Vie et mort d'un acteur (B&B)

Chapitre 22 - 2

Effectivement, très rapidement, l'ambiance évolue et la musique me plaît de plus en plus. L'attention n'est finalement que très peu portée sur nous. De temps en temps, nos noms sont rappelés dans les micros du club hôte. Les questions sont plutôt banales et les gens passent rapidement à autre chose.

Il faut dire que nous ne sommes pas là pour assurer un show ou pour nous dévêtir devant la foule endiablée. Ce n'est pas encore l'été. Quand nous serons en vacances professionnelles, pour reprendre l'expression d'X Anges, nous n'aurons pas le choix. Nous sommes envoyés sur place pour plaire au plus grand nombre.

Plus le temps passe, plus je vois la drogue envahir les lieux. Visiblement, ce club est une zone de non-droit. Je vois du cannabis fleurir dans toutes les mains, tandis que je n'ose pas imaginer ce qu'est la poudre blanche qui est utilisée par le groupe au bout de la salle. Ils me font signe de temps à autres mais je refuse de les rejoindre.

Plutôt mal à l'aise, je m'empresse d'aller dans le sens inverse et percute un homme qui a environ mon âge. Il me laisse passer mais son ami, lui, me rattrape. Je me suis pourtant excusé pour avoir bousculé l'individu.

« Jérémy ?! »

Que mon prénom soit ainsi utilisé n'est pas choquant en de tels lieux. Mais l'intonation ne semble pas celle d'un fan qui m'aurait reconnu.

« J'en reviens pas. Toi ici ! Je ne savais pas que tu étais gay ! »

A y regarder de plus près, je reconnais les traits de Romain. Nous sommes allés à l'école et au collège ensemble. Hélas, le lycée nous a séparés.

« Romain... Je pourrais te dire la même chose après tout. Il faut dire qu'au collège, tu ne le savais peut-être pas.

— Ah si ! Je savais d'ailleurs que j'aurais bien eu envie de sortir avec toi.

— Comme tous les gays fantasmant sur leur meilleur ami hétéro, c'est ça ? me moquai-je.

— Sauf que tu n'étais pas hétéro, mais je l'apprends un peu tard !

— Je t'offre un verre pour me faire pardonner ».

A l'époque, la relation que j'entretenais avec Romain n'aurait jamais permis plus qu'une amitié de circonstance. Nous nous entendions bien, mais je pense qu'il s'agissait surtout d'une affection réciproque nécessaire pour traverser les rudes méandres de l'adolescence. Il est plutôt charmant mais ce n'est clairement pas mon style d'hommes.

Son ami vient le voir pendant que je commande un verre pour lui. Je le vois donc, devant moi, fumer de l'herbe. L'odeur m'incommode mais je ne dis rien. Je n'ai pas envie d'être désagréable alors que nous ne nous sommes pas vus depuis des années. Je suis même surpris qu'il m'ait reconnu.

Il pointe soudainement l'affiche qui est au bar :

« Tu es acteur porno ?! »