Vingt-et-unième

127 14 0
                                    

La douleur affligeante de mon cœur et de mon esprit me força à rejoindre l'appartement de mon frère. J'y restai toute la journée, la faim coupée, le repos me fuyant, assis sur le canapé, mon sac devant moi, que je fixai. Je n'avais pas le courage de le défaire, de m'installer ici. Devant moi se trouvaient les vestiges d'une vie passée, à laquelle j'avais été obligé de renoncer.

La porte claqua, au milieu de l'après-midi, mon regard terne ne bougea pas de devant moi, malgré les lourds pas qui s'avancèrent.

-J'ai croisé le concierge.

Le timbre profond de sa voix ne parvint pas à me ramener à moi, même lorsque sa lourde présence se retrouva derrière moi, me surplombant.

-Il m'a fait une remarque assez étrange, comme quoi, je ne devrais pas oublier mon bel oméga dans mon appartement, la prochaine fois. Mais ça ne peut pas être toi Nao, pas alors que je t'avais demandé de te reposer ici.

Son ton s'était durci, sans que je ne m'en soucie. Je me fichais bien de ce qu'il ferait, il avait déjà bien trop brisé ma vie et j'avais déjà, depuis bien longtemps abandonné.

-Qu'est-ce que ça peut te foutre au juste ?

Sa main se posa sur mon épaule, tendrement, affolant mon loup, sans ne rien me faire, à moi.

-Nao, m'appela-t-il dans un souffle profond. Je sais que tu as été chez nos parents, alors que je t'avais promis que nous irions ensemble, tous les deux.

Je me défis de son emprise, me décalant de quelques mètres en croisant mes bras.

-Je ne veux plus les revoir.

Son corps se déplaça, jusque devant moi, ses yeux légèrement rougeâtres me fixant de leur hauteur, sans réellement éveiller mon esprit face à ce danger. Il m'avait tout pris, même mon effronterie.

-Personne n'a voulu me raconter ce qu'il s'était passé, mais tu as encore du vouloir faire à tes goûts.

Ce reproche, comme tous les autres, ne me parvint pas.

-Je n'ai pas besoin de toi pour sortir Adam, et encore moins de ta permission pour le faire.

Mon désintérêt pour lui fut ce qui le fit flancher, autant que les mots que je prononçai. Il s'avança, son impressionnante carrure me bloquant la vue. Mes yeux s'échappèrent au loin, mon corps ignora le si doux toucher de ses doigts sur ma joue. Mes muscles se tendirent, un glapissement m'échappa lorsqu'il attrapa ma mâchoire entre sa grande main, ses doigts s'enfonçant dans mes joues.

-Tu ne l'écoutes pas, tu ne nous respectes pas, tu te fiches de nous et de notre inquiétude.

Mes yeux se firent piéger par la brûlure rouge des siens. Immédiatement, mes mains se posèrent sur son avant-bras chaud. Une certaine appréhension me traversa, face à ce loup, cette bête immonde qui me voulait sans cesse.

-Tu me fais mal.

Sa prise sur mes joues se fit plus légère, me permettant de mieux respirer, mais pas de calmer les battements erratiques de mon cœur.

-Tu as été le rejoindre.

Il se pencha sur moi, nous affolant davantage. Ma tête se rentra dans mes épaules, lui dévoilant ma nuque nue, alors qu'il inspirait mes cheveux. Son grognement profond, si près de moi, répandit de longs frissons de peur dans tout mon corps.

-Tu ne sens pas son odeur, pourtant, peut-être que tu as effacées ses traces.

Mes sourcils se froncèrent, sans comprendre de quoi il parlait, sans avoir la force d'y penser. Son corps se redressa, permettant au mien de s'enfoncer plus profondément dans le canapé en croisant mes bras. Mes yeux se détournèrent de lui, l'ignorant pour mieux le lasser et me laisser.

Toi, moi...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant