Chapitre 19 - Partie 2 - Adieux

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Au bout d'une vingtaine de minutes, presque tous les stagiaires et idoles étaient présents... ou plutôt, il manquait seulement Elioth... Même Bella était là, adossée contre le tronc d'un cerisier, sans personne à qui parler. Enfin, je n'étais pas mieux non plus : tous les stagiaires discutaient avec leurs idoles et Alysea parlait avec Sophy et Veronica. Encore une fois, j'étais la personne marginale, à croire que ce rôle me convenait bien... Pourtant, j'aurais aimé à cet instant qu'Elioth fût là et que nous discutions tous les deux – même si je n'avais pas la moindre idée de sujet de conversation, je devais l'admettre –...

Puis tout à coup, l'équilibre qui s'était établi se rompit ; le silence se fit, tous se tournèrent vers la même direction – à savoir l'opposée de celle où je regardais – et même Bella se redressa, le visage soudainement éclairé, voire intéressé. Je me retournai à mon tour et découvris qu'Elioth venait d'arriver. Il abordait son habituel air impassible, il commença à s'avancer, je vis du coin de l'œil Alysea sortir prestement son téléphone et je sentis le malaise m'envahir soudainement ; pourquoi s'étaient-ils tous tus ? Ne pouvaient-ils pas se remettre à parler afin de rendre la situation moins saugrenue – on pouvait même entendre les bruissements du vent dans le feuillage des cerisiers, ce n'était pas normal ! – ?

***

Je vis alors à cet instant Elioth esquisser un très léger sourire, et, son regard vairon plongé dans le mien, il commença à chanter :

« Triste silence,
L'heure des adieux,
Se dresse un gouffre immense...
Comment oublier
Toutes ces journées ensoleillées ?
Tous les regards tournés vers les sombres cieux,
Ô cher merveilleux,
Pourquoi disparaître sans espérance ?
Ne reste qu'un dernier vœu,
Je vous prie, une seule danse... »

Il était parvenu à ma hauteur et il me tendit lentement sa main droite que je saisis doucement – comme semblait le vouloir le rythme imaginaire de la chanson –, et Elioth poursuivit sur ce qui devait être le refrain :

« Naît alors l'espoir,
Même si s'achève l'histoire...
Mais de l'autre côté du terne miroir,
Transparaît le désespoir,
Seul dans le noir...
Souvenirs illusoires
Pour toujours gravés dans ma mémoire,
Inoubliables désormais...
Ni vous ni moi ne l'aurait pensé, pourtant c'est vrai, vous resterez à jamais... »

Il me faisait danser doucement et j'avais presque l'impression d'être revenue au premier jour du stage où nous avions dansé tous les deux. Sauf que cette fois, le rythme était beaucoup plus doux, presque mélancolique, j'étais parfaitement sereine, je souriais sans me forcer et je parvenais même à anticiper les mouvements d'Elioth. En quelques mots, j'étais heureuse... Puis Elioth relâcha doucement ma main, s'éloigna légèrement, avant d'entamer d'une voix particulièrement mélodieuse la suite, tournant lentement autour de moi :

« Souvenirs heureux,
Une seule connaissance,
Partent les jours radieux...
Comment scintiller,
Quand fuient trop vite les sabliers ?
Tous ces êtres aveuglés et sans défense,
Ô sombre impuissance,
Pourquoi céder au temps douloureux ?
Ne reste qu'un dernier vœu,
Je vous prie, une seule danse... »

Puis il revint devant moi, me présentant à nouveau sa main gantée comme il l'avait fait la première fois et le refrain reprit alors, sur le même rythme calme et harmonieux. Puis vint le dernier couplet qu'il déclama d'une voix plus claire que jamais, faisant instantanément fondre mon cœur :

« Et cette lueur brillant dans vos yeux,
Si profonds, étrangement mystérieux,
Dissipe toute forme de souffrance...
Un soupçon de merveilleux,
Afin d'oublier les différences
Et s'abandonner à l'espérance...
Qu'importe la distance,
Rien qu'un adieu... »

La chorégraphie s'était accélérée mais elle était terriblement magnifique s'accordant à la perfection avec sa voix extraordinaire, le refrain reprit, je le trouvais encore plus merveilleux que les deux précédents, et quelque peu différent :

« Seulement un au revoir,
Qui pourtant peut aveuglément y croire ?
Fuis, ô sinistre désespoir,
Seul dans le noir...
Souvenirs illusoires
Pour toujours gravés dans ma mémoire,
Inoubliables désormais
Ni vous ni moi ne l'aurait pensé, pourtant c'est vrai, vous resterez à jamais...
Impossible d'oublier le temps passé, je le promets... »

Puis Elioth ralentit le rythme de ses paroles, nous commençâmes à nous séparer légèrement et alors qu'il murmurait les derniers mots de la chanson, il relâcha ma main. Il s'éloigna d'un pas, ses prunelles vaironnes scintillantes d'une émotion que je n'avais encore jamais vue chez lui, et après une seconde d'hésitation, il tourna les talons. Je remarquai à cet instant que tous les regards des idoles et des stagiaires allaient et venaient entre lui et moi, mais j'étais trop tétanisée pour réagir. Mon cœur battait à toute allure, mon visage était brûlant et je finis par comprendre : je l'aimais...

Pour deux semaines et un jourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant