1 an plus tard. 1 an et demi pour être précise.
Je ne vis plus avec Mélodie.
Le ciel est sombre pour un été, un orage brûlant approche, mon rythme cardiaque agit par mimétisme en se mêlant au rythme des basses de la salle. Je suis dehors, au fumoir, et complètement saoul. Je profitais pleinement de l'été en boîte avec LG2D. Laureline était restée avec Nath' depuis notre arrivée dans le son, Timer dansait aux côtés de deux trois pouffiasses de la techno et Kvmo était contre les caissons, couché dessus à vrai dire. Je n'aurais pas voulu être à la place de ses oreilles. Mais j'aurais aimé ne pas être à ma place non plus. Juste avant ma clope, une blonde me tenait les cheveux pendant que je gerbais une part de space cake, trois jägerbombs et une demi-pinte de Heineken. Il était deux heures du matin et j'attendais encore un peu avant de claquer la X-pill sous ma dent.
Au moment de retourner dans la salle, un mec me stop, un brun, avec des lunettes épaisses et une chemise. Je le dévisage involontairement du fait de mon ivresse. Il me demande si je suis seule, je rigole, je commence à raconter ma vie. Il me propose un verre, Laureline sort de nulle part, m'attrape par le bras et me tire avec elle. Elle me demandait si ça allait, et étrangement, j'éprouvais une forte envie de l'étrangler sans vraiment comprendre pourquoi. Comme si elle m'avait profondément blessée. Elle parlait, elle parlait, je n'en avais vraiment rien à faire, jusqu'à ce que je l'entende prononcer « Nath' ». En décidant de me concentrer un peu plus sur ce qu'elle disait, je compris qu'elle et Nathanaël allaient rejoindre une soirée et que j'allais devoir rester avec les deux autres. Comme un éclair de sang, mon cerveau ressentit une profonde vibration et je pris un Uber.
Cela faisait quatre mois que Mélodie m'avait quitté. Je vivais en collocation avec Nathanaël et Laureline. Nous avions un appartement neuf en face des quais et il était assez spacieux pour que nous y aillions toute la place vaquer à nos activités sans déranger les autres. Étant donné que nous étions trois artistes, c'était essentiel. Nous avions un chat aussi qui s'appelait Catherine, Cat' pour les amis. J'avais foiré mes derniers partiels et je n'étais pas allée aux rattrapages. J'avais préféré passer mes nuits chez un jeune garçon très agréable répondant au nom de Purple. Un tatoueur. Je vivais de l'argent que Métro avait généré suite à sa traduction anglaise. J'étais très à l'aise et j'avais fait un bon fulgurant dans le succès pour une première œuvre. Oliver était fier d'avoir réussi son pari et mon père recommençait à parler de moi aux repas de famille. Je n'étais plus cette petite adolescente en colère et tenue en laisse par sa relation amoureuse. C'est fou ce que pouvait provoquer le discours d'un être mystérieux.
Autre information intéressante, Belle, ma petite sœur était rentrée. La petite préférée de la famille. Vingt ans à peine, mais elle paraissait toujours seize ou dix-sept. Elle était partie en Australie pour son école de commerce et tournait un vlog à côté de ça. Elle avait eu l'admiration de mon père en devenant, et ce très jeune, une influenceuse très populaire sur Instagram et Twitter. C'était en partie grâce à elle que j'avais eu autant de succès avec Métro. Bien que tout nous opposait et qu'elle était, selon moi, la parfaite définition de « désagréable », nous étions en bons termes. Elle avait un charisme naturel qui était presque aussi puissant que celui de Nath', ce à quoi il avait alors commenté : « C'est normal, elle est une aberration, comme moi. ».
Le retour de ma sœur allait bientôt entrainer un bouleversement dans ma vie qui l'était déjà énormément et je le savais à l'avance. Cependant, l'idée qu'il puisse m'arriver quelque chose de grave était vite effacée par la vision de mon compte en banque qui avait énormément grossi. C'était dans ces moments d'ivresse profonde que je comprenais la chance que j'avais eue de n'avoir jamais été en manque d'argent.
J'étais arrivée à l'appartement, la serrure m'avait donné un peu de fil à retordre, mais le fait de devoir rentrer quotidiennement saoul m'avait appris à garder mon sang-froid pour réussir rapidement. Sac jeté dans la chambre, lumière du frigo, trois gorgées, bonne nuit le chat, oreiller. La chambre tourne, et les murs battent comme au rythme de la musique des enceintes que j'ai allumées par accident trois minutes plus tôt. Ma vie devient sombre, ma haine du monde grimpe dans ma gorge. Nath', Laureline, j'ai dit adieu à Mélodie. Je refais les mêmes erreurs que dans Métro. Je me dis que j'aurais dû suivre Lisa-Maria. Mes pensées tournent autant que la chambre, je doute, je pleure. Je m'endors dans la musique et les larmes.
Après cette nuit-là, j'entrepris d'écrire un nouveau récit. Je décidais de l'appeler Ondes Négatives. Un récit qui traiterait de ma vision de cette vie-là. Qu'est-ce que j'étais ? Une bourgeoise dépressive, alcoolique, qui avait perdu la seule personne qu'elle aimait pour un mensonge égoïste parce que j'avais peur de la blesser. « Putain de vie », grimaçais-je en écrivant mes idées pour le roman. Je n'avais pas de temps à perdre, je sentais que le travail sur un nouveau roman allait me tirer vers le haut. Malgré la gueule de bois, je planifiais mon travail, envoyait un mail à Oliver, chose que je ne fais jamais d'habitude. Je préparais mon espace de travail avant d'aller me recoucher. Au moment même où je voulais finir ma nuit, j'entendis quelqu'un rentrer. Quelqu'un seul. Mon angoisse montait, Laureline et Nathanaël étaient censés être ensemble. Aurais-je pu oublier les clés sur la porte ? Je jetais un coup d'œil sur ma table de nuit. Mes clés n'étaient pas là. Les yeux grands ouverts, j'essayais de contrôler ma respiration. Je ne savais pas ce qu'il pouvait bien m'arriver à ce moment-là, mais j'étais tétanisée. Aucun bruit après la fermeture de la porte. Pas de bruits de pas. Ce qui était étrange puisque le parquet grinçait assez pour qu'on l'entende depuis ma chambre. La personne n'avait toujours pas bougé après une longue minute. Sans faire un bruit, j'attendais, je voulais savoir ce qu'il se passait. J'espérais entendre la porte s'ouvrir à nouveau et entendre la voix de Nath'. Les battements de mon cœur me faisaient mal.
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Odeur de clope
General FictionJe n'ai jamais cessé d'être celle que vous attendiez que je sois. C'était ma seule condition pour accepter de me croire exister. Voilà comment se dépeint Mikaël, jeune fille d'un milieu aisé qui rêve d'art et de passion mais délaisse rapidement le c...