Shimmer

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Love Is Here - Tracey Chattaway







Parfois,

Haïr se résume à t'accepter,

Temps,

À te laisser surplomber tous les nuages, envoyer valser ton étreinte flambante,

D'un truc qui crépite, consume, vit pour ne pas vivre,

Pour mourir de ses propres mains,

C'est peut-être ça, ta destinée,

Temps,

C'est peut-être pour ça, que je t'aime autant que je te méprise,

Que je t'admire autant que tu me tourmentes,

Car ce que tu représentes, temps, je finirais bien par mourir à trop vouloir l'ignorer,

À me perdre dans l'infime de ton immensité,

À trop réduire le rien au tout,

Arrêter la course, avaler la lune, illuminer la nuit

Tu es,

Ce que je ne saurai jamais saisir dans son entièreté,

Tu es, le mystère vacillant, le scintillement éphémère du monde à travers les larmes,

La joie la plus dévorante, l'amour dévastant,

Les yeux qui n'en peuvent plus de resplendir, le cœur qui ne contrôle plus ses battements

Les au-revoirs déchirants,

La douleur fiévreuse

Je me suis perdue,

Temps

Depuis ce jour,

J'ai voulu te haïr, pour te blesser, te faire regretter tous tes écarts, tes excès

Je me suis retrouvée si seule, si paumée,

Je n'avais plus que ton désastre luminescent, la foudre m'émerveillait, comme jamais auparavant,

Ma folie te rendais éclectique, et il semblait, que nous ne vivions que pour l'autre

Alors, je t'ai aimé, jusqu'au vertige,

Je t'ai aimé, comme on aime rarement,

De cette ardeur vacillante, qui ne représente ni chaleur ni tendresse,

Rien qu'une rage inespérée, un truc qui ressemble à la pluie torrentielle,

Qui s'en veut presque de tomber si violemment, de vriller l'espoir, la vie, les larmes qui n'osent même plus couler

Et ça s'immisce dans les yeux vagues, dans le cœur qui pensait ne plus battre, qui aurait bien aimé battre autrement,

Je ne voulais plus que toi, temps, je ne voulais plus rien, je voulais tellement tout,

À mourir de tant vouloir, à vivre enfin de pouvoir,

Mais de toute ma vie, je n'avais jamais autant espéré

Temps,

Je ne suis même plus vraiment sûre,

Que tu signifies vivre,

Au fond

Je crois que tu n'en as pas grand chose à faire, finalement,

Et c'est bien ce qu'il y a de plus vivant, de profondément essentiel à ce que tu es,

Si tu savais, temps,

Toutes les questions que l'on se pose à ton égard,

Toute cette admiration,

Cette incompréhension,

Cette haine,

Ça dépasse l'entendement

Et je crois que tu cesserais brusquement d'être, temps, si tu savais

Que nous sommes tout aussi ivres que toi,

Que tu es ce qui donne la force de vivre, la rage d'espérer, la foi en l'avenir,

L'imminence somptueuse des rêves,

Tu cèdes un peu de tout aux larmes, pour révéler leur nuance,

Un peu d'éphémère à l'instant pour mieux resplendir,

Parce que je sais, temps,

Que l'éternité t'es bien étrangère,

Hors de contrôle,

Mais qu'elle doit exister, dans les songes, au creux des rêves,

Rien que pour donner un sens au tout

Oh temps,

Tu devais l'aimer, ce monde,

Pour lui offrir une telle splendeur,

La simple démence de ressentir,

Une unique raison à la poésie de vibrer, au-delà de tout

Cela me déchire, temps, de connaître ton secret,

D'avoir simplement conscience de ton existence,

Bien au-delà du tic-tac de l'horloge, des aiguilles virtuoses, suspendues au regard des passants,

Des secondes inanimées, qui ondoient dans l'effervescence,

Je suis consciente, temps, que tu représentes,

La parfaite symbiose entre le rien et le tout,

Que tu n'es autre que l'insouciance folle dont tu fais preuve à chaque instant,

Et l'inconscience éperdue de ceux qui te regardent,

Temps,

Tu ne vis qu'au travers de l'inconscience, de l'illusion,

De ceux qui préfèrent ne pas croire,

Ou bien rêver jusqu'à la fin des temps

Mais c'est bien là, tout l'extraordinaire que tu recèles,

Temps,

Tu vis au-delà de tout

On peut bien croire ou non, vivre ou non, se déchirer pour mieux te détruire,

Tu es là, temps,

Tu seras toujours là, et même si tu finissais par vouloir disparaître,

Tu ne feras que vriller de plus belle

Et c'est incroyablement périlleux,

Terriblement affolant,

Tu es le miroitement du monde,

À chaque instant, quand ça nous effleure,

De quelque chose qu'on ne comprendra jamais vraiment

Tu es ce qui rend les lucioles si ivres,

Temps,

Et je ne peux

Que m'écrouler,

En en prenant brutalement conscience.


















L'ivresse des LuciolesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant