𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐗𝐕𝐈𝐈𝐈

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Depuis le début de la fabrication des flèches, Kageyama n'avait pas décroché son regard d'Hinata

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Depuis le début de la fabrication des flèches, Kageyama n'avait pas décroché son regard d'Hinata. Inconsciemment ou non, il y avait quelque chose chez ce paysan qui l'attirait. Ce qui frustrait Kageyama, c'est qu'il ne savait pas quoi.

Ce villageois aux cheveux roux n'avait pourtant rien de spécial. Un kimono bleu foncé comme tous les autres habitants du village — cette couleur était réputée pour repousser les insectes —, une tignasse constamment mal coiffée et des yeux marrons comme la majorité de la population. Il était joyeux, énergique, il avait ce don pour motiver tout le monde. C'était peut-être ça qui l'attirait.

Et puis, il fallait avouer qu'Hinata avait un joli sourire. Il avait l'impression d'avoir plus chaud lorsqu'il souriait que lorsqu'il se trouvait en plein soleil. Hinata, qui venait de finir une énième flèche — il ne les comptait même plus — croisa son regard et lui sourit avant de poursuivre son travail manuel. Pour une fois, Kageyama ne détourna pas les yeux.

Il observait chacun de ses mouvements avec une fascination à peine dissimulée. Il dévorait du regard ses mains autour de la pierre taillée qui râpait le bambou jusqu'à ce que le bout pointu en devienne tranchant. Il détaillait la sueur qui perlait sur son front, ses traits crispés par l'effort, l'ombre sur son visage abrité sous son chapeau de paille qui le protégeait du soleil.

Oikawa était en train d'aider un paysan à glisser les plumes dans la tige, mais il avait remarqué que son disciple n'était pas dans son état normal. L'esprit ailleurs, le regard vague, un sourire qui menaçait de lui étirer les lèvres et Oikawa qui se sentait vomir, aucun doute, Kageyama s'était épris du petit villageois qui sautait et courrait partout. Mais plutôt que d'en discuter franchement avec lui, il se saisit d'un bambou pour en sculpter le bout. Il préférait observer la situation avant d'agir.

A la fin de la journée, tandis que Kageyama aidait Nishinoya à terminer sa flèche à laquelle il avait du mal à insérer des plumes, Hinata croisa son regard et s'en alla sur la pointe des pieds. Les paysans discutaient joyeusement, heureux d'en avoir fini. Ils avaient à peine remarqué l'absence d'Hinata qui s'était faufilé hors du groupe comme un vent léger et silencieux.

Kageyama avait abandonné Nishinoya qui râlait contre lui. Il n'avait plus que d'yeux pour Hinata qui sautillait en direction de la forêt, le kimono ondulant contre ses jambes nues. Il ne réfléchit pas avant de le suivre, son corps avait agi tout seul, guidé par son instinct — ou son cœur, Kageyama ne faisait pas une grande différence.

Il ne savait pas s'il avait le droit de déserter le village temporairement, s'il pouvait s'absenter comme bon lui semblait sans en avertir personne. Mais de toute façon, c'était trop tard, car Kageyama se trouvait déjà à l'entrée du bois. Il aurait pu hésiter à y pénétrer, mais il ne marqua même pas un temps d'arrêt pour réfléchir. A l'instant où Hinata lui avait souri, il avait su, et il n'avait pas besoin de s'interroger.

Hinata ne s'était pas beaucoup enfoncé dans la forêt, sans doute encore traumatisé d'être tombé sur les bandits la dernière fois qu'il s'y était rendu. La rivière qu'avait repérée Bokuto et Akaashi plus tôt dans la journée s'écoulait sous les arbres, Hinata s'en approcha un peu, et s'assit sur la berge. Kageyama observait son dos, à une bonne dizaine de mètres de lui, caché derrière un buisson. Il ne savait même pas pourquoi il se planquait. Encore une fois, il avait suivi son instinct.

Il hésitait à le rejoindre. Sa main s'était crispée autour de la poignée de son katana. Le vent souffla, les branches craquèrent, les oiseaux s'envolèrent, Hinata se retourna et lui sourit.

— Tu peux me rejoindre si tu veux.

Kageyama ne savait pas ce qui le surprenait le plus : qu'il le tutoie, ou l'imaginer en train de le vouvoyer et ne pas trouver cette pensée désagréable. Il secoua la tête pour faire le vide dans son esprit. Et avant qu'il prenne conscience de ses jambes qui avançaient toutes seules, il se tenait déjà aux côtés d'Hinata, debout sur la berge.

Il s'assit à côté de lui, à une distance raisonnable. Ses yeux contemplaient le cour d'eau emportant les quelques feuilles qui s'étaient décrochées des arbres pour s'échouer dans la rivière. L'endroit était paisible, Kageyama se sentait bien en dépit de son cœur qui faisait autant de bruit qu'un cheval au galop.

— Tu viens souvent ici ?

Il ne savait pas pourquoi il avait dit ça, ce n'était pas son genre de chercher à faire la conversation. Mais il y avait quelque chose en lui qui le poussait à en savoir plus sur ce villageois, à découvrir ce qu'il aimait ou ce qu'il aimait moins. Un désir de rapprochement dont Kageyama n'avait pas l'habitude.

— Oui, c'est un peu ma cachette secrète, mon repère si tu préfères. Je m'y rends lorsque j'ai besoin de faire le vide ou pour être seul.

Kageyama se demanda s'il était implicitement en train de lui dire qu'il le dérangeait parce que s'il venait là, c'était justement pour avoir la paix. Mais il se souvenait très clairement de son regard, ses yeux qui l'avaient cherché, qui s'étaient accrochés aux siens puis s'étaient détournés. Il l'avait invité à le suivre en silence, et même si Kageyama n'était pas doué pour déchiffrer l'implicite, ça avait été tellement flagrant qu'il était incapable de l'ignorer.

Cette attirance était réciproque. Kageyama ne savait pas trop ce qui leur arrivait à tous les deux — ou plutôt, il préférait ne pas mettre un mot dessus tout de suite — mais il choisit de se détendre et de se laisser aller comme le courant qui s'écoulait sous leurs yeux. Le silence de la forêt les enveloppait, ils n'avaient pas la volonté de le perturber. Ils ne savaient pas combien de temps ils étaient restés là, assis l'un à côté de l'autre, à contempler le cour d'eau.

Tout ce que Kageyama savait, c'est qu'il avait écouté le vent chuchoter à l'oreille des arbres, observé la rive qui leur faisait face, humé le parfum humide de la rivière et de la terre boisée, et qu'il avait senti un poids chaleureux et léger sur son épaule. Le paysan avait posé sa tête contre lui, avait fermé les yeux et s'était endormi. Kageyama ignorait le temps qu'ils étaient restés dans cette position, mais il savait qu'à son réveil, il avait eu l'épaule engourdie et le cœur qui galopait.

 Kageyama ignorait le temps qu'ils étaient restés dans cette position, mais il savait qu'à son réveil, il avait eu l'épaule engourdie et le cœur qui galopait

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