La ville qui figurait sur l'écran était majestueuse, à couper le souffle. Un immense bâtiment trônait au centre de l'image et semblait constitué uniquement d'or. Avant même de lire la légende en bas de l'image, Lydia connaissait le nom de la ville qu'elle représentait. "Lutèce, capitale de Germania", indiquait le petit texte informatif, confirmant son intuition. L'image de la ville disparut rapidement pour laisser place à un autre paysage.
Le cœur de Lydia ne se calmait pas. Quelque chose au fond d'elle l'attirait irrémédiablement vers Lutèce. Était-elle folle ? Ou y avait-il là-bas la réponse à toutes ces questions ?
Perturbée, la jeune femme s'extirpait habilement de son bain, la peau d'une texture semblable à celle d'un pruneau sec. La baignoire se vidait et se nettoyait toute seule, ne demandant aucun entretien de la part de son utilisateur. Récupérant ses vêtements à présent d'une propreté impeccable, la jeune rousse s'habilla, sans oublier de nouer son bracelet autour de son poignet avant de quitter la merveilleuse salle de bain.
Elle descendit au rez-de-chaussée, à présent illuminé par le soleil de midi. Après un rapide passage dans la cuisine pour y avaler un steak saignant et préparer quelques autres plats faciles à emporter, elle se rendit dans le salon pour préparer ses affaires.
Installée sur le canapé, elle étalait de nouveau minutieusement de la crème sur ses pieds en rémission avant de les bander soigneusement. Attrapant le sac à dos noir que Mr. C lui avait laissé sur la table basse, elle regardait s'il y avait quelque chose à l'intérieur. En effet, le sac contenait une paire de baskets qui avaient l'air très confortables. Mr. C pensait décidemment à tout...
Elle les chaussa sans attendre, ronronnant presque de délice car elles n'appuyaient que très légèrement sur ses pieds blessés, qui auraient ainsi tout le loisir de guérir tranquillement. Fourrant dans le sac à dos la liasse de billets, les quelques provisions qu'elle venait de récupérer ainsi que sa carte Citoyen Ivoire, Lydia jeta le sac sur son dos, attrapa le trousseau de clefs puis quitta le manoir.
Une fois à l'extérieur, elle pouvait découvrir le véhicule que Mr. C lui avait laissé.
Trônant sur un tapis de feuilles mortes à la lisère des arbres, un quad flambant neuf d'une couleur flamme siégeait comme un roi. D'un design agressif et sportif, avec ses grosses roues, ses jantes jaunes vifs et sa carrosserie étirée pensée pour une meilleure pénétration dans l'air, l'engin promettait de belle sensations fortes.
— Cool... murmura Lydia avec des étoiles dans les yeux.
Elle tournait inlassablement autour avec un œil expert, examinant chaque détail dans la carrosserie et la structure. Elle apercevait quatre pots d'échappements, dont deux destinés à l'utilisation du moteur nitro... Le système de stabilisation de la bécane était incroyable et ce modèle de quatre roues motrices tout-terrain était réputé pour être increvable. C'était une belle bête.
Ouvrant le petit coffre situé à l'arrière, Lydia y découvrait un casque noir ainsi qu'une combinaison protectrice d'un cuir extrêmement résistant, qu'elle s'empressa de revêtir, impatiente de conduire l'engin. L'enfourchant d'une sérénité débordante, elle mit le contact, savourant avec une grande satisfaction le bruit de moteur très puissant emplissant ses oreilles. Elle exultait, se souvenant à quel point elle aimait piloter ces bécanes.
Elle démarra au quart de tour, filant vers la forêt dans un boucan de crissement de pneus et de rugissement de moteur. Elle slalomait agilement entre les arbres, comme si elle avait fait ça toute sa vie, ressentant un tel sentiment de liberté qu'elle ne pouvait s'empêcher de hurler de joie. La forêt défilait rapidement et bientôt, elle émergea sur la grande route qui menait à Gregville.
N'y tenant plus, elle actionna le moteur nitro.
L'accélération était si intense que les roues avant du quad se soulevaient carrément. Lydia maîtrisa sa position, les roues retombèrent sur le sol et la bécane fila droit devant à une vitesse hallucinante.
Les portes de Gregville furent rapidement visibles. Quatre silhouettes au loin lui faisaient désespérément signe de ralentir. Lydia reconnut immédiatement les gardes obscènes qui l'avaient accueillie lors de sa première arrivée en ville. Provocatrice, elle ne ralentit pas tout de suite. Effrayés, les quatre hommes se jetèrent sur le côté. Lydia freina brutalement lorsqu'elle fut toute proche d'eux. Le quad dérapa avec une infinie maîtrise et s'arrêta juste devant les hommes qui se relevaient en tremblant. Un énorme nuage de poussière flottait au-dessus d'eux.
— Vous... vous... vous êtes folle ! hurla l'un d'eux avec de la sueur perlant de son front. On aurait du vous abattre sur le champs !
Lydia sortit sa carte Citoyen Ivoire de son sac et la leur présenta.
— Oui, je suis folle, répondit-elle.
Elle redémarra brusquement, entrant dans la ville sous leurs regards médusés.
La circulation étant plus dense sur les routes fréquentées de Gregville, Lydia était forcée de ralentir l'allure alors qu'elle s'engageait dans une avenue menant aux quartiers les plus pauvres, regardant les immeubles crasseux défiler sous ses yeux.
Se garant devant la vieille bicoque en ruine de Hug, elle coupait le contact, récupérait les clefs et se dévêtait de son casque et de sa tenue en cuir pour les ranger dans le coffre, frissonnant sous la météo plutôt fraîche. Elle se rendit compte qu'elle avait oublié son turban au manoir. Ses cheveux roux flottaient derrière elle, soulevés par le vent puissant. Se disant que ça n'était sans doute pas très grave, elle frappa à la manière de Zay sur la porte de la bicoque.
La tête ébouriffée de Hug ne tardait pas à sortir prudemment. Il observait d'un air méfiant les alentours, avant de s'écarter pour laisser la jeune femme entrer, refermant la porte après elle.
— Ravi de te revoir, poil de carotte ! lui lança-t-il.
— Moi aussi Hug ! répondit Lydia en s'asseyant sur une des chaises à roulettes face aux ordinateurs.
Hug l'imita, se laissant tomber avec une lassitude non dissimulée. Tous les écrans étaient allumés, il devait être en plein travail. Ses cernes sous ses yeux injectés de sang avaient doublé de volume depuis la dernière fois, il devait passer toutes ses journées et une bonne partie de ses nuits à peaufiner d'arrache pied les projets de sauvetage de sa fille... Il ne devait faire que ça, encore et encore...
— Je suis curieuse de connaître l'histoire de la petite Fabela, dit Lydia.
— C'est une longue histoire... grommela Hug, visiblement gêné.
Il soufflait, croisait les bras et fixait le sol. Il était prêt à raconter son récit.
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LUTÈCE
Ciencia FicciónA son réveil, tout est flou, tout est vide. Le monde tremble. Quel est son nom déjà... Ly...Lydia. Quelle est cette scène où elle se trouve ? Où l'on crie son nom, où la lumière est aveuglante, où l'on scande des prix. C'est une vente aux enchères...