Chapitre 21 - Partie 3 - Apothéose

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« ... Alysea a accepté avec joie de commencer sa carrière d'idole, malgré tous les arguments qu'elle avait opposés quelques jours plus tôt, et je lui ai légué la moitié de l'héritage de mon père. Esther est morte le lendemain, suicidée. Alysea s'en est longuement voulu, car elle était convaincue que c'était parce qu'elle avait accepté de me rejoindre qu'Esther s'était donné la mort, jusqu'à ce que je lui dise la vérité sur nos parents. Et là, sa perception a changé pour devenir la même que la mienne : le mépris inconditionné pour les deux êtres qui nous avaient donné la vie. »

***

Elioth s'arrêta là, poussa un long soupir, avant de relever les yeux vers moi. Je m'assis à ses côtés et alors que je m'apprêtais à parler, il posa son index sur mes lèvres avant de murmurer :

« Non, Evyna, tu n'as rien besoin de dire. Je me sens déjà libéré de ce fardeau, juste en te l'ayant révélé. »

J'approuvai d'un simple geste de tête, malgré la culpabilité qui m'envahissait : dire que j'avais pensé qu'il avait eu la vie facile, que toute la gloire lui avait été offerte sur un plateau d'argent... Au contraire, il avait dû surmonter des épreuves horribles, avec pour seule compagnie sa sœur jumelle qu'il cherchait à protéger à tout prix de ces souffrances... Autrement dit, il avait dû y faire face tout seul...

« Nous avons définitivement plus en commun qu'on ne pourrait le penser, n'est-ce-pas ? souffla Elioth avec un sourire.

— Je ne peux pas comparer mon enfance avec la tienne ! protestai-je en me relevant.

— Ah bon ? Nous avons été tous les deux abandonnés par nos parents et nous avons tous les deux un frère ou une sœur que nous cherchons à protéger de la dure vérité.

— Je savais au moins que mes parents s'aimaient... soufflai-je.

— C'est vrai, tu as raison : ils s'aimaient dans leur folie. C'est toujours mieux que de se mépriser dans la folie ! »

Le ton presque amusé d'Elioth me surprit, il comprit rapidement mon étonnement car il déclara :

« Evyna, c'est du passé ; je préfère le prendre à la légère maintenant. J'aime ma vie comme elle l'est à présent et pour rien au monde je ne voudrais qu'un élément d'elle ne change... Si ma mère n'avait pas empoisonné mon père, je n'aurais pas rencontré Alysea, je ne serais pas devenu celui que je suis aujourd'hui, et pire que tout... je ne t'aurais jamais connue... »

Sur ces paroles, il se releva, me prit doucement dans ses bras et m'embrassa longuement.

« Vous êtes tellement adorables... » retentit à cet instant une voix bien familière.

Elioth et moi nous séparâmes immédiatement, fîmes volte-face pour découvrir qu'Alysea venait d'arriver. Ses lèvres noires dessinaient un sourire enchanté et elle ne manqua pas de charrier son frère jumeau :

« Je crois que tu as une énorme dette envers moi, cher Elioth ! Si je ne t'avais pas forcé à prendre part à ce programme... »

Elle lui adressa un clin d'œil et elle rajouta à mon intention :

« Quant à vous, Evyna, je vous adresse toutes mes félicitations pour être parvenue à conquérir le cœur de pierre de mon cher frère ! »

Alysea s'interrompit soudainement, le visage virant au cramoisi, et elle murmura, hésitante :

« Vous... le... saviez... Evyna... ? Elioth, tu lui as dit la vérité ?

— Je viens de le faire. »

Alysea poussa un soupir de soulagement et elle reprit, avec un sourire en coin qu'elle tentait, en vain, de dissimuler :

« Enfin, vous pouvez reprendre où vous en étiez, je ne voulais pas vous interrompre...

— Bien sûr, et toi tu vas rester ici, ton téléphone à la main, ironisa Elioth. Je commence à connaître tes stratagèmes ridicules à force... »

Alysea afficha un air déconfit mais elle se reprit rapidement :

« Très bien, puisque vous avez fini de vous embrasser, vous allez peut-être pouvoir venir manger. Vero et moi vous attendions.

— Et tu n'as pas pensé que nous voudrions un peu de tranquillité pour ce dernier jour ? Et en l'occurrence, nous sommes déjà en train de manger le petit-déjeuner...

— Vous venez déjà de passer plus de seize heures ensemble, il faut changer un peu. Il ne faudrait pas que vous vous lassiez de ces petits moments de plaisir ! Et puis, il est midi : c'est quoi cette manie de manger le petit-déjeuner à midi ?!

— Tu ne comprends définitivement rien à rien... » soupira Elioth.

Après avoir remballé notre petit-déjeuner, nous accompagnâmes tout de même Alysea et rejoignîmes au restaurant Veronica qui tapait vigoureusement sur son téléphone. Elle releva les yeux vers nous et elle s'exclama gaiement :

« Coucou Evyna ! Je suis contente que tu sois restée une journée de plus ; grâce à toi, j'ai toujours un peu l'impression que le programme d'Allie n'est pas terminé !

— Merci Veronica, je suis heureuse d'être ici également.

— Bien sûr, qui ne pourrait pas être fou de joie en étant à Idolaland ?! s'exclama l'idole frénétique.

— À qui écrivais-tu, Vero ? s'enquit alors Alysea.

— Sophy ; elle m'a demandé des nouvelles d'Evyna au passage. »

Oups... j'avais totalement oublié d'allumer mon téléphone ce matin...

« Je lui ai dit que tu allais très bien mais que tu étais occupée à négocier des jours supplémentaires pour le programme. Sophy était un peu jalouse. Et il faut dire que je le suis également : Elioth a toujours été avantagé. »

L'intéressé lui jeta un regard incrédule et Alysea s'exclama :

« Peut-être est-ce parce que je suis la nouvelle directrice d'Idolaland qui ferait tout pour privilégier son cher frère jumeau ! »

Ce fut cette fois Alysea qui reçut de la part d'Elioth un regard indigné et Veronica releva lentement la tête vers la diva, ses fins sourcils bleus froncés.

« Attends... Ok, je sais que tu es la nouvelle directrice d'Idolaland... Mais... Elioth est ton frère jumeau ?! Ce n'est pas possible, il n'existe pas plus différents que vous deux, même si vous formez un duo parfait ! Vous ne vous ressemblez absolument pas, aussi bien physiquement que mentalement. Ah non, c'est bon, j'ai compris, enchaîna Veronica alors qu'Alysea s'apprêtait à démentir l'affirmation. Vous avez été choisis comme acteurs pour un film et vous devez jouer des jumeaux, n'est-ce-pas ?

— Non. »

Pour deux semaines et un jourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant