À tout prix

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— Parle toujours, siffla-t-elle.

   Nous vidâmes deux bouteilles de bière avant d'aller danser. Nous dûmes lutter dans la foule qui se mouvait sur la piste, pour avoir une place. Une fois installés, nous bougeâmes au rythme écervelé de cette musique hip-hop. C'était si chaleureux et vivant qu'à la fin, notre peau brillait de sueur. On enchaîn sur une musique plus douce. Comme la situation le permettait, je mis ma galanterie à l'honneur.

— M'offririez-vous cette danse ? demandai-je en avançant sur Jennifer jusqu'à être collé.

— Tu ne me laisses pas le choix.

   Nous nous sommes mis à balancer sur la musique qui calmait l'atmosphère et qui, pourtant, amplifiait nos sens. J'arrivais à sentir la peau de Jennifer sur la mienne. À respirer le doux parfum qui émanait de son corps. Nous fûmes si près l'un de l'autre que parfois, son souffle chatouillait mon cou.

— Tu as un copain ?

— Oh non, pas ça.

— Quoi ?

— C'est trop cliché comme question. On est en train de danser dans un club de strip-tease et tu me sors ça.

— Ouais, mais n'empêche que tu peux répondre.

— C'est pas faux.

   Elle se tut quelques instants, de quoi augmenter le suspens. Elle passa ses bras autour de mon cou tout en m'hypnotisant avec son regard.

— Si tu me fais la meilleure danse de ta vie, peut-être...

— Que faut-il faire ?

— À toi de trouver.

   À ces mots, je saisis sa taille, la pressai sur moi, déposai mon front sur le sien et fis en sorte que ça reste ainsi. Les yeux dans les yeux. La chaleur monta d'un cran et sentit chaque goutte de sueur couler dans mon dos. Pourtant, il ne fallait pas s'arrêter là. Je caressai son dos et sa main.

— Bon début ? demandai-je, la voix troublée.

— Ouais !

   Le temps s'effrita tandis que mon cœur grimpait. L'ambiance était charnelle et nous le savions, ce qui le rendait encore plus intense. Être si près d'elle me permettait de voir chaque détail de son visage presque parfait, de ses yeux marron quand on prenait le temps d'y pénétrer, et de cette bouche qui ne cessait de m'appeler à chaque fois que sa langue l'humidifiait. J'avais l'envie pressante de céder à cette pulsion si ardente qui frémissait sur mes lèvres.

   Alors comme dans les films à l'eau de rose, j'avançai pour goûter. Lèvres entrouvertes, peau recouverte de sueur, yeux dans les yeux. Encouragé, parce qu'elle ne reculait pas, j'avançais encore plus jusqu'à sentir la chaleur de sa bouche sur mes lèvres. Mais quand j'allais mettre fin à ce supplice, le DJ coupa la musique, mettant fin à la magie et aux paillettes qui flottaient dans l'air. Un léger malaise s'installa entre nous et nous restâmes immobiles un bon bout de temps.

— La danse t'a plu ?

— Un tout petit peu.

— Alors tu réponds ?

— J'ai dit peut-être.

   Elle me repoussa avant de prendre la direction du bar. Je la rejoignis pour commander des bières que nous ne buvions pas. On préféra parler de sujet banal comme nos couleurs préférées, nos séries fétiches, nos cruchs... On apprenait l'un de l'autre. Elle venait de m'avouer qu'elle avait porté un appareil dentaire quand quelqu'un me tapa l'épaule.

— Et toi ?

   Je me retournai pour voir la personne qui pouvait m'interpeller aussi nonchalamment. Un homme garni de cheveux bruns et d'une moustache aiguisée se tenait devant moi avec un équilibre incertain.