Chapitre 46

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Le stress monte, je reste figée par les flashs agressifs et intrusifs des paparazzis qui traversent les verres opaques de mes lunettes. Comment peut-on supporter cela au quotidien ? Exposer sa vie au monde, laisser les gens voler notre image, juger nos actes et en tirer profit...

La main d'Adam me fait sursauter et m'envoie une décharge en plein cœur lorsqu'il entrelace et serre ses doigts dans les miens. J'ose détourner mon attention sur lui et le vois baisser ses lunettes pour me lancer un regard réconfortant qui m'apaise instantanément.

— Ne t'en fais pas, ça va bien se passer. Ils sont incapables de découvrir la vérité, notre vérité.

Je ris à moitié, tiraillée entre la peur d'être dévoilée aux yeux du peu de gens que je connais, et l'ironie de voir son je-m'en-foutisme sidérant sur la situation. Ce mec a une assurance hors du commun.

Je lui souris niaisement, serre sa main à mon tour et le laisse m'escorter fièrement jusqu'à la voiture qui nous attend au pied des marches. Comme si tout ceci était normal, ou pire, comme si cela n'était qu'un divertissement. À notre passage, des questions intrusives et presque agressives déferlent sur nous, du style : « quel crime avez-vous commis ? » « Qui est la personne qui vous accompagne ? » ou encore « où partez-vous ? ».

Je suis soulagé quand Gabriel s'empresse d'ouvrir la porte devant moi, et je me précipite pour plonger sur le siège arrière la première, attendant avec impatience qu'Adam fasse de même. Mais à ma grande surprise, il lève un sourcil taquin dans ma direction et se retourne vers les journalistes.

— Nous avons commis le pire des crimes. Celui de jouir de la prestigieuse ville de New York sans en payer le prix fort. Et maintenant que nous sommes passés à la caisse, je m'apprête à épouser au plus vite cette merveilleuse femme, annonce-t-il avec éloquence avant de me rejoindre.

Gabriel démarre en trombe, visiblement habitué à ce genre de situation et déterminé à semer ceux qui voudraient tenter de nous suivre. Je fixe Adam les yeux écarquillés avant de sortir :

— Tu es fou allié !

Je ris avec frénésie avant de continuer:

— Comment as-tu osé ? tu imagines ce qu'ils diront sur toi dans les journaux demain?

— Tu m'as mis au défi de tout raconter sur nos fiançailles, et je l'ai fait, répond-il l'air de rien.

Je vérifie d'un coup d'œil que la vitre qui nous sépare de Gabriel soit bien fermée.

— Mon offre a expiré, tu arrives un jour trop tard, dis-je avec espièglerie en m'affalant sur le siège.

— Pourtant, il m'a semblé avoir une chance tout à l'heure.

Ses yeux dénudent mon corps avec envie pendant deux brèves secondes. Son culot démesuré et l'adrénaline toujours présente dans mes veines me poussent à répondre à son audace. Je fais pivoter mon buste dans sa direction, m'accoude au dossier en cuir mettant en avant ma poitrine où il plonge instantanément son regard. Je dépose ma main au niveau de son sternum, par-dessus son teeshirt. Il déglutit à mon contact et revient sur mes iris sans ciller, cherchant des réponses que je ne connais pas moi-même. Luttant pour rester impassible. Je descends lentement mes doigts jusqu'à la ceinture de son jean et aperçois sa poitrine se gonfler avec force lorsque je fais glisser mes ongles entre la couture et sa peau.

Le voir défaillir sous mes caresses me donne envie de continuer, lui que je croyais être insensible, relâche sa garde. Je me sens influente et considérée par l'homme qui n'en voulait qu'à ma virginité. Mais je me souviens aussi d'une phrase qu'il m'a dite, d'un interdit qu'il m'a ordonné. Un « ne t'avise plus jamais de me frustrer » qui résonne comme un appel à une revanche bien méritée. Ma main dévie sur la gauche en direction de sa poche avant, et s'y engouffre pour en extirper ma petite culotte. Il serre les dents au moment même où il s'aperçoit de ma supercherie et cogne son crâne contre l'appuie-tête, vaincu à son propre jeu.

— Il faut savoir saisir sa chance lorsqu'elle s'offre à vous pour ne pas risquer de la perdre.

Je chuchote ces mots avisés près de son oreille, me renfonce dans mon siège, et enfile, avec autant de grâce qu'il met possible, le tissu dentelé. Sa respiration s'accélère et je ne saurais distinguer si la lueur qui l'anime est de la colère ou de l'excitation.

— Je ne crois pas en la chance, seulement en moi.

Son regard puissant et pénétrant en dit long sur ses intentions lorsqu'une sonnerie forte et aigüe jaillit de mon téléphone alors qu'il est censé être sur silencieux. Je stoppe l'appel d'urgence déclenché sans aucun doute par Alix et m'aperçois que mon écran est rempli de notifications, d'appels de cette dernière ainsi que de ma mère et de mon père. Des messages inquiets pour savoir si je vais bien et où je suis passée.

Je me rends compte que je n'ai pas touché mon si précieux téléphone depuis... je ne sais plus combien de temps, et en ai même oublié jusqu'à l'existence de mes parents. C'est la première fois que je rends ma famille nerveuse pour quoi que ce soit. Je suis consciente que je ne suis plus celle que j'étais, mais au fond, peut-être le suis-je après tout, peut-être que je n'étais que l'ombre de moi-même attendant de révéler ma vraie nature ? Ne sommes-nous pas censés être nous-mêmes lorsque nous nous sentons heureux et bien dans notre peau jusqu'à en oublier l'essentiel? Ou peut-être ai-je dépassé les limites... Je balaie cette idée immédiatement, je ne veux plus réfléchir, je veux agir, je veux prendre des risques et les assumer, simplement grandir.

Au lieu de les rappeler et m'excuser, j'envoie seulement un message à mes parents leur disant que tout va pour le mieux, que je profite de mon voyage et que je rentre bientôt. Je n'oublie pas de leur dire que je les aime et éteins mon téléphone pour de bon sans attendre leurs réactions comme une ado rebelle.

Je relève le nez vers Adam, toujours troublée par son influence, mais le moment est passé, la connexion a été coupée.

Nous laissons le silence de nos réflexions nous bercer et roulons ainsi jusqu'au tarmac d'un aérodrome. Je fixe Adam avec perplexité par-dessus le capot de la Berline, mais il demeure secret.

Que va-t-il encore m'arriver ?

À l'aube de notre cinquième jour, je me retrouve à nouveau dans un avion sans même connaitre notre destination. Un jet très privé ne transportant que nous et mon garde du corps préféré qui, même assis, reste droit comme un piquet. Affamée, je dévore avec engouement les plats raffinés que l'on me sert sur un plateau d'argent sous l'œil arbitral de mon rival et amant. Mais qu'importe, j'ai trop faim et c'est tellement bon...

J'en profite pour dormir le restant du trajet qui durera de longues heures, quand je suis réveillée par une douce pression sur mon avant-bras. J'entends le bruit des moteurs en marche et ressens les vibrations qui m'indiquent que nous sommes toujours en plein vol. J'ouvre paisiblement mes yeux embrumés sur un visage qui m'est devenu familier et ne tarit pas de beauté. Il m'observe d'un air grave, avant de me confesser d'une voix basse et inquiète:

— Nous allons nous cracher...

— Hein ? Quoi !!

Je reprends mes esprits dans un sursaut, fais un bond sur mon siège et précipite mon regard sur le hublot quand la vue m'émerveille aussitôt.

Il m'a eu...

— J'ai failli avoir une crise cardiaque !

— C'était l'effet escompter.

Je me dresse sur les genoux, me jette sur lui, l'assène de petits coups maladroits sur son épaule de mes poings frêles. Visiblement chatouilleux, il attrape mes poignets au vol, les emprisonne d'une seule main et tire dessus pour me faire basculer comme un rien en amazone sur ses cuisses.

— Comment trouves-tu la vue ? me demande-t-il de son charme ensorcelant.

Mes yeux plongent dans les siens à quelques centimètres de son visage et lui avoue sans arriver à lui cacher mes émotions:

— Aussi incroyable que magnifique.

— Et pourtant bien réel... rétorque-t-il avec perspicacité en me serrant légèrement plus dans ses bras.

Assez pour me faire chavirer.

Priceless'GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant