Chapitre 43

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Soucieuse, je balaye les environs du regard pour m'assurer que la ruelle est déserte, et colle le diner entre les bras d'Adam pour débarrasser les miens. Je lève ensuite les yeux, puis m'étire jusqu'à la pointe de mes pieds pour essayer d'atteindre l'échelle de secours qui se trouve juste au-dessus de nos têtes, en vain. Déterminée, je saute sur place le plus haut possible, à plusieurs reprises, mais n'arrive qu'à l'effleurer.

— ­Ne me dis pas que tu veux nous faire monter sur ces marches rouillées ?

J'inspecte l'escalier en colimaçon boulonné à la façade de l'immeuble industriel. Ce dernier est fermé pour cause de rénovation d'après l'écriteau sur la devanture.

— ­Si, absolument ! Aurais-tu peur de salir tes chaussures toutes neuves?

Je cligne de l'œil et esquisse un sourire enjôleur. Il lève un sourcil, s'avance avec cran avant de s'arrêter à un mètre de moi. Il tend le bras au-dessus de nos têtes, agrippe l'échelle sans aucune difficulté, et tire dessus pour la faire descendre entre nous.

— Tu sais au moins que c'est un délit ? me demande-t-il théâtralement au travers des barreaux.

Je lève les yeux au ciel avant de lui répondre :

— Nous ne sommes pas des criminels... Juste deux personnes un peu trop curieuses. Je croyais que tu aimais prendre des risques ?

— Des risques maitrisés et à fort enjeu.

— Un risque n'en est pas un s'il est contrôlé, il doit être impulsif pour être considéré comme tel.

— Tu veux dire comme sauter dans le vide sans parachute, et se rendre compte que c'était stupide deux secondes avant de s'écraser au sol...

— Je n'ai pas dit faire quelque chose de suicidaire, mais d'imprévu. Comme tomber amoureux, par exemple.

J'ai parlé trop vite, je ne veux pas qu'il croit que je suis intéressée par sa réponse, même si c'est le cas.

— « Tomber amoureux », rien que le terme ne donne pas envie (il rit jaune). Cela a le même impact, si ce n'est pire. C'est tomber éternellement de haut, étouffé sous le poids de l'autre en sachant que l'on va irrémédiablement s'écraser à la fin, et cela au ralenti. C'est devenir dépendant au risque de tout perdre. En définitive, c'est une mort lente et douloureuse. Ce n'est pas fait pour un perfectionniste comme moi ni pour une maniaque du contrôle comme toi. Mais tu devrais le savoir étant donné que tu es toujours vierge, me juge-t-il avec cynisme.

Sa vision de l'amour est si noire qu'elle me donne des frissons... Mais il a raison sur un point, j'aime l'ordre et garder le contrôle, enfin c'est ce que je croyais jusqu'à ce que je sorte de ma zone de confort et vive toutes ces choses. Jusqu'à réaliser que l'on ne peut tracer sa vie à l'avance et suivre ce même chemin sans contourner certains obstacles imprévisibles. Qu'il est permis de changer de route, prendre un raccourci, ou s'égarer quitte à se retrouver face à une impasse et faire demi-tour. L'essentiel étant de ne pas se perdre trop longtemps.

— À moins que je ne me trompe sur ton compte, et qu'au final tu aimes ça, prendre des risques, rajoute-t-il sûr de lui.

Il appuie son front contre la ligne de métal et me dévisage d'une lueur presque bestiale. Il me trouble, brouille mon esprit, et je n'arrive pas à trancher si c'est le gout de l'aventure qui m'attire ou bien lui, et seulement lui. Je m'avance et place mes mains sur les barres rugueuses et froides de chaque côté de son visage imitant sa posture.

— Peut-être même plus que toi ? le défié-je.

Je veux savoir à quel point il peut être entêté, qu'il m'avoue ce qu'il ressent, si je suis toujours aussi insignifiante qu'il le prétend ou si les sentiments que j'ai à son égard sont réciproques. Il déglutit et entrouvre la bouche pour me répondre, lorsque nous sommes soudain gênés par un bruit de pas. Je me retourne vivement, et aperçois au loin des gens tourner dans notre direction.

Priceless'GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant