Septième

217 26 0
                                    

Dans le silence glacial de l'hiver, sous les nuages sombres qui nous dominaient, nous avancions, nos chaussures se recouvraient d'eau, gelant nos pieds, nos corps étaient éloignés, accentuant ce froid, glaçant nos doigts.

-Tu me donnes encore plus froid toi ! Pourquoi tu n'as pas accepté mon manteau ?

Il râlait, ce bêta que j'aimais, comme toujours. Mais le froid m'apaisait, il me glaçait au point que je ne sentais plus mon corps, ce corps qui pouvait à tout instant me contrôler, se réchauffer pour être mieux comblé. Seulement réaliser que mes premières chaleurs s'étaient manifestées ne m'avait pas allégé d'un poids, au contraire, celui qui me pesait déjà s'était décuplé. Cela n'avait fait que raviver la brûlure de cette marque, cette chose qui se dissimulait en moi, qui fuyait mon loup colérique, qui semblait quant à lui l'avoir accepté. Ma gorge était nouée, je n'avais pas réussi à la lui montrer, à lui expliquer ce qu'il s'était passé.

-Je serais curieux de voir l'alpha avec qui tu t'es envoyé en l'air quand même, il devait pas être si bon vu comment tu le fuis pour t'en chercher un autre !

Il avait ce sourire amusé, sa voix aussi l'était, mais pas moi. Mes yeux se baissèrent sur le sol humide d'une pluie précédente, évitant les regards qui s'accrochaient à moi. Il dut sentir le changement de mes sentiments car il se rapprocha de moi jusqu'à poser délicatement sa main sur mon épaule.

-Je ne voulais pas le dire comme ça, je suis désolé, ça doit être bouleversant de devenir quelqu'un d'autre et de se remettre entre les mains d'un inconnu.

Mon corps s'arrêta, le sien aussi, mes yeux se relevèrent, lentement, jusqu'à s'accrocher aux siens.

-Et si ce n'était pas un inconnu ?

Ma voix affaiblie, remplie de tristesse, le retourna, je pus lire de la désolation sur son visage avant que son corps ne me recouvre entièrement, m'enfermant dans une étreinte chaude et réconfortante. Une étreinte dont j'avais besoin, qui me donnait du courage, la force pour lui avouer une partie de la vérité.

-Ce n'était pas n'importe quel alpha Lucas.

Le corps de mon ami se redressa, se recula assez pour m'observer, les sourcils froncés. Avant qu'il ne puisse parler, mes doigts se posèrent sur le col qui la cachait, son regard ne s'éloigna pas du mien, une plus grande inquiétude, alors, se manifesta. Je l'exposai, là, à ce froid, cette immondice qui ne se glaça pas, au contraire, elle se réchauffa. Il ne la regarda pas, il ne le voulait pas, à la place, il secoua faiblement la tête, son trouble s'accentuant.

-C'est pas possible, souffla-t-il d'une voix blanche.

Sans qu'un autre mot ne soit prononcé, j'acquiesçai.

-Il m'a marqué.

Ce n'est qu'alors, à présent que je l'avais confirmé qu'il laissa ses yeux y dériver. Longuement, dans le silence de nos voix, il la fixa. Ses yeux finirent par se relever pour s'ancrer dans les miens qui avaient fini par de calmer, s'asservir pour se résigner.

-Je ne le laisserai pas te retrouver, je te le promets.

Sa détermination m'étonna, elle fit renaître l'espoir en moi, davantage encore lorsqu'il lia nos mains tendrement, nous faisant avancer l'instant d'après en une autre direction.

-On va où ? lui demandai-je d'une voix chevrotante.
-A la pharmacie, mais tu restes dehors.

Avant que je ne le comprenne, il me poussa, me faisant reculer de quelques pas, à l'abri des regards, alors qu'il me quitta. La solitude glaciale de l'hiver me frappa, mes yeux se perdirent alors sur la foule, toutes ces personnes qui marchaient, loin de moi et de ce que j'étais. L'anxiété me dévora, davantage en voyant ces mères au loin avec leur bébé, sous le joug de leur alpha qui ne les quittaient pas. Ce ne serait pas moi. Pour cela, je devais fuir ce frère que j'aimais, d'une manière bien différente que lui le faisait.

Toi, moi...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant