Partie 20

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Un violent vent d'est soulevait et emportait quelques feuilles d'arbres gisant ici et là. Les piétons couraient, les voitures accéléraient, pendant que les commerçants se cachaient sous des abris. Certains avaient réussi à emporter leurs affaires à l'abri, d'autres ne pouvant le faire, les avaient simplement recouvertes d'un grand sachet.

La maisonnée des Marcabeli n'échappa pas au vacarme. Tous étaient aux aguets, le chauffeur prenant soin des quelques véhicules utilisés par son patron durant la semaine. La ménagère essuyait les carreaux du salon et Malika faisait la vaisselle. Le froid pesant transperça les murs de la chambre d'Andrea, s'emparant au passage de Dylan qui grelottait fortement en se réveillant. Il contourna attentivement son regard dans cette chambre où il se trouvait et constata qu'elle n'était pas la sienne. Aussitôt, les souvenirs de la veille firent irruption, prenant ainsi tout le monopole de son psychisme.

Dylan se redressa instinctivement, ou plutôt à cause des bruits sourds qu'il entendait depuis la salle de bains. Il regarda l'espace dans lequel il était. C'était le chaos, le désordre ou devons-nous dire, l'anarchie totale entre les vêtements sales qui n'avaient pas trouvé leur place dans le panier à linge et l'énorme cadre de miroir brisé. Sur le lit, on y sentait la désolation, la souffrance d'une Andrea détruite. Il reentendait à présent les supplications de son épouse, voulant lui faire prendre conscience, essayant de le dissuader de ne pas commettre cette puanteur. Il se revoyait dans toute sa hauteur d'homme fort, la violentant. Dylan tressaillit. Il posa avec hésitation ses pieds sur le sol, comme si quelque chose l'en retenait. Cette fois-ci, l'homme reconnaissait qu'il était allé loin, un peu trop loin pour éviter de dire trop loin. Il allait s'excuser !

L'homme se dirigea à pas lents vers la source du bruit. Il ouvrit la porte de la salle de bain et tomba nez à nez avec une Andrea accroupie au sol, pleurant toutes les larmes de son corps. Inconsciemment, Dylan reposa son regard sur la robe de cette dernière. Celle-ci, qui était fichue, laissait voir une grande partie du corps d'Andrea où étaient posés plusieurs hématomes. Dylan se rapprocha d'un pas, puis d'un autre. Lorsque le regard d'Andrea croisa le sien, ce fut comme une douche froide sur le corps de la jeune femme. Elle sentit en elle se former un cœur meurtrier. Elle voulait tant lui faire payer ce supplice, elle avait pourtant si peur de lui. Andrea, la première, détourna son regard de lui et le posa sur ses propres pieds à elle, vidant ainsi ses yeux de larmes et priant intensément pour qu'il s'en aille. Elle avait passé le reste de la veille à pleurer, à maudire son existence et à vomir ses intestins. Elle avait mal, vraiment mal. Si sa douleur ne pouvait se résumer qu'au physique, elle était forcément aussi morale.


Chaque coup d'œil dans la pièce lui avait fait revivre ce cauchemar. Chaque centime d'oxygène respiré lui avait rappelé le parfum de cet homme. Dylan était un monstre, il avait un cœur de roc, il adorait la voir souffrir... Andrea n'avait qu'une seule chose en tête à présent : cesser de respirer pour oublier cette angoisse.
Elle voulait avant tout cesser de se sentir aussi sale, détestable, abominable, coupable, dégoûtante, en colère, chosifiée, victimisée. Elle détestait cet homme ! Elle le haïssait !

-- Andrea, je suis désolé ! réussit à dire Dylan.

Andrea se boucha les oreilles. Sa voix, rien que la voix de cet homme, lui inspirait de l'horreur. Elle avait envie de lui vomir dessus, de lui arracher les yeux, de lui planter un couteau dans le cœur.

-- Je suis vraiment désolé, s'il te plaît pardonne-moi, Andrea. J'avais bu et je...s'il te plaît.

Ces paroles résonnaient dans la pièce, mais ne purent trouver écho favorable dans le cœur d'Andrea. Elle savait qu'il mentait.

Déchirante Promesse Où les histoires vivent. Découvrez maintenant