Chapitre 7

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"I think we kissed but I forgot"

Last Friday Night - Katy Perry

Luc

J'ai un frisson de sursaut en me réveillant dans un endroit absolument inconnu. J'ai encore mon costume de la veille, et je suis allongé sur le carrelage glacé d'une salle de bain. J'ai l'impression d'avoir un putain de marteau-piqueur dans la tête. Je ne sais pas si c'est la faute de l'alcool ou celle des pilules.

J'ai l'impression d'avoir été dans le coma à la place d'avoir dormi. Je tente de me redresser, mais j'ai le vertige, plutôt ironique de la part d'un gars qui adore l'escalade.

Je rassemble les quelques souvenirs d'hier et je me souviens que je suis chez Kimi. J'arrive en zigzaguant dans la cuisine pour boire de l'eau. La maison est dans un état déplorable. Sur le mur du salon, quelqu'un a tagué un fantôme. La pauvre, à sa place, j'aurais pleuré. Il y a une grosse différence entre nettoyer sa maison après une grosse fête et devoir repeindre un mur en vitesse avant que tes parents reviennent tout en sachant pertinemment que tu vas te faire chopper à cause de l'odeur de peinture.

Dès que je pense à Gabriel, mon cerveau cesse de fonctionner. Le genre de stop qu'on a quand on essaye de se souvenir d'un rêve. On a un pressentiment ou un détail, mais rien de plus. Pour ma part, je sais que j'ai fait un truc stupide et je pense que c'était sous le porche. J'ai envie de me taper la tête contre les murs pour me souvenir d'hier.

J'ai presque fait un black out complet. J'ai des bribes de souvenirs mais sans plus. Je me déteste pour avoir oublié cette soirée alors qu'elle était si importante pour moi. Au fond, mon père a raison, je ne suis bon à rien. Même pas capable d'être un bon ami ou même de passer une soirée sans finir à genou au-dessus de la cuvette des toilettes. C'est pathétique. Je suis pathétique.

Je sors de la maison et l'oxygène s'engouffre dans mes poumons tellement vite que ça me bloque presque les bronches. C'est là que je me rends compte d'à quel point la fumée avait envahi sa maison. Ils ont dû fumer toute la nuit avec les fenêtres fermées. Inconsciemment, j'en étais quasiment arrivé à penser que l'odeur de l'herbe était de l'air sain.

Je m'assieds quelques minutes sur les marches devant la maison pour reprendre mon souffle et combattre la nausée encore trop présente. Mes souvenirs d'hier sont un peu comme des corbeaux en cages qui se jettent contre les barreaux pour sortir. Mais pour autant, je ne me souviens toujours pas. Et Dieu sait que j'essaye. J'essaye parce que j'ai le sentiment d'avoir encore fait de la merde et je veux réparer mes erreurs.

Mon estomac gronde tellement fort qu'on dirait qu'un monstre est à l'intérieur. C'est drôle dit comme ça. On dirait le genre de pensée que les enfants ont. Gabriel aurait ri si je lui avais confié ça.

La sensation qui s'empare de moi quand je pense à Gabriel est inhabituellement désagréable, alors je ne veux pas y penser. C'est rare que je me refuse à penser à lui.

Je préfère me concentrer sur le fait de ne pas vomir. Je décide d' aller trouver un café pour prendre un vrai petit déjeuner, je meurs de faim.

La ville est plutôt vide, presque apocalyptique. On n'est pas dans Paris centre et c'est dimanche matin, donc tout le monde dort. C'est si paisible. Quelques gouttes de pluie tombent sur le pavé et se font immédiatement absorber. C'est tellement relaxant, la grisaille. J'aime Paris de tout mon cœur.

Une fois arrivé dans le café, je commande un café noir pour la gueule de bois et une grosse part de gâteau au chocolat. Gabriel en prend toujours quand on arrive dans cette enseigne et après, il me force à en manger au moins la moitié. Il dit qu'il ne peut pas manger si je ne mange pas. Il dit qu'il se sentirait égoïste. S'il savait à quel point il est tout l'inverse.

Burning RedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant