Une lune gibbeuse éclairait nos samouraïs cachés dans la forêt. Le jour était tombé, la nuit s'était levée. Les bandits étaient rentrés dans les bâtiments desquels émettaient une faible lumière, sans doute à cause des bougies qu'ils avaient allumées. Torche en main, Kageyama et Iwaizumi attendaient le signal d'Oikawa pour passer à l'action. Hinata resterait caché dans la forêt auprès des chevaux pendant qu'ils mettraient le feu au campement.
Même si Hinata n'avait rien à craindre à l'abri de la faune et de la flore, il n'était pas rassuré pour autant. Les chevaux aussi étaient agités, et Hinata avait appris à prendre ces signes au sérieux. L'air était lourd, le vent ne soufflait pas. Hormis les hennissements des chevaux et sa propre respiration, Hinata n'entendait rien d'autre. Les bruits de la forêt s'étaient tus. C'était comme si le silence qui l'enveloppait était annonciateur d'une tragédie à venir.
Hinata se faisait beaucoup de soucis pour Kageyama. Il avait l'air préoccupé et était plongé dans ses pensées depuis qu'ils étaient descendus de cheval. Blotti contre les chevaux, Hinata avait beaucoup hésité. Il avait voulu prévenir Kageyama des signes de la nature qui lui chuchotaient à l'oreille qu'un malheur rôdait et n'allait pas tarder à s'abattre sur eux, il avait voulu le retenir et l'empêcher d'y aller. Mais Hinata n'avait rien fait.
Kageyama était un samouraï, et il en était fier. Aucun mot n'aurait pu le faire changer d'avis et le contraindre à rester avec lui, caché derrière les arbres et les buissons. Hinata joignit les mains et ferma les yeux. Un autre bruit vint se rajouter par dessus le silence de la nature ; celui de son cœur qui résonnait dans ses oreilles. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était prier pour qu'il n'arrive rien aux samouraïs. Et il pria comme il n'avait jamais prié pour que les guerriers, un en particulier, reviennent sains et saufs.
— On y va, murmura Oikawa.
La majorité des bougies s'étaient éteintes, les samouraïs sortirent prudemment de la forêt. Munis de leurs torches, il se faufilèrent jusqu'au campement et se séparèrent pour s'occuper chacun de mettre le feu à un bâtiment. Il y avait des fenêtres sur les murs, et peut-être auraient-ils dû y jeter un œil avant de les enflammer. Des jeunes femmes dormaient avec les brigands, et certaines d'entre elles ne se réveillèrent pas alors que le feu commençait à se propager à l'intérieur.
— Qu'est-ce qui se passe ?!
— Y a le feu, sortez tous des huttes !
— Les samouraïs sont là !
— Où est le chef ?! Réveillez-le chef !
Oikawa grimaça, les bandits avaient été plus vifs que prévu. Alors qu'il s'apprêtait à repartir, deux d'entre eux lui barrèrent la route. Ils étaient sortis en trombe d'un des bâtiment en feu, et ne portaient que de vulgaire fundoshi, des slips en coton qui cachait à peine ce qu'ils avaient entre les jambes. Ils écarquillèrent les yeux en tombant sur lui, l'un deux s'enfuit en hurlant tandis que l'autre, armé d'un couteau, se jeta sur lui en beuglant.
Oikawa fut plus rapide et le désarma d'un coup de sabre qui envoya voler son canif dans l'herbe. Le bandit l'insulta une dernière fois avant de se faire transpercer la poitrine par la lame aiguisée du samouraï. Tandis qu'il tombait à genoux, Oikawa s'était déjà lancé à la poursuite du deuxième brigand qui hurlait autour des huttes pour réveiller tout le monde. Oikawa regardait à droite et à gauche pour essayer de repérer Iwaizumi et Kageyama parmi tout ce chaos.
Iwaizumi était également en plein combat avec un bandit. Il hurla comme un fou avant de s'élancer vers lui. Il sentait l'alcool, ses mouvements hasardeux montraient qu'il n'était pas tout à fait sobre. Iwaizumi s'en débarrassa rapidement. Il l'esquiva avec un pas sur le côté et se retourna pour l'achever d'un coup dans le dos.
— Oikawa ! T'as vu Kageyama ?!
Oikawa venait d'éliminer le fuyard qui lui avait échappé. En épongeant encore une fois le sang qui recouvrait son sabre, il rejoignit Iwaizumi avec un visage crispé.
— Non, toujours pas. Pourtant j'ai parcouru une bonne partie du camp en courant après un brigand.
— C'est la merde.
— Je te le fais pas dire.
Ils grimacèrent en observant les bandits fuir dans la forêt. Heureusement, ils ne se dirigeaient pas vers la cachette d'Hinata, mais deux hommes armés surgirent devant eux pour les empêcher de se lancer à leur poursuite pour les achever. Coude à coude, Iwaizumi et Oikawa brandirent leurs katanas face aux brigands, près à en découdre avec leurs sourires goguenards.
De son côté, Kageyama était tant bien que mal venu à bout d'un bandit. Contrairement à Iwaizumi qui s'était facilement débarrassé du brigand saoule qu'il avait affronté, Kageyama avait eu du mal à s'habituer aux mouvements incertains de l'ivrogne. Son couteau l'avait éraflé au niveau de l'épaule avant que Kageyama ne réussisse à lui planter sa lame dans le ventre.
Ce n'était qu'une égratignure, il était davantage préoccupé par la fuite des bandits dans la forêt que par la douleur qui irradiait son bras gauche. Alors qu'il parcourait le village à la recherche de ses compagnons d'armes, il tomba nez à nez avec des femmes qui fuyaient les flammes, des larmes et des traces de brûlures en guise de décoration sur le visage.
— Attendez, on ne peut pas partir comme ça ! Certaines sont restées à l'intérieur et sont toujours prisonnières du feu !
— Tant pis ! On doit fuir Mika-chan, ne te préoccupe pas d'elles ou tu mourras toi aussi !
Son kimono avait brûlé par endroit, elle avait mis ses bras autour de sa poitrine pour la cacher. Elle marqua un temps d'arrêt en croisant le regard de Kageyama, puis s'enfuit avec les larmes aux yeux. Kageyama la regarda s'en aller, sous le choc de ce qu'il avait entendu, puis regarda le bâtiment en flammes devant lui. Un cri aigu lui parvint, implorant de l'aide.
Au loin, Kageyama pouvait apercevoir Oikawa et Iwaizumi qui se battaient contre les bandits. Il se pinça les lèvres, les doigts crisper autour de son sabre. Même s'il ne connaissait pas ces femmes, même s'il aurait mieux valu rejoindre ses compagnons d'armes, son sens de l'honneur l'empêchait de laisser périr des innocentes alors qu'il avait la possibilité de les sauver.
Le cœur battant, Kageyama s'enfonça dans le bâtiment en feu.
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Les sept samouraïs
FanfictionAnnée 1586, Japon, époque de Sengoku. Le village de Karasuno est sur le point de se faire piller par des brigands qui décident finalement de reporter l'attaque en attendant la prochaine récolte. Les villageois sont en panique et se concertent avec l...