Cher futur époux 2
Je vous partage un extrait de mon livre, qui a comme titre : Survivre.
« J'avais dix ans et je n'avais jamais mis les pieds à l'école. Je n'avais jamais connu ma mère qui est morte en me donnant naissance. Ma mère, selon les anecdotes de ma grand-mère et les rumeurs du village ; était la femme la plus belle de toute la localité. Une localité reconnue par la beauté de ses filles, mon Lélouma natal. Un village qui se situe au cœur de la moyenne Guinée, au Fouta djalon.
Et qui dit Fouta, dit peulh. Une ethnie qui regorge de beautés ; des jeunes filles qui ont la plupart du temps un teint clair avec une taille moyenne et svelte. Elles sont radieuses avec une petite bouche, des lèvres bien pulpeuses, une gencive naturellement rose et noircie à l'aide d'une pratique très courante et propre aux peulhs, toute origine confondue. Des dents blanches qui font la beauté de leurs sourires. La femme peulh a généralement un nez fin et des yeux de gazelle qui embellissent son visage ; avec une grâce et une élégance innée.
Selon tout le village, mon père aimait ma mère d'un amour incommensurable et sans faille. Il l'aimait au point qu'il a essayé de se suicider à sa mort, il ne savait pas comment vivre sans elle et si je n'étais pas venu au monde, il n'aurait surement pas pu s'en sortir. J'ai été pour lui un pensement, un bouclier et surtout une raison de vivre. Sur moi, il a fait un transfère. Il ne vivait que pour me témoigner tout l'amour qu'il avait pour ma mère et qu'il n'a pas pu lui témoigner très longtemps ; il m'aimait d'un amour si puissant et sincère qu'il pourrait résister à tout.
Mes frères et surtout ma marâtre avaient du mal à digérer cet amour et cette complicité qui nous liait. Ils ne me supportaient pas et ne me le cachaient pas. Moi j'étais jeune, je ne comprenais rien. Surtout quand ma grand-mère maternelle me mettait en garde contre eux, elle ne voulait même pas que je joue avec eux alors que pour moi c'était la chose la plus importante ; jouer avec mes frères, être accepté dans leur petit groupe.
Néné Kaou (Grande mère maternelle) m'avait un peu raconté l'histoire de mes parents. Comment ils se sont battus contre vents et marées pour vivre leur amour. Maman aurait dû être la première femme de mon père, si les parents de ce dernier n'avaient pas tout fait pour que cette union n'ait jamais lieux, en tout cas pas de leur vivant pour la simple et bonne raison que ma mère est une étrangère, un enfant illégitime.
Ma grand-mère, avait à une époque, travaillé pour une famille de Shérifs qui au tout début s'étaient installés dans notre village dans le cadre d'une mission religieuse. Et ils avaient un jeune garçon qui faisait tourner la tête de toutes les jeunes filles du village tant il était magnifique. Ma grand-mère qui passait le plus claire de son temps dans cette famille avait fini par avoir une relation cachée avec lui, une relation qui fut révélée au grand jour par une grossesse.
Une grossesse qui a même fait couler du sang ! Aucune des deux familles ne voulait de cet enfant 'illégitime', c'était tout simplement scandaleux comme histoire et tous les moyens étaient bons pour étouffer cette histoire. Ni l'amour qui liait les deux jeunes amants et ni la vie de cet enfant innocent ne comptaient, en tout cas pas autant que la différence qui existait entre les familles, dont l'une se croyait plus noble que l'autre, et surtout pas autant que les préjugés.
Il n'y avait même pas à discuter, personne ne voulait de l'enfant, de ma mère.
Elle fut rejetée avant même sa venue au monde et cela a continué jusqu'à sa mort. Grand-mère qui ne voulait pas se débarrasser de son enfant fut abandonnée par sa famille ainsi que celle de son amant. Cette dernière préféra quitter le village pour de bon laissant derrière une des leurs.