Chapitre 58 : Confidences ✓

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William ne put se résoudre à détacher son regard de ce qui était devenu, au premier coup d'œil, sa plus belle merveille du monde. Sa réussite. Enfin.

Lors de son périple en enfer, le général avait combattu vents et marées grâce au doux espoir de rencontrer un jour sa progéniture. Quand les obstacles devenaient trop difficiles à braver, il prenait le temps d'imaginer les traits de sa petite Eléonore ou de son petit Arthur jusqu'à rassembler suffisamment de forces pour continuer à avancer. Aura-t-il mes cheveux ou mes yeux ?

« Un jour, je te tiendrai dans mes bras et je n'aurai plus à t'imaginer ! » s'était-il dit en redoublant d'ardeur contre la mort.

Et contre toute attente, ce jour arriva. La petite, toujours profondément endormie, lui ressembla comme deux gouttes d'eau. Entre la forme de son visage et la couleur de ses cheveux, William se demanda où la touche de Marina avait bien pu se cacher. Il espéra secrètement que sa fille avait hérité des magnifiques yeux sombres de sa femme, mais ça, il ne le saura que quand sa petite merveille se décidera à les ouvrir.

Telle une plume volant au gré du vent, William laissa ses doigts airer dans les fines mèches du bébé, et sourit tendrement quand il remarqua que quelques boucles soyeuses semblaient déjà se dessiner çà et là dans sa douce chevelure. Ah, voilà !

— J'ai l'impression que cette enfant me ressemble beaucoup. Elle semble cependant bien partie pour avoir des cheveux aussi rebelles que les tiens, déclara-t-il en se retournant vers Marina, taquin.

— En effet, mais sache qu'elle a aussi mes yeux ! rétorqua-t-elle avec fierté.

— Tu m'envoies ravi ! Elle est magnifique, murmura-t-il en s'agenouillant à côté du berceau, toujours hypnotisé. Si tu savais le nombre de fois où j'ai essayé de me l'imaginer. C'est la perceptive de rencontrer notre enfant qui a nourri ma rage de vivre. Par le passé, j'ai déjà connu cette situation avec mon premier enfant. Je passais des jours et des nuits à essayer de me le figurer en dessinant les traits de son visage. Malheureusement, les siens sont restés à la place de l'imaginaire, confessa-t-il, le cœur lourd. Même après toutes ces années, il est toujours douloureux pour moi de penser à lui.

Un léger coup à la porte les sortit de leur petite bulle d'intimité ; c'était Héloïse qui revenait avec le matériel réclamé.

— Madame, souhaitez-vous que je les dépose dans votre chambre ou ici ? demanda-t-elle, la voix basse.

— On pourrait s'occuper de ma toilette ici ? questionna William à l'attention de sa femme. J'aimerais l'admirer encore un peu...

— Oui, bien sûr.

William s'installa sur le siège de la coiffeuse pendant que la dame de chambre disposa les différents ciseaux, rasoirs, crèmes et autres outils nécessaires sur un drap propre. Quand elle eut terminé, elle s'éclipsa de la pièce en refermant la porte derrière elle.

— Bon, voyons voir tout ça... commença Marina en examinant le champ de bataille qu'était devenu la chevelure de son mari.

Alors qu'elle tenta tant bien que mal de défaire les nœuds de ses doigts, elle eut un élan de compassion et d'admiration pour Maria, qui avait eu suffisamment de patience en elle pour s'occuper de ses cheveux pendant tant d'années. Si cela n'avait tenu qu'à elle, elle les aurait coupés depuis longtemps...

— Je ne crois pas que tu arriveras à les sauver, intervenu celui-ci en lui tendant le rasoir. Il vaudrait mieux opter pour une solution plus radicale...

Marina hésita un instant et songea même à faire appel aux talents de son ancienne nourrice. Elle abandonna cependant l'idée et attrapa le rasoir en se disant qu'il n'avait pas tout à fait tort. Ça repoussera vite...

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