Chapitre 63

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Spontanément, je cours sur mon asseyant pour essayer de prendre son fusil. Je n'eus le temps de ne rien faire. Le coup de feu a retenti comme une double détonation. J'ai fermé les yeux machinalement. Le bruit sourd me donne des acouphènes me rendant incapable d'entendre autre chose que ce son fort et intense. Alors que je me tenais encore debout, mon sang a fait irruption. Je finis au sol et me vide de mon sang. Alors que ma douleur devenait insoutenable, tout devint doux. Cette sensation est tellement agréable...

C'est dommage, j'étais en train de retrouver mes émotions perdues. Mon cheval avait su égayer ma journée. Il m'a permise de voir un ciel magnifique. Je ne regrette pas d'avoir passé mes derniers instants à ses côtés. Je ne ressens aucune douleur bien que l'on vienne de me tirer dessus. Peut-être que finalement la mort est une délivrance. Vais-je enfin pouvoir te voir Farlan ? Alors que je me suis dit cette phrase, je pense à Livaï. Pardonne-moi Livaï, je ne pourrais définitivement pas tenir mes promesses. Ne prends pas la peine de me chercher sauf si ça peut te permettre de rester en vie. J'aurais tellement aimé rester à tes côtés, mais je suis tellement fière de t'avoir aimé comme personne ne l'a jamais fait. Même encore aujourd'hui, j'ai la sensation que ce sentiment ne cesse de s'accroître. En fin de compte… Je souhaitais plus que tout te revoir.
Je ne veux pas mourir. 

Des bruits sourds me parviennent aux oreilles. Je ne saurais dire si j'ai ouvert les yeux, mais j'ai comme une vue d'ensemble de ce qui vient de se passer.
Alors que mes forces me quittent, j'essaie de voir le visage de la personne qui a abattu mon ravisseur. Des cheveux bruns, c'est tout ce que j'ai pu voir.

J'ai l'impression d'être dans l'immensité, l'infini. C'est alors que j'ai la sensation de pouvoir ouvrir les yeux. Où est-ce que je vais être ? Existe-t-il quelque chose après la mort ? Finalement, je parviens à ouvrir mes yeux. Quel est cet endroit sombre ? Je m'attendais à y voir la lumière. Les ténèbres ont-elles eu raison de moi ? Je remarque que je peux tourner la tête. J'essaie donc d'observer ce qu'il y a autour de moi. Il y a des tables et des chaises dans les ténèbres ? Oh, mais suis-je allongée sur un lit ? Le mur noir laisse entrer une personne. Je ne bouge pas, je fixe ce mur en me demandant comment cette personne a pu y passer au travers. C'est alors que cette même personne met de la lumière, je peux alors mieux distinguer les éléments qui m'entourent. Cette personne a tout simplement utilisé une porte pour entrer dans la pièce, ce n'est pas original. J'avoue que je m'attendais à mieux. Soudainement, des mains m'ont brouillé la vue, on est en train de me mettre une serviette humide sur le front. J'ai donc la capacité de pouvoir ressentir la matière ?

- je suis désolé. Dit faiblement l'homme en se mettant à genoux en cachant son visage dans le matelas.

Je ne sais pas qui est cette personne, cependant elle me fait tout de même de la peine. Sa voix a tremblé lorsqu'il a dit cette phrase, il me semble même la reconnaître cependant, je ne sais pas à qui l'associer. Serait-il... Mon coeur fait un bon. Je n'espère pas que c'est cette personne à laquelle je pense, il est trop tôt pour lui.

- qui est-ce ?

Je sens sur ma couverture que l'homme se crispe. Je veux savoir qui est cette personne, je ne veux pas que ce soit toi.
Il relève la tête, je peux alors voir que son visage m'est familier. J'écarquille les yeux, et prends la parole.

-pourquoi est-ce que tu t'excuses ? Je suis ravie de te retrouver même dans la mort Isas.

Il me dévisage surpris de ce que je viens de dire. N'est-il pas heureux de me voir en fin de compte ?

- moi aussi j'ai parfois du mal à y croire, mais nous ne sommes pas morts.

Un électrochoc parcourt mon corps. Je m'assieds instinctivement à l'entente de sa phrase. Isas n'est pas mort !? Ce qui veut dire que… C'est lui qui a tué le dernier homme, celui qui m'a tiré dessus.

-il ne faut pas se lever si précipitamment !

- oh Isas, c'est moi qui devrais m'excuser. Pourquoi a-t-il fallu que tu tues cet homme ?

- vous avez encore des choses à faire, je ne peux pas vous laisser mourir.

- cesse de me vouvoyer, ça appartient à l'époque où j'essayais d'être une parfaite soldate. J'ai toujours détesté l'idée d'être votre supérieur. Supérieur de quoi au juste ?

Il me regarde dans les yeux et acquiesce d'un hochement de tête avant de prendre à nouveau la parole.

- je suis le seul qui ait pu survivre à l'expédition. Kin, Ayden et Hiro sont morts vaillamment avec le major Erwin...

J'ai envie de lui demander comment a-t-il fait pour survivre, mais je contemple mes draps fixement. Aucun mot ne sort.

- Loeiza, tu as beaucoup changé depuis la dernière fois. Tu sembles...

- dépressive ? J'ai tant de lucidité, d'embarras et de chagrin que j'en perds la tête. Finalement, la mort n'est pas la pire chose de la vie. Le pire, c'est ce qui meurt en nous quand on vit.

Son corps se crispe face à mes paroles. Je le sais, il a connu des paroles plus encourageantes ou encore déterminées, mais je n'ai plus envie de faire des efforts inutiles. Soudainement, il prend la parole.

- il faut retourner sur Paradis, j'ai fait au mieux pour ta blessure mais je manque de soin.

- quelle blessure ? Je ne sens rien.

- je t'ai donné un calmant. Par chance, tu as reçu la balle au niveau du pied. J'ai pu enlever les éclats, mais pour ce qui est interne, je ne peux m'y risquer de les retirer.

- alors je m'en chargerai, qu'importe.

- Loeiza, ce n'est pas une bonne idée ! Tu as besoin d'être prise en charge. Si ta blessure n'est pas traitée, cela va se transformer en infection et tu risques de perdre l'usage de ta jambe. Rester ici est trop risqué pour nous. Nous ne connaissons rien de cette vie, se faire repérer n'est plus qu'une question de temps.

- tu crois vraiment qu'ils vont nous accueillir à bras grand ouvert là-bas ? Nous sommes en sécurité nulle part.

Il me dévisage les yeux grands ouverts avant de finalement poser ses deux mains sur chacune de mes épaules.

- tu débloques ! Tes alliés sont là-bas, tu t'en souviens ?

- tu parles du bataillon ? Je doute qu'ils nous fassent confiance...

- j'engagerai la discussion s'il le faut ! Je trouverai le moyen, compte sur moi.

Je soupire. Me battre avec lui ne me fait aucune envie, qu'importe mon destin, je le suivrai.

- d'accord, retournons chez-nous. Affirmai-je en soufflant.

Un immense sourire se dessine sur le visage d'Isas. Finalement, il se retourne et prépare des affaires. J'essaie de me lever du lit et de marcher, mais cela s'avère relativement plus compliqué que prévu. Je m'effondre sur le sol en essayant de m'agripper avec mon bras gauche sur le lit. Je vais retourner là-bas en canard boiteux…
Sans que je ne m'y attende, je souffle du nez en guise de rire silencieux en ayant le sourire aux lèvres. Isas se tourne vers moi en ayant un visage plus adouci.

- il faut partir.

Pour Ma Survie Et Celle De L'humanité (TOME 2) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant