Cher futur époux 25
Cela faisait une bonne dizaine de minutes que Malik observait Karim, à travers les stores de son bureau, tourner en rond dans le jardin de la clinique Rahma. C'est vrai qu'ils ne se connaissaient pas à plus forte raison être proche, mais il compatissait vraiment à sa situation. Après ce que sa mère lui a expliqué et après avoir assisté, sans le vouloir, à l'affrontement entre Karim et ses parents, il ne pouvait qu'avoir de la peine pour lui parce que même si Khadija et sa vraie mère sont aussi des victimes, Karim était la plus grande victime.
Il s'est vu privé de tout, même de son enfant et de l'amour de sa vie et il a toujours vécu dans le mensonge tout en essayant d'être le meilleur père pour sa fille. Et pourtant, aujourd'hui il passe forcément pour le coupable aux yeux de la mère de sa fille et même de cette dernière quand elle saura la vérité.
La famille ! Malik s'entendit dire avant de sortir pour aller le retrouver.
· Viens avec moi. Avait dit Malik à Karim, une fois à son niveau.
Ce dernier, d'abord surpris se mis à le regarder bizarrement mais pendant ce temps, Malik avait déjà rebroussé chemin. Karim croyant que c'était en rapport avec sa fille le suivit sans poser de question. Mais en voyant Malik sortir de la clinique pour se diriger vers le parking, il commença à se poser des questions mais continua à le suivre tout de même.
Zayn déverrouilla sa voiture et invita Karim a monté.
· Je dois te montrer quelque chose et j'ai moins d'une heure pour rentrer et faire le prélèvement de la moelle pour Chérif. Expliqua-t-il en voyant la tête perdue de Karim.
· D'accord. Dit Karim pour toute réponse.
Le trajet se passa dans un silence complet, seul le coran qui émanait de la radio resonnait dans la voiture. Après plus de 20 minutes de route, Malik se gara sous un pont et coupa le moteur sans mot dire. Karim tourna la tête vers lui et vu une lueur de tristesse se dessiner sur son visage et décida de ne pas le bousculer même s'il mourrait de curiosité.
· Ça va ? Finit-il par demander après cinq minutes de silence.
· Excuse-moi, les souvenirs ont été plus forts. Je vais bien Alhamdoulillah.
· Ne t'inquiète pas je te comprends
· Tu me croiras si je te dis que j'ai vécu sous ce pont pendant six longues mois ? Demanda Malik laissant Karim bouche bée.
· Pardon ? S'étonna ce dernier.
· J'ai vécu sous ce pont pendant six mois Karim et c'est ici que mon père, Mansour Ly m'a vu et a décidé de m'adopter. Je venais d'arriver à Dakar après avoir été abandonné par mes frères à la frontière entre la Guinée et le Sénégal et après avoir été recueilli par le chef d'un village qui s'est vu obligé de me mettre en prison après que sa femme et sa fille m'aient accusé de tentative de viol. En prison j'avais rencontré un garçon assez particulier, Moustapha. Il était très turbulent mais avait un grand cœur, par la grâce d'Allah, il a été une des raisons qui m'ont permises de survivre en prison et à notre sorti il m'a amené avec lui à Dakar. On n'avait personne ici et il fallait survivre. Lui a rejoint un autre groupe de jeunes dans un garage non loin d'ici et moi j'ai rejoint les talibés qui squattaient ici mais il n'a jamais cessé de veiller sur mois. Un mois avant que ma famille actuelle ne m'amène vivre avec eux, il a décidé de tenter sa chance ailleurs et avec d'autres jeunes ils ont pris les pirogues pour rallier l'Europe. A cet âge je n'avais aucun moyen de vérifier s'il était parvenu ou pas, mais des années plus tard avec l'aide de mon père j'ai appris que leur pirogue s'était renversée ne laissant aucun survivant. Là je ne te parle pas de ce que moi j'ai vécu Karim, de ce m'a propre famille m'a fait parce que moi je m'en suis sortie Alhamdoulillah. Je te parle de ce jeune de moins de 18 ans avec des rêves pleins la tête qui est partit à fleur de l'âge. La vie n'est jamais simple Karim, que tu sois riche ou pauvre, beau ou moche, issue d'une grande famille ou pas. Seul Dieu peut nous aider à nous en sortir et personne ne peut échapper à son destin. Aujourd'hui tu te demandes pourquoi toi ? Mais sais-tu le nombre de gens qui se posent cette question par seconde ? Dans cette vie chacun avec son problème et je ne dis pas que le tien ne mérite pas que tu t'en afflige, au contraire. Je te demande juste de te ressaisir et de prendre les choses en main parce que rien n'est encore trop tard et tu le sais. C'est sûr que ça va beaucoup saigner avec que cela ne se tasse mais tout a une fin et crois moi si je te le dis.