logan m'en a parlé.

Il se rembrunit à la mention de mon petit-ami. Je me mordillai la lèvre et rangeai la caisse de pansage.

— Qu'importe, reprit-il en regardant Pirate pensivement, si ce mythe est vrai ou non. Ce qui compte, c'est que ce cheval a beau avoir été dressé, il ne se laisse pas monter. Mais je parie que vous pourriez l'amadouer.

Il braqua un regard calculateur sur moi.

— Vous voudriez que je le monte ? m'étonnai-je.

— Pas dans l'état où vous êtes, cela va de soi. Mais quand vous irez mieux ce sera quelque chose à tester, oui. Ce cheval vous fait confiance. Si vous arrivez à le monter peut-être se laissera-t-il monter par d'autres ensuite. A voir.

Je hochai la tête et nous sortîmes des écuries. Des serviteurs entraînaient les chevaux dans les carrières extérieurs, les faisant se dépenser en sautant des obstacles ou des exercices de dressage. Je repérai Logan, occupé à la longe avec une jeune pouliche bai. Il me vit et me fit un signe de main, que je lui rendis, le sourire aux lèvres, puis il se remit au travail.

— Vous l'aimez ? me demanda le prince d'un ton que je sus interpréter.

Je tournai la tête et l'observai. Il ne me regardait pas, les yeux rivés sur Logan. Puis il se détourna et nous commençâmes à revenir vers le palais. Je me décidai enfin à répondre :

— Je ne sais pas.

J'avais subitement la gorge nouée. Voilà une discussion qui ne me mettait pas à l'aise, loin de là.

— Vous êtes attirée par lui ?

— ... Oui, murmurai-je, le rouge aux joues.

— Vous avez hésité.

J'eus un rire nerveux.

— Pas du tout.

— Oh que si.

— Oh que non.

— Si vous le dites.

Il laissa planer un long silence puis s'arrêta brusquement alors que nous arrivions dans l'allée principale des jardins, qui permettait de rentrer au palais par une porte plus discrète que l'entrée principale. Il se tourna vers moi et scruta mon visage.

— Pourquoi sortir avec lui ?

— Vous... vous en avez vraiment des questions... bizarres, vous, bafouillai-je en me remettant à marcher.

Je n'eus pas fait un pas qu'il saisit mon bras pour me forcer à m'arrêter de nouveau.

— Répondez à ma question, Katarina.

Je frissonnai et me dégageai lentement.

— C'est ce que font deux personnes quand elles sont... attirées l'une par l'autre. Elles sortent ensemble, c'est dans l'ordre des choses vous savez.