Assis en cercle, le visage éclairé par les flammes des bougies qu'ils avaient allumées, les samouraïs réfléchissaient à la tactique qu'ils allaient adopter grâce aux informations recueillies auprès du bandit.
— Je ne les imaginais pas si nombreux, dit Akaashi. S'ils devaient attaquer le village demain, je ne pense pas que nous soyons en mesure de résister, même avec les nouvelles fortifications.
— Il faut monter une expédition, souffla Kenma comme si c'était une évidence. Puisqu'on sait où se trouve leur camp, le mieux serait de les éliminer à la racine. Les tuer dans leur sommeil est certes lâche, mais ça nous permettrait de réduire considérablement leur nombre.
Kuroo le regardait avec fierté, comme si son enfant venait de faire ses premiers pas. Il se demandait si les heures passées à élaborer des stratégies au Go lui avait servi pour affiner ses sens de stratège. Il l'espérait un peu, parce que lui avait beaucoup appris de leurs affrontements, il se sentait plus intelligent. Mal à l'aise, Kenma détourna le regard.
— En voilà une bonne idée hey hey hey ! J'en suis !
Les autres le fixèrent avec horreur. Cette mission requérait discrétion et habileté, tout ce que ce gros bourrin de Bokuto n'avait pas. S'il les accompagnait, les brigands s'apercevraient de leur présence avant même qu'ils n'aient mis un pied dans la forêt. Les samouraïs se jetaient des regards en coin comme s'ils se demandaient qui allait se dévouer pour lui dire la vérité.
Akaashi finit par soupirer, et regarda Bokuto droit dans les yeux. Un grand sourire enfantin sur les lèvres et des étoiles dans les pupilles, Akaashi déglutit avec difficulté avant de lui parler franchement :
— Je pense qu'il vaudrait mieux y aller à trois, et sélectionner une équipe discrète et efficace.
— Je suis efficace ! s'emporta Bokuto.
— Oui, mais tu n'es pas discret.
Il ouvrit la bouche pour le contredire, puis la referma. Même si ça lui coûtait de l'admettre, Akaashi n'avait pas vraiment tort.
— Il faudrait aussi quelqu'un qui connaît bien la région, compléta Kenma. On pourrait demander à un paysan de nous servir de guide. J'avais pensé à Hinata. Il s'aventure régulièrement en forêt et connaît les lieux comme sa poche.
Akaashi hocha la tête, approuvant sa remarque. Kageyama releva la sienne, soudain plus intéressé par la tournure de la conversation.
— Il m'a déjà emmené en forêt avec lui, hésita Kageyama. Je commence à la connaître, moi aussi.
Akaashi l'observa, sceptique. Il n'était pas dupe, il se doutait que si Kageyama tenait soudainement à participer à l'expédition, ce n'était pas juste parce qu'il pensait pouvoir être utile.
— Si Tobio-chan y va, je pense que l'équipe est toute trouvée, intervint Oikawa. Iwa-chan et moi, on se charge de les escorter jusqu'au camp.
Si Oikawa et Iwaizumi les accompagnaient, alors Akaashi n'avait pas son mot à dire. Il avait déjà vu à l'œuvre leurs talents, il savait qu'il n'avait pas à s'inquiéter. Tous deux étaient des samouraïs expérimentés, intelligents et agiles. Et malgré le jeune âge de Kageyama, Akaashi avait fini par reconnaître qu'il pouvait se montrer discret et efficace quand la situation l'exigeait. Il espérait juste que ça irait avec Hinata en tant que guide.
Pour l'avoir côtoyé pendant la semaine de recrutement, il savait que l'adjectif « discret » n'était pas vraiment celui qui correspondait le mieux à Hinata. Tout comme Bokuto, il était plutôt du genre léger et bavard, un soleil qui rayonnait même sans le vouloir. Akaashi espérait qu'il se tiendrait tranquille s'il était accompagné d'Oikawa et Iwaizumi.
— Aller, pour vous souhaiter bonne chance pour l'expédition, j'accepte, dans mon incroyable bonté, de partager avec vous le modeste butin que j'ai trouvé sur un bandit, fit Kuroo en sortant de son kimono la bouteille de saké qu'il avait ramassée tantôt.
Les samouraïs le regardèrent comme s'ils avaient Dieu en personne devant eux. Même Kageyama, qui n'avait pas eu beaucoup d'occasion de boire de l'alcool, avait une petite lueur qui brillait dans le regard.
— Kuroo-chan, je m'excuse pour toutes les fois où je me suis moqué de toi ! Épouse-moi et faisons plein d'enfants !
Oikawa voulut se jeter sur lui pour l'embrasser — et s'emparer de la bouteille au passage. Kuroo esquissa une grimace mais n'eut pas besoin de reculer pour éviter Oikawa ; il avait été retenu par Iwaizumi qui avait empoigné son épaule.
— Iwa-chan, c'était une blague ! Il n'y a que toi que j'ai envie d'ép...
Il se fit couper par la main d'Iwaizumi qui venait de s'écraser contre sa bouche. Akaashi leva les yeux au ciel, las mais soulagé que la tension entre eux se soit apaisée. Tandis que Kuroo débouchait sa bouteille pour se délecter d'une gorgée sous les yeux envieux de ses compagnons d'armes, Akaashi prit la parole :
— Vous partirez demain en milieu d'après-midi. Je demanderai au chef du village de vous prêter des chevaux.
Oikawa acquiesça avant de piquer la bouteille de saké à Kuroo. Celui-ci cligna plusieurs fois des yeux, ahuri, avant de se rendre compte qu'il s'apprêtait à boire du vide et que la bouteille avait disparu de ses mains.
— Iwa-chan, j'ai le trésor, fuyons !
— Oikawa, reviens-là ! s'exclama Kuroo en se lançant à sa poursuite.
— Enfoiré ! Je rêve de cette bouteille depuis qu'on est arrivé ici ! renchérit Bokuto en rejoignant Kuroo dans sa course.
— Shittykawa attends-moi !
— Vous me fatiguez, je vais me coucher, souffla Kenma qui s'allongeait dans la paille.
Bien qu'Akaashi partageait sa lassitude, il ne put empêcher un sourire amusé de s'emparer de ses lèvres. Kageyama les avait regardé partir, il se demandait s'il aurait dû se joindre à eux. Au final, il préféra rester avec Kenma et Akaashi qui avaient éteint les bougies et qui s'étaient couchés.
Ils les entendirent revenir une heure plus tard. Ils riaient comme des idiots, Kenma dut se contenir de ne pas les embrocher sur son sabre pour les faire taire. Ils se laissèrent tomber à leur côté, et à peine furent-ils allongés que des ronflements envahirent la pièce. Ils sentaient l'alcool à plein nez, Akaashi fut traversé de la même pensée meurtrière que Kenma.
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Les sept samouraïs
FanfictionAnnée 1586, Japon, époque de Sengoku. Le village de Karasuno est sur le point de se faire piller par des brigands qui décident finalement de reporter l'attaque en attendant la prochaine récolte. Les villageois sont en panique et se concertent avec l...