Elles disputèrent beaucoup dans la frivolité que permettait la situation. De tout et de rien. Je comprenais que Jennifer essayait de toucher la sensibilité de Sarah pour la raisonner. Mais cette dernière détournait chaque demande d'un geste de la main ou d'un «hmmmm hmmmm» avant de changer de sujet. J'espérais le bon moment pour poser une question qui me trottait dans la tête :quels problèmes comptait-elle résoudre avec moi ? C'était puéril de ma part et sans aucune logique, mais je ne voulais pas que Jennifer m'entende. Quand Sarah en aurait fini avec sa pizza et épuisé ses mots, je me lèverais et lui chuchoterais ma question. Sauf que ses mots ne s'épuisèrent jamais. Le pouls battant, j'ai dû poser ma question sous les yeux des deux femmes.
— Ben, mon petit Apo, des petits problèmes comme on en rencontre dans les couples, lâcha-t-elle comme une évidence.
— Mais on n'est pas un couple.
J'aperçus trop tard que je hurlais et tremblais.
— On en est un ? La preuve, tu as pris ma virginité et on est ici, heureux.
Comment ne pas s'attendre à entendre de pareille absurdité de sa part. Elle devait venir d'une autre planète. Sinon, elle comprendrait que la virginité d'une femme était importante certes, mais pas aussi importante au point de symboliser une union, un couple, etc.
— Mais ça ne veut rien dire ça. C'est toi qui n'arrêtais pas de me faire des avances.
— Bon, j'admets t'avoir un peu allumé. Comme tu étais timide, il me fallait faire le premier pas. Sais-tu que les couples formés grâce à l'audace d'une femme sont plus durables ?
Merde de chez merdouille !
— Mais ça ne veut rien dire.
— Tu m'as affirmé que tu m'aimais.
Et voilà, le seul et l'unique argument de taille qui frappait ma conscience comme un punching-ball. Cette scène, où ces mots sortaient de ma bouche, me remplissait de honte.
— Oui, c'est vrai. Mais la vérité, c'est que tu faisais aussi...
Le pistolet près d'elle devint plus grand. Cependant, la vérité ne devait jamais rester cachée. Il fallait qu'elle sorte. Un petit mot de cinq lettres : pitié. Dis-le. Mais je n'y parvins pas, préférant marmonner des mots inaudibles comme un demeuré. Sarah ne devina pas le reste de la phrase et ne me le demanda même pas. Peut-être qu'elle le savait déjà. Une fois le silence assez pesant pour comprendre que je ne finirais jamais ma phrase, elle se levait du lit, rayonnante et gracieuse comme un papillon avant de dire.
— Je nous prépare une surprise qui en vaille la chandelle mon petit coco. On pourra discuter de tout ce qui te tracasse et qui te fait peur.
— Tu prépares quoi ?
— Un petit dîner en amoureux. Comme dans les films romantiques.
— Les films romantiques sont chiants.
Elle déposa un baiser graisseux sur mon front.
— Alors tu vas les adorer après ce qu'on va vivre.
Calmer le doute à grands coups de salive se révéla inutile. Lorsque Sarah disait que j'allais aimer quelque chose, si ce n'était pas du sexe, il fallait se méfier. J'insistai un peu sur cette fameuse surprise, mais la réponse restait la même : « Une surprise restait une surprise ». Je hochai la tête en comprenant qu'il fallait patienter pour savoir. Je m'attendais à ce que Sarah se lève, satisfaite de son petit manège en me bavant sur le front ou les lèvres. Et en me promettant une nuit agitée, mais ce serait trop beau. Non, il fallait que sa bonté prenne le dessus et prenne pitié de mon corps tout crasseux. Un petit bain me ferait du bien.
Je redoutais une énième tentative de baiser de sa part, mais je n'avais pas le choix. Sous les yeux rancuniers de Jennifer, on sortit de la pièce en suivant le même petit rituel : se tourner quand elle entrait le mot de passe. De toute façon, ce mot de passe ne servirait à rien vu que la sortie principale en possédait une, elle aussi. Mais vous connaissez la curiosité humaine, une interdiction se transformait souvent en invitation. Je ne risquais jamais de jeter un petit coup d'œil au-dessus de mon épaule, mais pour ce qu'il en était de mes oreilles, je les tendais à l'extrême pour ne pas rater une miette. C'était qu'une combinaison de quatre chiffres, car quatre sons s'élevaient à chaque fois. Je sauvegardai cette information qui pourrait se révéler utile pour plus tard.
Le bain se passa très vite et sans bavure. Je commençais à m'habituer au contact de Sarah ainsi qu'à ses regards baladeurs. Il y avait bien sûr de petites insinuations, des petits sous-entendus lourds de sens, mais ça s'arrêtait là. Pas de main qui descendait là où il ne fallait pas. Peut-être qu'elle gardait tout pour demain ? Ce fut tout frais que je retrouvasse Jennifer attaquée par Sarah de se faire petit, car, il n'en était pas question que j'aille par terre. Quelle ironie !
J'essayais tant bien que mal de mettre les deux femmes d'accord sur le fait que le sol m'allait bien, mais la ténacité de Sarah était de fer. Ce fut donc, côte à côte, sur ce lit bredouillant et trop petit pour deux que la porte se ferma. Je restai immobile, la plupart du temps. Je n'imaginais pas du tout Sarah laisser son " bijou adoré" en compagnie d'une si splendide femme telle que Jennifer, sans avoir la moindre arrière-pensée. Non pas une folle comme Sarah. Je m'attendais à ce que la porte s'ouvre dans un grand bruit et qu'elle commence un cirque sur un éventuel mot ou geste coquin. Cela ne vint jamais.
Jennifer, quant à elle, faisait de son mieux pour n'avoir aucun contact avec moi. Elle se crispait à l'extrême comme si elle voulait se rapetisser et si sa jambe le lui permettait, elle me tournerait le dos. Bon nombre de fois, je fus allusion dans ma tête à la nuit que nous avions partagé à l'hôtel, en nous lovant au maximum et en nous caressant comme si nos vies en dépendaient.
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À tout prix
RomanceTomber sur une folle amoureuse de votre beau sourire, de vos muscles saillants, de votre parfum et de tas d'autres détails, ça vous tente ? En-tout-cas, c'est ce qui arrive à Apollo Malcolm, en visitant l'Australie. Résultat : Il se réveille dans un...