Chapitre 51

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"Let's raise a glass or two, to all the things I've lost on you "

Lost on You - LP

Luc

Mon professeur particulier arrive dans une dizaine de minutes, mais je suis tétanisé après l'appel de Gabriel. Quelque chose clochait définitivement, il avait l'air apeuré. Et si mon père avait quand même trouvé un moyen de lui faire du mal ? Une partie de moi veut aller le voir immédiatement, l'autre préfère attendre ce soir pour être sûr que les conséquences soient moindres.

Peut-être qu'il a su par je ne sais quel moyen que j'ai parlé à ma mère. Peut-être qu'elle a trouvé un moyen de financer ses études et qu'elle lui en a parlé. Vu le mélange de peur et de choc dans sa voix, ça m'étonnerait vraiment. De toute façon, elle m'a dit que lui payer ses études déclarerait la guerre avec mon père et qu'elle ne pouvait pas faire ça. D'autant plus que leurs comptes sont joints.

Le professeur arrive et me donne des exercices bêtes et méchants. Je les réussis du premier coup, il me donne donc des plans de dissertation à faire et quelques heures plus tard, repart sans que je n'ai rien appris.

Je feins de manger un morceau et dis que je me sens mal pour monter. Mon père refuse de m'adresser la parole, sauf pour me donner des ordres, alors il est bien content de passer un moment de plus sans m'avoir dans sa vision périphérique.

Dans le hall, une porte en dessous des escaliers s'ouvre. C'est un accès aux quartiers de repos des domestiques. Elle mène à une petite dépendance avec une partie faite de verre où ils peuvent se reposer pendant leurs pauses. Les cheveux blancs puis le visage âgé de Charles dépassent. Il me mime de me taire et me demande d'un geste de la main de la suivre.

Intrigué, je le fais. Je parcours ce long couloir qui mène au jardin, puis trottine en silence pour que mon père ne m'aperçoive pas par la fenêtre.

— Luc, je dois te parler, m'annonce-t-il avec de l'urgence dans la voix.

— Bien sûr. Je t'écoute ?

— Cette après-midi, ton père m'a demandé de le conduire vers un endroit inconnu. Il me guidait au fur et à mesure, jusqu'à notre arrivée dans le quartier de Gabriel. Je ne pouvais pas refuser de le faire.

Il lit la peur dans mes yeux. Mon souffle se coupe et mon cœur fait un saut.

— Je comprends, Charles, pas de soucis. Dis-moi juste ce qu'il a fait.

— Gabriel va bien.

Je soupire de soulagement. Je me détends un peu.

— Il lui a proposé de payer toutes ses études, en échange, il ne doit plus jamais t'adresser la parole.

— Il a répondu quoi ?

Un sourire espiègle se dessine sur son visage. Je dirais presque qu'il y a une certaine fierté à l'intérieur.

— Il lui a dit qu'il ne l'envisage pas une seule seconde.

Nerveusement, je ris. Il m'aime donc à ce point.

— Merci de m'avoir prévenu, Charles.

Je connais son visage par cœur. Ses rides, ses tâches brunes, ses yeux fatigués, mais pleins de malice. Soudain, ces mêmes yeux s'assombrissent.

— Il y a un problème ? m'inquièté-je.

— Non, tout va bien.

— Dis-moi !

— Non, il ne vaut mieux pas.

— S'il te plait.

— Luc, je ne peux pas.

Burning RedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant