Chapitre 21

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"I feel your compliments like bullets on skin"

Lacy - Olivia Rodrigo

Gabriel

Chanson Bonus : emails i can't send, Sabrina Carpenter

Tu te souviens, Luc, quand enfant, je disais que ma mère était hôtesse de l'air pour expliquer son absence ? C'est la première chose qui me vient à l'esprit quand je me retrouve devant les portes battantes de l'hôpital où travaille le père de Luc, alors que ma mère se trouve dans une chambre à quelques mètres de moi.

Je suis censé retrouver mon père et parler à ma mère ensuite. Luc est près de moi, je le sens comme une présence physique me soutenant presque au sens propre. Je reste un instant figé devant les portes en verre, n'arrivant pas à me décider de rentrer. Je vais devoir faire face à ce que j'ai redouté toutes ces années et ça me terrifie.

— Tu peux m'accompagner jusqu'à l'ascenseur ?

— Bien sûr, Gaby.

Finalement, il m'a accompagné jusqu'en haut. Mon père m'attendait, assis sur une chaise devant la porte. Hier matin, quand je l'ai eu au téléphone, il avait la voix cassée, il avait pleuré. J'ai surtout compris qu'il était encore amoureux d'elle et c'est moi qui ai eu envie de pleurer.

Le voir ainsi, le dos courbé, la tête entre les mains et la tristesse qu'il porte sur ses épaules depuis tant d'années me brise le cœur.

— Papa, je chuchote en touchant son épaule.

Il sursaute et lève les yeux vers moi. Ils sont injectés de sang et je devine qu'il n'a pas dormi depuis un moment. Il se met debout dans un sursaut et me prend dans ses bras tout en caressant mes cheveux avec sa main.

— Comment tu vas, Gaby ?

— Je vais bien, et toi, papa ?

— Tu sais, ce n'est pas facile de voir ta mère dans cet état, alors que la dernière fois que je l'ai vue, elle était en bonne santé. C'est comme si elle avait dépéri en un clin d'œil !

— Tu n'aurais pas eu cette impression si elle était restée avec nous.

— Gabriel, tu peux me faire une faveur ?

Je soupire et lève les yeux au ciel. Je devine déjà ce qu'il veut me demander et ça ne m'enchante vraiment pas. Je finis par acquiescer, plutôt à contrecœur.

— Sois indulgent avec ta mère, commence-t-il en prenant mon visage entre ses mains. Ce n'est pas parce qu'on est des parents qu'on a une immense expérience de la vie ou qu'on en a vécu plusieurs. C'est sa première vie et elle expérimente autant que toi. On fait tous des erreurs.

Je continue de secouer la tête pour seule réponse. Je ne ferai rien qui le contrariera aujourd'hui.

Je m'approche de la porte et pose ma main sur la poignée métallique glacée. J'entre et jette un dernier coup d'œil à Luc avant de m'enfermer avec elle. L'odeur du désinfectant me pique les narines alors qu'une bouffée de chaleur m'envahit. Je déteste profondément les hôpitaux. Je déteste le bruit régulier des machines et cette ambiance macabre constante. Je déteste qu'on entende plus souvent des sanglots que des éclats de rire. Je déteste qu'il soit impossible d'ouvrir la fenêtre. Je déteste devoir venir ici la voir.

Je me retourne en gardant les yeux clos. Je me force à les ouvrir d'un coup, alors je balaye la pièce des yeux et là, je vois le lit médicalisé. Dedans, ma mère est étendue avec un drap blanc pour seule couverture, une blouse d'hôpital pour seul vêtement.

Burning RedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant