Le vent se lève

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Where the Good Way Lies - Spring is Coming







Le printemps arrivait,

Sa petite bouille me souriait,

Elle avait envie de voyage, il semblerait

Et moi, j'aurais bien voulu la suivre

Mais mon âme a dit sauve-qui-peut,

Et puis ça a suffit,

À tout le monde, sauf à moi

Et j'ai eu beau crier,

La supplier de rester,

Elle riait fort, tellement plus fort

Alors,

Mon cœur l'a suivie, et mes larmes aussi

Ils sont partis tous ensemble en goguette

Petite troupe frêle et béante,

A mis les voiles un matin où la brise gelait tout sur son passage

Je leur ai dit qu'il était trop tôt,

Qu'ils finiraient bien par mourir de froid,

Mais ils ne m'ont pas écoutée

Et je les ai regardé, incrédule, gesticuler tant bien que mal,

Posant un pied tremblant devant l'autre,

Et puis un autre, tout doucement,

Et encore un autre

Ne leur avais-je pas appris à marcher un jour ?

C'est étrange,

Je n'arrive pas à savoir s'ils m'amusaient,

Ou bien s'ils faisaient peine à voir,

À se trémousser de la sorte, à deux pas du vaste monde.

Mais j'avais abandonné l'idée de les faire renoncer

Ma voix était devenue trop faible,

Et ces idiots faisaient la sourde-oreille

Alors je les ai regardé s'éclipser, stupéfaite,

Frétillants d'un truc bête,

Mais vivant

Ils se faufilaient inconfortablement dans l'embrasure de la fenêtre,

Et je pouffais de rire à travers mes dernières larmes

C'est qu'ils avaient pas l'air fins,

Mais ils étaient bel et bien partis, ces abrutis.



Le printemps pointe le bout de son nez,

Et ce devrait être un crime,

D'être aussi doux et cruel à la fois.

Loin de moi, le temps a passé,

Et au fil des jours,

Le soleil doit se glisser douloureusement dans les cratères de petit cœur

Les cicatrices ont fleuri le long des bras de petite sœur,

Et moi je flâne, l'air indéchiffrable, face au vent

Maudissant le monde, en d'absurdes louanges.

Les larmes ont dévalé les visages familiers,

Elles-même semblaient désarmées

Et moi, je n'ai pu que m'écrouler à leurs pieds,

Les yeux bouffis, la bouche desséchée

Mais que faisais-je encore ici,

À l'heure où le peu que je suis avait plié bagage,

Pour se carapater à l'autre bout du monde ?



Le printemps est là,

Et il semblerait que j'ai la capacité de fondre au soleil,

Comme une glace en plein mois d'août

Quand je m'éternise sous le bleu du ciel.

J'ai la sensation,

Que ma journée ne se résume qu'à ça

Me vautrer sous cet immense truc qui m'avale tout rond,

Et écrire un peu,

Pas grand chose qui vaille

Mais c'est qu'il est beau, ce bleu...

J'aimerais m'y noyer en compagnie de tous ceux qui y puisent la même poésie

J'aimerais qu'on l'observe ensemble, ce bleu indescriptible

Côte à côte, le cœur vagabond

L'esprit en cavale

Nous aussi, on prendrait la poudre d'escampette,

Et on leur clouerait le bec, à ces petits insolents

On irait chanter quelques vers décousus, cheveux au vent,

Et ça nous suffirait,

De répondre au ciel,

En effluves poétiques

Ce serait suffisant,

De penser la vie autrement.

Et puis, les autres rappliqueraient peut-être,

Tout penauds, un peu fatigués d'avoir tant voyagé

De cette éternelle démarche titubante.

Alors, je lâcherais,

D'un air faussement exaspéré,

"Ils n'apprendront décidément jamais à marcher correctement, ceux-là"

Et on rirait,

On rirait tellement qu'ils en seraient vexés

On rirait tellement,

Que ça nous propulserait un peu là-haut,

Là où ça vit sans complications

Et on peut admirer le monde se colorer d'une traite,

Le soir venu,

À l'éphigie du ciel.



Le vent se lève,

Et un de ces soirs,

Je me suis surprise à poser ma main sur mon ventre

En imaginant qu'un petit être puisse s'y trouver,

Un petit cœur y pulser,

Cratères comblés de tendresse.

Je me suis surprise,

À palpiter un peu

Quand tout n'en semblait plus capable.



Le vent se lève,

Nous tenterons de vivre.










L'ivresse des LuciolesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant