Chapitre 16 : Madame ✓

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Le lendemain matin, je me réveille seule avec une envie plus que présente d'uriner. Où est le pot de chambre ?

Je me lève du lit, tout courbaturée, et pars en quête de ma chemise de nuit, toujours gisante sur le sol. En l'enfilant, un doute insidieux s'empare de moi. Est-ce que je peux descendre vêtue de la sorte ou est-ce que cela serait trop inconvenant ?

Optant pour la sécurité, je décide de m'habiller décemment et enfile une robe bleu nuit.

En sortant de la chambre, je m'arrête devant la porte en tournant la tête de chaque côté du couloir. Cette maison est tellement gigantesque que je ne me rappelle même plus le chemin que j'avais emprunté avec la domestique la veille au soir.

En déambulant dans les couloirs, je tombe sur un domestique, avoisinant la septantaine d'années, bien portant, les cheveux gris et élégamment vêtu. Il me salue poliment d'une petite révérence.

— Bien le bonjour, Madame. Je m'appelle Marco, je suis ici pour vous servir. 

Peu habituée par tant de formalités, je balbutie des remerciements maladroits.

— Dites-moi, Marco. Auriez-vous l'amabilité de me conduire vers les cuisines ? 

— Mais tout naturellement ! me répond-il, tout sourire. Cependant, son expression change du tout au tout quand il réalise l'endroit où je souhaite qu'il me guide.

— Madame ne compte tout de même pas manger dans la cuisine avec les domestiques ? s'exclame-t-il, étonné.

— Pourquoi pas ? m'exclamé-je à mon tour, surprise.

Il me regarde comme si j'étais une chose venue tout droit d'autres cieux avant de reprendre, patiemment :

— Une Dame de votre statut ne devrait pas s'abaisser en mangeant dans les cuisines. À l'avenir, n'hésitez pas à faire part à notre intendante, Marie, de ce que vous désirez manger pour le petit-déjeuner. Il vous sera servi dans la salle à manger dans les plus brefs délais. Si vous voulez bien me suivre, Madame. 

Avec une petite courbette, il entreprend de me conduire jusqu'à ladite salle. Hébétée, je le suis docilement, prenant note du chemin.

A sa manière de s'exprimer, je comprends que Marco n'est pas un simple domestique. Il doit sans aucun doute occuper la place de majordome, orchestrant l'organisation de toute la maison.

Visiblement, je vais devoir m'habituer à vivre dans des conditions bien différentes de celles où j'avais vécu. Au domaine, tout le monde était traité de la même la façon, peu importe son rôle. Ici, les différences de statuts et de grades sont nettement plus marquées, ce qui a tendance à me mettre quelque peu mal à l'aise.

J'imagine que c'est cela la vie de noble...

Une fois arrivés à destination, Marco me présente à Marie, suivie par un valet qui s'empresse de tirer la chaise en bout de table afin que je m'y assoie. Il déguerpit comme un éclair quand le majordome le somme d'aller me chercher de quoi manger.

— Vous voilà entre de bonnes mains, Madame. Si vous le permettez, je vais prendre congé de vous. Bien entendu, si Madame désire faire appel à mes services, je ne serais pas bien loin. 

Il quitte la pièce en croisant le valet, une de ses mains gantées chargée de couverts et l'autre d'une serviette impeccablement repassée qu'il pose sur mes genoux avant de repartir dans un coup de vent.

Bon sang, si mère voyait toute cette mise en scène...

— Bonjour Madame ! Comme Marco vous en a sans doute déjà informée, je m'appelle Marie, l'intendante de la maison, se présente-t-elle en exécutant une énième révérence. Si vous désirez quoique ce soit, je vous prie de m'en faire part afin que je puisse accéder à vos requêtes. 

Nos destinéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant