Chapitre 50 : Se jeter à l'eau

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Chapitre 50 : Se jeter à l'eau.

Lucy ne sut ce qui la réveilla en premier : le son assourdissant de l'explosion, les cris stridents de ses camarades, ou l'eau qui fusa sur elle. Elle se redressa, parfaitement éveillée, mais l'esprit dans le brouillard. Elle avait eu du mal à s'endormir après la cérémonie, et ne comprenait ni pourquoi ses amies criaient, ni pourquoi elle était trempée. Elle s'extirpa tant bien que mal de ses draps et balança ses jambes dans le vide.

-Par Merlin ! jura-t-elle en se levant. Qu'est-ce qui se passe ... ?

Elle étouffa un cri quand ses pieds ne rencontrèrent pas la moquette soyeuse de leur chambre, mais de l'eau gelée qui lui arrivait déjà au-dessus des chevilles.

-Les fenêtres, Lucy ! cria Alexandra, debout sur son lit. Regarde-les !

Elle ne voyait que ça, à vrai dire. Des immenses fissures les parcouraient et l'eau s'échappait doucement du lac pour se répandre dans leur chambre. Et pire que tout, dans leur fenêtre la plus basse, un trou béant dans lequel s'écoulait les flots à gros bouillons. Le sang de Lucy ne fit qu'un tour.

-Repars-ça, préfète ! exigea Athénaïs depuis sa table de nuit où elle était retranchée.

-Je pense que c'est trop tard, répliqua Dorothy, qui était comme Lucy dans l'eau. Ça monte trop vite ...

-Ecoutez ! les interrompit durement Lucy.

Les filles se turent et la préfète put alors les entendre distinctement : les cris d'angoisses des gamines de l'autre côté du mur, le murmure de l'eau qui s'engouffre et qui s'écoule, le parfum de l'anxiété. Son sang se figea dans ses veines alors qu'elle comprenait ce qui était en train de se passer. Elle jeta un regard horrifié à ses jambes. L'eau lui arrivait déjà presque aux genoux. Dorothy avait raison. Ça montait.

Beaucoup trop vite.

-Evacuez le dortoir ! hurla-t-elle à plein poumon en agrippant sa baguette.

Ses camarades ne le lui firent pas répéter deux fois et s'élancèrent vers la sortie de leur chambre. Leurs meubles et affaires commençaient déjà à flotter et elles durent s'y mettre à trois pour ouvrir leur porte contre le courant de l'eau, qui poussait pour la maintenir fermer. Comme le redoutait Lucy, le niveau était presque égal de l'autre côté et continuait de grimper.

-Toutes les filles ! s'égosilla Lucy avec l'énergie du désespoir. Montez toutes ! Allez, montez-toutes, dans la Salle Commune !

Elle se dirigea vers la porte la plus proche d'elle, celle des sixièmes années. Elle était entrouverte, mais visiblement, les filles peinaient à ouvrir. A travers l'entrebâillement, Lucy reconnut Eléonore, ses cheveux noirs collés à ses joues, le visage crispé par l'effort. La préfète et Dorothy s'y mirent à deux pour pousser la porte et ensemble, elles arrivèrent à créer une ouverture dans laquelle leurs aînées pouvaient s'engouffraient. Lucy eut juste le temps d'apercevoir les fenêtres craquelées avant de la porte de se referme sur la chambre.

C'était bien ce qu'elle redoutait.

Toutes les fenêtres. Toutes les fenêtres du dortoir avaient cédé.

-Merci, haleta Eléonore, à bout de souffle. Un meuble bloquait la porte, on n'a pas réussi à le bouger ...

-Les petites sont encore bloquées, fit remarquer Gloria Stones, une septième année qui avaient réussi à s'extirper.

-On s'en occupe, vous, montez dans la Salle Commune ! exigea Lucy, affolée par le niveau de l'eau qui montait de plus en plus vite. Et que quelqu'un court chercher Greengrass !

Les fantômes des oubliésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant