Bonus I - Adamante

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   Adamante prit une grande inspiration. Elle allait crier. Elle allait hurler. Elle allait appeler à l'aide, personne n'allait lui répondre, elle allait mourir, elle allait être détruite en morceaux...

   D'un mouvement nerveux, elle regarda à nouveau la masse de roches en suspension au-dessus de sa tête. Des tonnes et des tonnes de pierres, des rochers qui s'accumulaient sans cesse. Des serres de pierre tentaient de saisir ses cornes et de lui tordre le cou.

   Mais elle ne se laisserait pas faire !

   Adamante siffla de rage en voyant les rochers immenses grincer et s'étendre encore et encore au-dessus d'elle. Les serres s'étendirent de plus en plus, jusqu'à devenir des museaux grimaçants.

   Cette fois, elle cria.

- Madame !

   Des pattes (bien vivantes, cette fois) secouaient son corps. Adamante avait l'impression d'être aussi de pierre, et elle mit un moment avant de recouvrer ses sens. Elle ouvrit les yeux et tomba nez à nez avec une de ses servantes.

- Vous allez bien ? Je vous ait entendu crier !

   Adamante grogna et la repoussa.

- De grâce, partez ! N'ai-je jamais demandé à ce qu'on me laisse dormir en paix ?!

   La petite Aile de Pierre baissa la tête sous le regard impérieux d'Adamante. Bien sûr, elle était de mauvaise foi. C'était elle qui l'avait tiré de son cauchemar. Mais il fallait lui montrer l'exemple, pour une prochaine fois !

   Sur un autre signe d'Adamante, la servante couleur cuivre sortit à reculons, ouvrit la porte et disparut de la vue de la dragonne argentée.

   Elle se releva, s'appuyant sur ses ailes et heurta le plafond bas de ses immenses cornes. Grognant, elle sortit de son lit et jeta un regard au vitrail bleuté. Derrière, on pouvait distinguer une des grandes tours d'or du palais mais ce n'était pas ce que cherchait Adamante.

   La dragonne sortit à son tour de la chambre, pestant contre les murs et plafonds décidément trop petits pour sa grande taille. Elle vivait ici depuis sa naissance et n'avait jamais changé de chambre. Quand sa mère, la reine Gemme, déciderait-elle enfin de la déplacer dans les appartements royaux ?

   Mais non, elle ne le fera jamais, pensa amèrement Adamante tout en descendant de larges marches en colimaçon. Elle préfère s'occuper de Béryl.

   Béryl était le grand frère d'Adamante. Il avait près de six ans d'écart avec elle et était déjà un grand Aile de Pierre responsable et sérieux, conseiller de sa mère, s'occupant des affaires du palais, toujours poli et brillant, mais surtout, surtout, Gemme l'adulait.

   Et avait tendance à oublier l'existence de sa fille – son unique fille. L'héritière ! Béryl n'aurait JAMAIS le trône. Pourtant la reine l'adorait, le cajolait, le couvrait de caresses et cadeaux, se confiait à lui à chaque fois que quelque chose n'allait pas, et encore plus depuis la mort de son mari.

   Adamante siffla de colère, des serviteurs effrayés s'effacèrent pour lui laisser de la place.

- Dégagez, aboya-t-elle.

   Ils repartirent, craintifs, dans l'autre sens et firent bien attention à ne pas croiser le regard, ou pire, toucher la princesse.

   Elle sentait sa mauvaise humeur revenir au galop. Mais bon, ces derniers temps, c'était devenu une habitude que de voir Adamante rôder dans les couloirs en jetant des regards mauvais à la ronde. Depuis quatre mois, en vérité.

La guerre des Ailes de Pierre : les Royaumes de FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant