— Que... que s'est-il passé ? demanda-t-elle après un long moment de silence.
Ce fut Zay qui répondit, épargnant à Hug la souffrance de parler avec un visage aussi abîmé.
— Au début, tout se passait comme sur des roulettes. Une fois dans la cave, nous avons pu sortir des cartons sans problème, quoique un peu sonnés grâce à ta conduite, mais en un seul morceau. Nous avons endormi Dray avec l'endormisseur... d'ailleurs, tu aurais vu sa tête... ! (Lydia émit un faible sourire à cette pensée). Ensuite, Hug a pris sa veste et ses cartes d'accès et il est monté faire le barman. Quant à moi, je suis restée ici et je me suis occupée de dévisser l'accès aux canalisations pour pouvoir vous rejoindre là-haut, en chambre treize. Ça m'a pris du temps, c'était sacrément bien verrouillé. J'y suis parvenue et j'allais me glisser dans la tuyauterie quand le mec s'est mis à sonner. J'ai paniqué. Je suis retournée devant lui. Il dormait toujours avec sa face de requin remplie de bave. Je ne comprenais pas. Il n'avait plus d'oreillette et rien d'électronique sur lui. Je l'ai fouillé encore et encore pour en être sûre mais je n'ai rien trouvé... Et là, j'ai vu son poignet clignoter. Je ne comprenais pas, c'était sous sa peau. J'ai essayé d'appuyer dessus mais ça ne changeait rien. Ça sonnait toujours. Et des mecs sont arrivés. Des vigiles. Ils m'ont menottée et tabassée pour que je parle. Je n'ai rien dit mais ils ont vite compris en voyant que Dray n'avait plus de veste ni de badge. Ils ont sonné l'alarme. Ils ont vite fait chopé Hug et ensuite c'était pas très difficile pour eux de remonter la piste jusqu'à la chambre qu'il t'avait donnée.
Lydia baissait la tête avec tristesse. Si seulement ils avaient été au courant de la puce de ce maudit Dray... Ils auraient pu réussir. Ils avaient été à deux doigts...
Le silence les enveloppait de nouveau, rompu uniquement par les sanglots de la jeune Fabela. Hug et elle ne se quittaient pas des yeux. Combien de temps avaient-ils été séparés ? Ils n'imaginaient probablement pas que leurs retrouvailles tant attendues seraient si sombres et sanglantes.
La tension qui pesait sur eux était palpable. Elle avait une consistance épaisse et les écrasait tous, rendant chacune de leur respiration difficile. Les secondes qui s'écoulaient étaient interminables.
Une porte s'ouvrit, se claqua. Un écho de voix et de pas résonnait jusqu'à eux. Lydia sentit son cœur se geler lorsque les deux gardes approchèrent. Ils étaient armés, cagoulés et se plantèrent juste devant eux, les regardant de haut.
— Eh bien, eh bien, eh bien... chantonna l'un d'eux. On dirait que toute la petite troupe est bien réveillée. Donc, nous avons une esclave Immigrée et trois individus à la citoyenneté plus que douteuse...
— Pourquoi ne pas tous les exécuter sur le champs ? demanda son camarade d'une voix excitée.
— Patience Vince, tu connais la règle ! Si ce sont de vrais Citoyens, on ne peut pas les exécuter comme bon nous semble.
Lydia plongea ses yeux dans ceux du garde qui venait de répondre. Elle le toisait avec une haine inconditionnelle, brûlante. Il se mit à rigoler, approchant sa tête cagoulée tout près de celle de la jeune femme.
— Qu'est-ce qu'il y a rouquine ? Tu comptes faire quoi menottée comme t'es ?
Lydia lui cracha à la figure, pile dans l'oeil, qui était la seule partie découverte de son visage. Le garde gronda de rage, lui administrant une puissante gifle qui lui fit voir des étoiles lumineuses.
— Écoute moi bien rouquine... à la seconde même où l'on prouvera que ton identité est fausse, car je n'ai aucun doute qu'elle est fausse, une chienne comme toi ne peut pas être Citoyenne, je me ferais un immense plaisir de te coller une balle entre tes jolis yeux verts.
— Mais on peut déjà s'occuper de l'esclave Immigrée, non ? intervint son camarade, le dénommé Vince.
Fabela tremblait. Hug grognait, tentant de dire quelque chose mais son visage était à présent trop tuméfié pour qu'autre chose qu'un gargouillis incompréhensible ne sorte de ses lèvres extrêmement enflées. Il tirait comme un fou sur ses menottes. Les gardes ricanaient.
— On est censés attendre le patron pour avoir son accord d'exécution, il ne devrait plus tarder mais... il n'y a pas de raison qu'il nous reproche d'avoir été impatients...
Éclatant de rire, Vice détacha Fabela, la tirant par les cheveux pour la lever. Elle criait, se débattait. Hug criait aussi, suppliait. Zay et Lydia observaient la terrible scène, impuissantes, avec une rage sans nom.
Le garde tenait fermement Fabela qui ne cessait de se débattre avec l'énergie du désespoir, tel un poussin sous les griffes d'un loup particulièrement sadique. Son compagnon pointa son arme sur son cœur.
— Tu vas cesser de gigoter petite peste !?
Il baissa brusquement son arme, lui tirant dans les jambes.
La balle se planta dans le tibia de la jeune adolescente qui cessa aussitôt de se débattre, hurlant de douleur alors qu'une flaque de sang se formait peu à peu à ses pieds.
Hug, Zay et Lydia avaient les yeux écarquillés d'horreur. Ils tiraient de toutes leur force sur leur menottes en criant.
— Arrêtez, je vous en supplie ! gémit Zay. Nous ferons tout ce que vous voudrez ! Laissez la !
Les gardes riaient à s'en éclater les côtes. Fabela cessa de hurler. Elle s'écroula sur le sol, respirant faiblement.
— Voilà qui est mieux, glapit Vince. Elle a enfin fermé sa gueule. Je vous conseille d'en faire autant, ajouta-t-il en pointant son arme à tour de rôle sur Zay, Hug et Lydia.
Au même moment, la porte de la cave s'ouvrit à la volée. Tous se turent tandis qu'un homme en costume s'avançait précipitamment, l'air inquiet.
— J'ai fait aussi vite que j'ai pu. On m'a dit qu'une rousse du nom de Lydia avait été capturée, j'espère que...
Greg Martin s'arrêta net lorsqu'il se trouva face à face avec la triste scène qui se déroulait. Il tournait la tête dans tous les sens, croisant le regard de Lydia puis celui de la jeune Fabela qui gisait dans une flaque de sang.
Il recula d'un pas, visiblement extrêmement terrifié par ce qu'il avait sous les yeux. Les gardes ne comprenaient pas, ils se regardaient d'un air incrédule.
— Pauvres idiots... gémit Greg en regardant les gardes. Qu'avez-vous fait !? Appelez une équipe médicale sur le champs !
— Mais... balbutia Vince.
— SUR LE CHAMPS J'AI DIT OU JE VOUS FAIT EXECUTER VOUS ET TOUTE VOTRE FAMILLE ! rugit Greg.
Soudain effrayé, Vince appela du renfort médical via son oreillette. Son camarade semblait tout aussi effrayé, il se faisait bien petit tout à coup...
— Et libérez la rouquine immédiatement ! poursuivit Greg. Je veux lui parler en tête à tête dans mon bureau !

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LUTÈCE
Science FictionA son réveil, tout est flou, tout est vide. Le monde tremble. Quel est son nom déjà... Ly...Lydia. Quelle est cette scène où elle se trouve ? Où l'on crie son nom, où la lumière est aveuglante, où l'on scande des prix. C'est une vente aux enchères...