Je pense souvent à la pureté de ces moments d'une vie, durant lesquels chaque instant se cristallise, précipite en un joyau dont les facettes sont si nombreuses qu'on ne peut jamais s'en défaire. Chaque parole, chaque acte crée une nouvelle facette à ce joyau qui, loin de prendre de l'importance, tend simplement à se diviser, chaque facette laissant sa place à la nouvelle qui les rejoint.
La vie est telle un filet de lumière qui vient éclairer seulement quelques facettes, et laisser les autres dans l'ombre, faisant de la relation qui lie deux êtres un échange si complexe qu'il échappe à ceux qui ne la connaissent pas, mais aussi, parfois, à ceux qui le font vivre, parce qu'ils découvrent l'immensité de la richesse de leurs différences et de leurs ressemblances.
Je pense souvent aussi à ces graves moments où ce joyau est jeté en l'air tel un souci dont on ne veut plus, tantôt tombant sur une face qui se brise, à jamais fêlée, qui raye d'un trait un pan d'une relation, tantôt tombant sur un de ses sommets, faisant éclater le joyau en mille morceaux, impossible à reconstituer et à reconstruire.
La différence entre le jet aléatoire d'une telle pièce et le précipice dans lequel les hommes jettent leurs relations demeure que, sur ce deuxième point, le hasard n'a pas sa place. Ce sont les protagonistes de leur vie qui, prenant conscience de ce qu'ils sont et de ce qu'ils font, choisissent si une face ou le joyau entier se brise ou ne se brise pas.
Il est de ces jours d'une vie, il est de ces femmes, il est de ces hommes qui, à jamais, marquent de leur empreinte le feu incandescent qui brûle au fond de moi. Ce feu est entouré de quelques joyaux qui ne cessent de se rapprocher au fil du temps et des découvertes que l'on fait sur moi. Sans jamais toucher ce feu à la fois réjouissant et funeste, à la fois obscur et étincelant.
Je n'ai jamais cru en la capacité d'un de ces joyaux à être un jour en osmose avec ce feu qui chancèle et se ravive chaque jour, chaque heure, chaque minute, soumis alternativement à un vent glacial et à une chaleur salvatrice. Pourtant, depuis quelques moments, quelques jours, aux côtés de ceux que j'ose représenter, avec une candeur inquiétante, tels les joyaux de ma vie, j'ose croire à un bouleversement. Comme si le fait de traverser le précipice qui se situait de l'autre côté du plateau tendait à le renverser.
L'on a promis, l'on a déçu. Des joyaux sont tombés sur leurs arêtes, et ont disparu, devenant une poudre qui reste enfermée au fond de moi, alimentant le feu que je crois être mon moteur. Des joyaux sont tombés sur des faces, nous faisant renoncer à des dimensions importantes de nos vies. Des joyaux ne sont jamais tombés, parce qu'ils ont su, au contact de la chaleur de ce feu, avec souplesse et superbe, s'adapter, malléables. Ils ne peuvent plus tomber, ils sont définitivement liés à ce feu profond, le protégeant du vent de la vie qui pourrait l'éteindre, et le ravivant dans les pires des moments.
J'ai ce soir l'ambition folle et incroyable de croire que la vie n'est pas faite de hasards, et que jamais, ô plus jamais, les joyaux de ma vie, ceux qui me procurent mes joies, mes bonheurs, ne puissent disparaître. Je crois en la multitude de nos vies et de nos sentiments.
Je crois en nous.
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Vie et mort d'un acteur (B&B)
General FictionJérémy a pris une lourde décision qui ne manque pas de faire réagir son entourage : il veut devenir acteur. Non seulement il sait qu'il trébuchera de nombreuses fois, mais il doit composer avec ses proches qui tentent au mieux de l'en dissuader au p...