Chapitre 10 : La décision ✓

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Quelques jours plus tard à Paris, demeure du duc Decléssin

William fut occupé à mettre de l'ordre dans ses papiers quand son beau-frère, trapu, déboula comme une tornade dans son bureau.

—  Alors mon frère, as-tu pu réfléchir à la proposition ? le taquina-t-il en lui collant une tape amicale sur l'épaule. Réfléchir ? Je n'ai plus fermé l'œil depuis ce fichu bal !

—   Bonjour à toi aussi Henri. Je ne t'attendais pas aujourd'hui. As-tu emmené ma très chère sœur avec toi ? répliqua William, grognon.

—   Allons, allons... C'est cette proposition qui te met dans un tel état ? Et pour répondre à ta question, non, elle est restée à la maison. En fait, elle ne sait même pas que je suis ici alors si cela pouvait rester entre nous... 

Pour une fois, William fut admiratif de la présence d'esprit de Henri. Il aurait même pu lui baiser les pieds ! Enfin bon, n'exagérons rien...

—   Ne t'en fais pas. À vrai dire, je t'en suis même reconnaissant. Je ne pense pas que j'aurais eu la patience de supporter les babillages de Lisa aujourd'hui. 

Henri se dirigea vers la petite table, qui faisait office de bar, et prit deux verres qu'il remplit de whisky.

—   Tiens, un petit verre t'aidera à te détendre. 

L'homme d'âge moyen décida de s'installer sur le fauteuil placé en face de William et alluma un cigare.

—   Alors, tu comptes te décider à m'en parler ? Tu ne peux pas garder tout ça pour toi. Je pense qu'un avis extérieur pourrait t'aider à y voir plus clair, qu'en penses-tu ? 

Henri et William se connaissaient maintenant depuis de nombreuses années. Étant l'époux de sa sœur et l'ancien administrateur du domaine des Decléssin, ils avaient été amenés à se côtoyer régulièrement et une belle amitié s'était tissée entre eux au fil du temps.

De fait, le père de William, étant décédé très peu de temps après sa naissance, c'était Henri qui avait repris les affaires de l'ancien duc, en attendant que William fût apte à s'en charger lui-même.

Lorsqu'il avait besoin de se confier, le jeune homme se tournait toujours vers son mentor, ce qui avait le don de rendre sa sœur folle de jalousie. Contrairement à son épouse, Henri était discret et savait garder un secret.

William lâcha un long soupir las et se frotta les yeux, irrités par la fumée du cigare.

—   Comment ai-je fait pour en arriver là ? 

Henri partit dans un rire gras, la tête renversée en arrière.

—   Tu te poses encore la question, mon ami ? Laisse-moi t'expliquer, dit-il en agitant la main qui tenait le cigare.  C'est peut-être parce que tu es considéré comme le meilleur parti de France, pardi ! La famille Decléssin n'a pas à se forger une réputation. Elle représente le roi de France depuis plus d'un siècle et est couverte de prestige, alors tu penses bien ! 

Quand il remarqua que William était à deux doigts de perdre la vue, le marquis se leva pour aller ouvrir la fenêtre.

— Pour la faire perdurer, tu as besoin d'un héritier, William. Je sais que tu détestes quand nous abordons le sujet, mais tu ne pourras plus te voiler la face encore longtemps. Que se passerait-il si tu venais à décéder sans laisser de descendance ? 

— Si les choses avaient été autrement, je ne me retrouverais pas dans un tel pétrin ! 

— William, mon garçon, il faut arrêter de te torturer avec le passé. Ça fait dix ans et rien ne pourra jamais les ramener ! 

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